B.O.I. N° 35 DU 22 MARS 2012
INTRODUCTION
1.Les articles cités dans la présente instruction sont, sauf indication contraire, ceux du code général des impôts (CGI).
CHAPITRE 1 :
TRANSMISSION A TITRE GRATUIT DE PARTS OU ACTIONS DE SOCIETES (ART. 787 B ET 1840 G TER DU CGI)
Section 1 :
Mutations et biens concernés
I. SOCIETES CONCERNEES ET NATURE DE L'ACTIVITE
2.Les biens susceptibles de bénéficier de l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit prévue à l'article 787 B sont les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Pour l'appréciation de la nature de ces activités, il convient de se reporter aux indications données dans la documentation de base (DB) 7 S 3311 n° 2 et suivants.
Il est précisé que la société doit conserver une activité éligible au bénéfice de l'exonération partielle pendant toute la durée de l'engagement collectif et de l'engagement individuel.
Le régime d'imposition de la société est sans incidence pour l'application de la mesure.
Par ailleurs, il n'est pas exigé que ces sociétés exercent à titre exclusif les activités précitées 1 . Dès lors, le bénéfice du régime de faveur n'est pas refusé aux parts ou actions d'une société qui exerce à la fois une activité civile 2 et une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, dans la mesure où cette activité civile n'est pas prépondérante. Le caractère prépondérant de l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale s'apprécie au regard de deux critères cumulatifs que sont le chiffre d'affaires procuré par cette activité (au moins 50 % du montant du chiffre d'affaires total) et le montant de l'actif brut immobilisé (au moins 50 % du montant total de l'actif brut).
Précisions : les sociétés étrangères peuvent bénéficier de ce dispositif 3 , étant précisé que les conditions d'application sont dans ce cas identiques à celles exigées pour les transmissions de titres de sociétés françaises.
Les exploitations dont les revenus sont soumis au régime spécial prévu à l'article 76 peuvent bénéficier de ce dispositif.
Ainsi, par exemple, les exploitations forestières peuvent bénéficier de ces dispositions. Il est précisé que lorsque les bois et forêts sont détenus via un groupement forestier, il conviendra en toute hypothèse que l'un des bénéficiaires de la transmission exerce son activité principale au sein du groupement. Dans cette situation, il est nécessaire qu'il y ait une véritable entreprise transmise, au-delà de la simple transmission de bois et forêts soumis au régime fiscal de l'article 76 en matière d'impôt sur le revenu. 4
Par ailleurs, le bénéfice de l'exonération partielle est cumulable avec l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit des parts d'intérêts détenues dans un groupement forestier prévue au 3° du 1 de l'article 793.
II. CAS PARTICULIER DES SOCIETES HOLDINGS
3.L'activité financière des sociétés holdings les exclut normalement du champ d'application de l'exonération partielle.
Toutefois, les dispositions de l'article 787 B précité sont applicables aux transmissions à titre gratuit de parts ou actions de sociétés holdings animatrices 5 de leur groupe de sociétés, toutes les autres conditions devant être par ailleurs remplies.
4.Ainsi, les sociétés holding admises au bénéfice de l'exonération partielle sont celles qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations (cf. DB 7 S 3323 n° 16 et suivants ) :
- participent activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales ;
- et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers.
En revanche, les parts ou actions de sociétés holding passives, simples gestionnaires d'un portefeuille mobilier, ne bénéficient pas de l'exonération partielle.
Pour plus de précisions, il convient de se reporter à la DB 7 S 3323 n° 15 à 20 et à l'instruction administrative 7 S-8-05 n° 213 du 30 décembre 2005.
Section 2 :
Conditions d'application du régime
5.A titre liminaire, il convient de préciser que l'engagement collectif de conservation doit être pris en application des dispositions de l'article 787 B.
Cependant, il est admis que les titres compris dans un engagement collectif qui a été souscrit avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique, en application des dispositions de l'ancien article 789 A, bénéficient du régime d'exonération partielle prévu à l'article 787 B si l'ensemble des conditions précisées ci-après sont réunies.
Par ailleurs, il est précisé que l'engagement collectif pris en application de l'article 787 B peut valoir engagement collectif pour l'impôt de solidarité sur la fortune (régime d'exonération partielle prévu à l'article 885 I bis ) et inversement 6 .
