Date de début de publication du BOI : 31/03/1998
Identifiant juridique : 12C-1-98
Références du document :  12C-1-98

B.O.I. N° 62 du 31 MARS 1998


BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS

12 C-1-98

N° 62 du 31 MARS 1998

12 R/2

INSTRUCTION DU 23 MARS 1998

LA PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RECOUVREMENT

[D.G.I. - Bureau III C 3]



PRESENTATION GENERALE


La prescription est un principe fondé sur l'écoulement d'un certain délai, au terme duquel une situation de fait qui s'est prolongée devient inattaquable.

Un impératif de sécurité juridique justifie que l'Etat soit soumis, au même titre que les personnes privées, à la prescription comme le prévoit l'article 2227 du Code civil.

Le législateur a toutefois édicté en matière fiscale des prescriptions spécifiques, qui sont plus courtes qu'en matière de droit commun (prescription de trente ans).

Cette instruction traite des principes auxquels est soumise la prescription applicable à l'action en recouvrement menée par les comptables des impôts.


SOMMAIRE

INTRODUCTION
 
CHAPITRE PREMIER : LE DELAI D'EXERCICE DE L'ACTION EN RECOUVREMENT
 
SECTION 1 : La durée du délai de prescription
 
A. PRINCIPE
 
B. EXCEPTIONS
 
  I. Créances domaniales
 
  II. Décisions rendues par les juridictions judiciaires statuant en matière pénale
 
    1. Plainte pour détournement d'objets saisis (cf. DB 12 C 2245)
 
    2. Infractions relevées en matière de contributions indirectes (cf. DB 13 E)
 
C. CAS PARTICULIER : Créance du receveur à l'encontre d'un tiers destinataire d'un avis à tiers détenteur
 
SECTION 2 : Point de départ du délai
 
A. PRINCIPE
 
B. DATE DE LA NOTIFICATION
 
  I. Notification d'un avis de mise en recouvrement par voie postale
 
  II. Notification d'un avis de mise en recouvrement par voie d'huissier
 
  III. Cas particuliers
 
    1. Notification d'un avis de mise en recouvrement dans le cadre de l'assistance administrative internationale
 
    2. Renouvellement d'un avis de mise en recouvrement détruit dans un cas de force majeure (art. L 256 A et L 275 A du Livre des procédures fiscales)
 
SECTION 3 : Computation du délai
 
A. PRINCIPE
 
B. EXCEPTION
 
SECTION 4 : Champ d'application du délai de prescription
 
A. AU REGARD DES SOMMES SOUMISES A LA PRESCRIPTION
 
B. AU REGARD DES PERSONNES VISEES PAR LA PRESCRIPTION
 
CHAPITRE DEUXIEME : MODIFICATION DE LA DUREE D'EXERCICE DE L'ACTION EN RECOUVREMENT
 
SECTION 1 : Interruption de la prescription de l'action en recouvrement
 
SOUS-SECTION 1 : Evénements susceptibles d'interrompre la prescription
 
A. ACCOMPLISSEMENT D'ACTES DE POURSUITE
 
  I. Commandement de payer signifié par huissier
 
  II. La mise en demeure
 
  III. Les procédures de saisie
 
    1. La saisie-vente
 
    2. La saisie-attribution
 
    3. La saisie des rémunérations
 
    4. L'avis à tiers détenteur
 
    5. Les mesures d'exécution sur les véhicules terrestres à moteur
 
      a) La saisie par déclaration à la préfecture
 
      b) La saisie par immobilisation dans le cadre d'une saisie-vente
 
      c) Les autres saisies par immobilisation pour obtenir le paiement d'une somme d'argent
 
    6. La saisie des droits incorporels
 
    7. La saisie immobilière
 
    8. Les mesures conservatoires
 
B. CITATION EN JUSTICE
 
C. RECONNAISSANCE DE DETTE PAR LES REDEVABLES
 
  I. Versements d'acomptes
 
  II. Demande de délais de paiement
 
  III. Envoi d'un avis de compensation
 
SOUS-SECTION 2 : Effets et portée de l'interruption de prescription
 
SECTION 2 : Suspension de la prescription de l'action en recouvrement
 
SOUS-SECTION 1 : Causes de suspension de la prescription
 
A. IMPOSSIBILITE D'AGIR
 
  I. Suspension de la prescription lorsque le débiteur a déposé une réclamation et bénéficie du sursis de paiement
 
  II. Ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire (Loi du 25 janvier 1985)
 
    1. Créances soumises à déclaration
 
      a) En situation de redressement judiciaire
 
      b) En situation de liquidation judiciaire
 
    2. Autres créances
 
B. SUSPENSION PREVUE PAR LA LOI
 
SOUS-SECTION 2 : Effets et portée de la suspension
 
CHAPITRE TROISIEME : EFFETS DE LA PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RECOUVREMENT
 
SECTION 1 : Conditions pour que la prescription produise ses effets
 
A. LE DEBITEUR NE DOIT PAS AVOIR RENONCE A LA PRESCRIPTION
 
  I. Formes et conditions de la renonciation à la prescription
 
  II. Effets de la renonciation à la prescription
 
B. LE DEBITEUR DOIT INVOQUER LA PRESCRIPTION
 
C. APPLICATION AUX CREANCES FISCALES
 
SECTION 2 : Effets de la prescription
 
ANNEXE : Livre des procédures fiscales - Code civil
 


INTRODUCTION


1.Il y a lieu de distinguer deux types de prescription : la prescription acquisitive, qui est un moyen d'acquérir un droit, et la prescription extinctive qui est un moyen de se libérer d'une obligation au terme d'un certain délai pendant lequel le créancier est resté inactif (art. 2219 du Code civil).

2.La prescription de l'action en recouvrement constitue une prescription extinctive. A défaut d'action du comptable des impôts pendant un certain délai fixé par la loi, celui-ci perd son droit d'agir contre un débiteur qui se trouve libéré de son obligation de paiement.

3.Par ailleurs, en matière fiscale, le délai de prescription de l'action en répétition doit être distingué de celui de l'action en recouvrement.

Le premier de ces délais est celui pendant lequel l'Administration peut établir ou constater l'existence d'une dette fiscale constituée par l'impôt en principal et éventuellement une imposition complémentaire ou des pénalités fiscales.

Le second est celui pendant lequel le créancier peut poursuivre le recouvrement forcé de ces impositions ou pénalités.

4.Il débute en principe par la notification d'un avis de mise en recouvrement qui doit intervenir avant l'expiration du délai de prescription de l'action en répétition.

5.La prescription relative à l'action en recouvrement est régie par les articles L 274 et L 275 du Livre des procédures fiscales.

6.Dans cette instruction, il n'est traité que de la prescription de l'action en recouvrement, la prescription de l'action en répétition faisant l'objet de commentaires publiés dans la documentation de base dans la série 13 RC (cf DB 13 L 12).


CHAPITRE PREMIER :

LE DELAI D'EXERCICE DE L'ACTION EN RECOUVREMENT


7.L'action que le comptable des impôts est, le cas échéant, amené à engager pour obtenir le recouvrement d'impositions constatées doit, pour être valable, intervenir, en principe, dans un délai prévu par le Code général des impôts.


SECTION 1 :

La durée du délai de prescription


8.L'article L 275 du Livre des procédures fiscales prévoit que la notification d'un avis de mise en recouvrement modifie la nature de l'action ouverte à l'Administration, substituant en effet la prescription quadriennale à la prescription de l'action en répétition.


  A. PRINCIPE


9.Le délai de prescription de l'action en recouvrement est de quatre ans.

10.Il concerne, sous réserve de quelques exceptions limitées exposées ci-après, l'ensemble des créances recouvrées par les comptables des impôts et notamment celles résultant d'une décision de justice constatant une solidarité au paiement de la créance fiscale rendue par les juridictions civiles - par exemple en application des articles L 266 et L 267 du Livre des procédures fiscales - ou pénales - condamnation du dirigeant suite à une plainte pour fraude fiscale (art. 1745 du CGI).