I. CONDITIONS DEVANT ETRE RESPECTEES AU JOUR DE LA TRANSMISSION
A - Conclusion d'un engagement collectif de conservation
1. Les parts ou les actions de la société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale doivent faire l'objet d'un engagement collectif de conservation d'une durée minimale de deux ans en cours au jour de la transmission, qui a été pris par le défunt ou le donateur, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, avec d'autres associés
Cette condition appelle les précisions suivantes.
a. Personnes signataires de l'engagement
6.Compte tenu de la nature collective de l'engagement, celui-ci doit être souscrit, sans exigence d'un seuil individuel minimal de détention, par le défunt ou le donateur et au moins un autre associé de la société, que celui-ci soit une personne physique ou une personne morale.
Ainsi, l'engagement collectif peut être souscrit par une personne morale. Il est précisé que cette personne morale peut être une société interposée entre le donateur ou le défunt et la société dont les titres font l'objet de l'engagement collectif. En toute hypothèse, l'engagement doit être pris par une personne morale qui détient directement la participation dans la société dont les titres font l'objet de l'engagement de conservation.
Dans l'hypothèse d'un démembrement de propriété, l'engagement de conservation doit être souscrit conjointement par l'usufruitier et par le nu-propriétaire des titres. En cas de réunion de l'usufruit à la nue-propriété, le point de départ de l'engagement de conservation restera constitué, pour le titulaire de la pleine propriété ainsi reconstituée, par la date de souscription de l'engagement initial.
Lorsque les titres constituent des biens communs, c'est l'époux associé, ou l'un des deux époux s'ils ont tous les deux la qualité d'associé, qui a la capacité de signer l'engagement collectif de conservation. Il est précisé que l'époux non signataire, qu'il ait ou non la qualité d'associé, est réputé, pour l'application du dispositif de l'article 787 B, être signataire de l'engagement. Dès lors, en cas de décès de l'époux signataire, l'époux non signataire peut, sur les titres reçus à l'issue du partage de la communauté, poursuivre l'engagement collectif de conservation.
Dans l'hypothèse où les titres susceptibles de bénéficier du régime de faveur sont détenus par un enfant mineur dont les biens font l'objet d'une administration légale pure et simple (article 389-1 du code civil), chacun des deux parents peut souscrire seul l'engagement au nom de l'enfant mineur.
En effet, la conclusion d'un engagement collectif de conservation s'analyse sur un plan civil en un acte d'administration sauf circonstances d'espèce le disqualifiant (article 1 er du décret 2008-1484 du 22 décembre 2008).
Pour le même motif, en cas d'administration légale sous contrôle judiciaire des biens d'un enfant mineur (article 389-2 du code civil), le parent administrant le patrimoine du mineur a la capacité de signer pour le compte du mineur un engagement collectif de conservation, sans autorisation du juge des tutelles.
b. Caractère figé de l'engagement
7.L'engagement de conservation est nécessairement constaté par un acte (acte authentique ou sous seing privé). Lorsque l'acte est sous seing privé, il doit être enregistré dans les conditions prévues par l'article 658 pour être opposable à l'administration.
Les signataires d'un engagement collectif de conservation ne peuvent soumettre à cet engagement de nouvelles parts et actions, à l'exception de celles reçues dans le cadre d'une augmentation de capital résultant de l'incorporation de réserves dès lors que l'attribution d'actions est effectuée aux actionnaires au prorata de leurs droits dans le capital et que les attributaires les conservent pendant la durée restant à courir de l'engagement de conservation.
De même, il est admis que l'engagement n'est pas remis en cause en cas d'augmentation du nombre d'actions motivée par une diminution à due concurrence de la valeur nominale de chaque action. Bien entendu, dans cette hypothèse, l'engagement doit se poursuivre sur les titres reçus en contrepartie de la réalisation de cette opération.
8.Une fois que l'acte qui le constate a acquis date certaine, l'engagement collectif de conservation des titres est en principe figé.
Toutefois, l'article 12 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (n° 2011-900 du 29 juillet 2011) a aménagé le dispositif prévu à l'article 787 B. Ainsi, à compter du 31 juillet 2011, de nouveaux associés peuvent adhérer à un pacte déjà conclu à condition que l'engagement collectif soit reconduit pour une durée minimale de deux ans.
Par ailleurs, un ou plusieurs associés qui ont déjà souscrit un engagement peuvent signer avec d'autres associés un nouvel engagement collectif de conservation afin de permettre à ces derniers de bénéficier, le cas échéant, de l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit. Ainsi, un titre d'une société peut faire l'objet de plusieurs engagements, qu'ils soient simultanés ou successifs.
9.L'engagement de conservation porte sur un ensemble de titres que les associés ont entendu garder collectivement pendant au moins deux ans.
L'acte constatant la signature d'un engagement collectif de conservation entre les différents associés comporte ainsi le nombre de titres que ceux-ci ont entendu soumettre à l'engagement.
10.Les signataires de l'engagement collectif et leurs ayants cause à titre gratuit peuvent effectuer entre eux des transmissions de titres soumis à l'engagement.
11.Les titres acquis ou reçus par l'un des signataires de l'engagement auprès d'un autre signataire bénéficient de l'exonération partielle au jour de la transmission à titre gratuit.
En conséquence, dans l'hypothèse où le nombre de titres transmis par l'un des signataires est supérieur à celui des titres qu'il a soumis dès l'origine à l'engagement collectif, il appartient aux héritiers, donataires ou légataires de démontrer que le surplus de titres est compris depuis l'origine dans l'engagement collectif de conservation, et cela par tous modes de preuve compatibles avec la procédure écrite (actes d'acquisition, par exemple). En revanche, les titres acquis ou reçus auprès d'un associé qui n'a pas souscrit à l'engagement collectif de conservation ne peuvent pas bénéficier de cette mesure.
c. Durée de l'engagement
• Durée initiale de l'engagement
12.Le point de départ du délai minimal de deux ans s'apprécie à compter de la date d'enregistrement de l'acte qui constate l'engagement collectif de conservation, s'agissant d'un acte sous seing privé, ou de la date de l'acte, s'agissant d'un acte authentique. Cette durée s'apprécie de date à date.
13.Cet engagement collectif pris pour une durée minimale de deux ans doit être en cours au jour de la transmission.
• Modification ou prorogation de la durée de l'engagement
14.La durée initiale de l'engagement peut être modifiée par un avenant, sans pouvoir toutefois être ramenée à une durée inférieure à deux ans. De tels avenants doivent être enregistrés avant le terme de l'engagement initial dans les conditions prévues par l'article 658 pour être opposables à l'administration.
15.Ainsi, la durée de l'engagement peut être prorogée de façon expresse. Les associés de l'engagement peuvent également prévoir dès l'origine une prorogation tacite pour une durée déterminée de l'engagement collectif de conservation. Le terme de l'engagement pourra être constitué par la réalisation d'un événement.
16.En toute hypothèse, la dénonciation d'une prorogation devra être notifiée à l'administration pour lui être opposable. Cette notification peut être faite par tous moyens compatibles avec la procédure écrite. La dénonciation prend effet au jour où l'administration en a pris connaissance.
2. L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société, s'ils sont admis aux négociations sur un marché réglementé, ou, à défaut, sur au moins 34 % des parts sociales ou actions transmises
a. Notion de droits financiers et de droits de vote
17.La quotité de droits de vote et de droits financiers doit être appréciée par rapport à la masse des droits de vote dans les assemblées et des droits à dividendes attachés aux titres émis par la société en contrepartie de son capital social.
Il convient donc de se référer :
- au pourcentage des droits de vote détenus par les associés liés par un engagement collectif de conservation par rapport à l'ensemble des droits de vote susceptibles d'être représentés ;
- au pourcentage des droits détenus par les mêmes personnes dans l'ensemble des droits à dividendes attachés aux titres émis par la société.
Ainsi, pour la détermination du seuil, il y a lieu de prendre en considération les droits de vote attachés :
- aux actions ordinaires ;
- aux actions à droits de vote multiple ou privilégié ;
- aux certificats de droits de vote.
Pour la détermination du pourcentage des droits à dividendes, sont également à prendre en considération :
- les actions à dividende prioritaire sans droit de vote ;
- les certificats d'investissement.