Ce délai s'est appliqué à compter du 1er janvier 1985 et s'est substitué à une prescription décennale.


  B. EXCEPTIONS



  I. Créances domaniales


11.Le délai de prescription de l'action en recouvrement appliqué aux créances domaniales est de dix ans (art. 82-1 du Code du domaine de l'Etat).


  II. Décisions rendues par les juridictions judiciaires statuant en matière pénale


  1. Plainte pour détournement d'objets saisis (cf. DB 12 C 2245 )

12.La plainte pour détournement d'objets saisis a pour objet l'allocation de dommages et intérêts au Trésor.

13.La condamnation a donc le caractère d'une condamnation civile à dommages et intérêts et, comme telle, est régie, en ce qui concerne la prescription par l'article 133-6 du nouveau code pénal qui prévoit que les obligations de nature civile résultant d'une décision pénale devenue définitive se prescrivent d'après les règles du Code civil.

Le délai de prescription est par conséquent de trente ans (article 2262 du Code civil).

  2. Infractions relevées en matière de contributions indirectes (cf. DB 13 E ).

14.L'article L 188 du Livre des procédures fiscales dispose que pour les amendes et confiscations fiscales prononcées par la juridiction pénale, le délai de prescription est le même que pour les peines correctionnelles de droit commun.

15.Dès lors, en application de l'article 133-3 du nouveau code pénal qui prévoit que les peines prononcées pour un délit se prescrivent par cinq années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive, l'action en recouvrement pour les infractions relevées par procès-verbal en matière de contributions indirectes se prescrit dans le délai de cinq ans.


  C. CAS PARTICULIER : Créance du receveur à l'encontre d'un tiers destinataire d'un avis à tiers détenteur


16.La créance du receveur vis-à-vis de ce tiers qui n'est tenu qu'à concurrence des sommes qu'il détient, n'est pas de nature fiscale.

17.L'avis à tiers détenteur, qui emporte attribution au profit du receveur de la créance du redevable sur le tiers saisi, est simplement translatif de droit.

Il y a donc lieu de considérer, sous réserve de l'appréciation des tribunaux, que la créance saisie au profit du receveur conserve ses caractéristiques, notamment au regard de la prescription.

18.Par conséquent, la durée de la prescription sera fonction de la créance transférée : trentenaire si elle est de nature civile, décennale si elle est de nature commerciale, à moins qu'elle ne soit soumise à une prescription plus brève (art. 189 bis du Code de commerce).


SECTION 2 :

Point de départ du délai



  A PRINCIPE


19.A l'exception des décisions de justice, le point de départ du délai de prescription est constitué par la notification de l'avis de mise en recouvrement.

Cette notification a pour effet d'interrompre la prescription d'assiette courant contre l'Administration et y substitue la prescription de l'action en recouvrement.

Elle ne produit donc ses effets que si elle intervient avant l'expiration du délai de prescription de l'action en répétition (cf. DB 13 L 121).

20.S'agissant des décisions de justice, le point de départ de la prescription est constitué par la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, c'est-à-dire quand elle est exécutoire.

Une décision est exécutoire lorsque les voies de recours ordinaires (appel ou opposition) n'ont pas été exercées ou lorsqu'elles ont été épuisées

En effet, si l'appel et l'opposition sont suspensifs d'exécution (art. 539 du nouveau code de procédure civile), en revanche, les voies de recours extraordinaires (tierce opposition et pourvoi en cassation) ne le sont pas.

21.Dans ces conditions, le point de départ de la prescription est constitué :

- pour un jugement de première instance non frappé d'une voie de recours, par la date d'expiration du délai de recours ;

- pour une décision d'appel, par la date du prononcé de l'arrêt.

22.En tout état de cause, l'exécution de la décision ne pourra intervenir qu'après sa signification (art. 503 du nouveau code de procédure civile).