Depuis l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004, les certificats d'investissement ne peuvent plus être crées. Ainsi, ils sont soit remplacés par les actions de préférence, soit destinés à être reconstitués en actions par réunion avec des certificats de vote.
18.A cet égard, il est précisé que l'ordonnance précitée, complétée par le décret n° 2005-112 du 10 février 2005 a créé les actions de préférence qui remplacent désormais les actions à dividende prioritaire sans droit de vote et les actions de priorité.
Les actions de préférence peuvent être prises en compte pour la détermination des seuils explicités ci-dessus.
Toutefois, les actions de préférence avec droit de vote participant à la détermination du pourcentage des droits de vote détenus par les membres de l'engagement collectif de conservation ne doivent pas voir leur droit suspendu au cours de l'engagement collectif de conservation, sous peine de voir l'exonération partielle remise en cause.
b. Calcul des seuils de 20 % et 34 %
19.Lorsque les titres de la société sont admis à la négociation sur un marché réglementé, le seuil minimum de 20 % concerne les droits de vote et les droits financiers soumis à l'engagement collectif de conservation.
La même règle s'applique pour les titres de sociétés admis aux négociations sur un marché réglementé étranger.
En revanche, pour les sociétés non cotées, le seuil de 34 % concerne les parts ou actions de la société exploitante dont les titres sont soumis à engagement. En conséquence, il est admis de ne pas exiger que le seuil de 34 % soit atteint à la fois pour les droits de vote et les droits financiers.
En tout état de cause, pour le calcul des seuils de 20 % et 34 %, il est tenu compte des titres, objets de l'engagement de conservation, détenus par l'ensemble des associés signataires de l'engagement.
Ainsi, pour le calcul des seuils de 20 % ou 34 %, il est tenu compte :
- des titres soumis à l'engagement appartenant au défunt ou donateur ;
- des titres détenus dans les mêmes conditions par les associés (personnes physiques ou morales) liés au défunt ou au donateur par l'engagement collectif en cours au jour de la transmission.
Pour le calcul des seuils, il est tenu compte des titres détenus par l'ensemble des associés membres de l'engagement collectif de conservation en cours au jour de la transmission, directement ou par l'intermédiaire d'une ou plusieurs sociétés interposées, dans la limite de deux niveaux d'interposition.
Il en va ainsi, quels que soient l'importance de la participation détenue dans la ou les sociétés interposées, la forme juridique de celle-ci et son objet social (société ayant une activité professionnelle propre, holding animatrice de ses filiales).
Il n'est pas exigé par ailleurs que les titres de la société interposée soient eux-mêmes soumis à un engagement collectif de conservation en cours au jour de la transmission.
La prise en compte de la participation directe de la ou des sociétés interposées dans la société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, est subordonnée à la condition que la première ait souscrit à l'engagement collectif de conservation en cours au jour de la transmission à titre gratuit sur les titres de la seconde.
En revanche, les titres détenus par l'intermédiaire d'une société interposée qui n'ont pas été soumis à l'engagement collectif de conservation ne peuvent pas être retenus pour l'appréciation des seuils. En conséquence, si l'actif de la société interposée comporte à la fois des titres soumis à engagement et des titres détenus sans engagement, une ventilation est nécessaire afin de retenir uniquement les titres soumis à engagement pour le calcul des pourcentages requis.
c. Durée du respect des seuils de 20 % et 34 %
20.Il est précisé que les seuils de 20 % et 34 % constituent un minimum légal requis pour la conclusion d'un engagement collectif. Ces seuils minima de 20 % et 34 % doivent être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de conservation.
21.A cet égard, il est précisé que la cession à des non-signataires de titres compris dans un engagement collectif conclu sur des seuils supérieurs aux seuils minima n'entraîne pas la remise en cause du régime de faveur pour l'ensemble des signataires autres que l'auteur de la cession, lorsque les seuils minima de 20 % et 34 % continuent d'être collectivement respectés.
22.Par ailleurs, il est admis, dès lors que les seuils minima de 20% ou 34 % demeurent collectivement respectés, que l'engagement collectif soit pris en compte pour des transmissions futures. Ainsi, en cas de cession, les associés signataires de l'engagement collectif ne sont pas tenus de souscrire un nouvel engagement collectif pour l'avenir dès lors que la condition relative aux seuils minima reste satisfaite.