Date de début de publication du BOI : 11/01/2010
Identifiant juridique :
Annotations :  Lié au Rescrit N°2010/53

B.O.I. N° 4 DU 11 JANVIER 2010


Section 2 :

Règles générales



  A. LIEU DES PRESTATIONS DE SERVICES FOURNIES A UN ASSUJETTI AGISSANT EN TANT QUE TEL



  I. En fonction du lieu d'établissement du preneur assujetti


  1. Règle de territorialité

21.Le lieu des prestations de services autres que celles désignées à l'article 259 A (1°, 2°, 4°, 5° et 8°) est situé en France lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel qui a en France :

- le siège de son activité économique ou un établissement stable pour lequel les services sont rendus ;

- ou à défaut de posséder un tel siège ou un tel établissement stable, son domicile ou sa résidence habituelle.

Inversement, le lieu des mêmes services n'est pas situé en France lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel qui remplit les mêmes conditions dans un autre Etat membre ou en dehors de la Communauté.

Comme indiqué au paragraphe 17 , une structure qui prend des services peut être considérée comme constitutive d'un établissement stable en fonction de sa capacité à utiliser les services qui lui sont rendus. Cette capacité doit être évaluée au cas par cas.

22.Pour la détermination du lieu d'une prestation de services lorsque le preneur dispose de plusieurs établissements, le siège de l'activité économique apparaît comme le point de rattachement prioritaire. Toutefois, lorsque la prestation est explicitement fournie à un établissement stable du preneur situé dans un autre Etat que celui de son siège, elle est imposable au lieu de cet établissement. A défaut de siège économique ou d'établissement stable, le domicile ou la résidence habituelle du preneur peuvent constituer un autre point de rattachement.

23.Pour déterminer le lieu d'imposition de la prestation de services, le prestataire doit obtenir les informations nécessaires auprès du preneur et assurer un niveau raisonnable de vérification de ces informations. Sous la responsabilité du preneur, il doit être ainsi en mesure d'apprécier :

- si le contrat et/ou bon de commande identifie l'établissement stable comme preneur de service ;

- si l'établissement stable est l'entité qui paie pour les prestations de services ou si le coût de ces prestations est effectivement pris en charge par cette entité ;

- si la nature de la prestation permet d'identifier l'établissement stable particulier ou les établissements stables auquel(s) le service est fourni.

24.Pour les besoins du contrôle, lorsque le numéro d'identification à la TVA du preneur mentionné sur la facture est attribué par un autre Etat membre, il est présumé que les services sont fournis dans cet Etat membre, sauf preuve contraire.

25. Précisions diverses :

- nonobstant la présomption reconnue ci-dessus, lorsque le preneur dispose d'un numéro d'identification dans un Etat membre où il ne dispose pas d'un établissement stable au sens du § 17, ce numéro ne saurait être utilisé pour la détermination du lieu de la prestation de services ;

- dans le cas de prestations fournies au titre d'un contrat global et destinées à être utilisées en plusieurs endroits, le preneur doit être entendu comme le client direct désigné comme tel au prestataire pour les besoins de la facturation 15 , sous réserve de l'abus de droit.

Exemple 4  : une entreprise dispose du siège de son activité économique en France et d'un établissement stable dans un autre Etat membre de la Communauté européenne. Un avocat français rend à l'établissement stable une prestation de conseil. Le lieu de cette prestation n'est pas situé en France.

Exemple 5  : une entreprise établie dans un autre Etat membre de la Communauté européenne rend une prestation d'entremise à l'établissement stable situé en France d'un preneur assujetti qui a établi le siège de son activité économique dans un autre Etat membre. Le lieu de cette prestation est situé en France.

  2. Services visés

26.Relèvent, entre autres, des dispositions de l'article 259-1° les services suivants :

- les prestations des intermédiaires agissant au nom et pour le compte d'un autre assujetti, lorsqu'elles ne se rattachent pas à un bien immeuble ;

- les prestations de transports de biens, qu'il s'agisse de transports internationaux, de transports intracommunautaires ou de transports nationaux de biens, ainsi que leurs prestations accessoires (telles que chargement, déchargement, manutention et activités similaires) ;

- les prestations d'expertises ou de travaux sur des biens meubles corporels ;

- les prestations de la nature de celles visées à l'article 259 B (cf. ci-après § 117 ) ;

- les prestations de stockage qui consistent dans la fourniture d'une prestation complexe comprenant par exemple diverses prestations de conservation ou de logistique. Lorsque la prestation s'analyse en une simple location d'espaces, voir § 54 et suivants  ;

- les locations de moyens de transport notamment en vertu d'un contrat de crédit-bail, dès lors qu'elles ne sont pas de courte durée au sens de l'article 259 A-1° 16 . Pour la définition des moyens de transport, voir § 41 à 43 .

Exemple 6 : une société établie dans un pays tiers à la Communauté européenne effectue dans ce pays une prestation de réparation sur un bien meuble pour le compte d'une société établie en France. Le lieu de cette prestation est en principe situé en France, notamment dans l'hypothèse où le bien demeure dans le pays dans lequel il a fait l'objet de la réparation. 17

Exemple 7 : une société française fait appel à un intermédiaire transparent établi dans un autre Etat membre de la Communauté européenne pour vendre, dans un pays tiers, des biens qui y ont été préalablement acquis. Le lieu de la prestation est situé en France, sans préjudice de l'exonération de l'article 263.

Exemple 8 : les prestations de services directement liées au placement d'un bien lors de son entrée en France ou dans un autre Etat membre sous l'un des régimes douaniers prévus par les règlements communautaires en vigueur 18 sont situées en France lorsque le preneur y est établi, sans préjudice de l'exonération de TVA du 2° du III de l'article 291 dont la portée a, par ailleurs, été étendue par l'article 102 de la loi de finances pour 2010.

Exemple 9  : une société A établie hors de France réalise une livraison après montage ou installation d'une machine-outil dans l'usine située en France de l'assujetti B. Un sous-traitant C établi hors de la Communauté fournit à A la prestation de montage. La livraison de biens après montage n'est pas une prestation de services mais une livraison de biens soumise à la TVA en France en application du b du I de l'article 258. Le fait que le prix demandé par A intègre le coût du montage est sans incidence sur la qualification de livraison de biens 19 . La prestation de montage fournie par C n'est pas soumise à la TVA en France dès lors que A n'est pas établi en France.

  3. Cas de certaines prestations de services utilisées ou exploitées hors de la Communauté

27.Les prestations de services désignées ci-après et fournies à des assujettis établis en France sont normalement soumises à la TVA en France. Toutefois, conformément à la possibilité offerte par le a) de l'article 59 bis de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, il est admis que ces prestations de services ne sont pas soumises à la TVA en France lorsqu'elles sont effectivement utilisées ou exploitées hors de la Communauté européenne, cette caractérisation résultant du fait qu'elles sont matériellement exécutées hors de la Communauté.

Sont limitativement visés dans de telles conditions :

- les transports de marchandises et les commissions afférentes à ces transports ;

- les prestations de convoyage de moyens de transport pour les besoins de transport de marchandises ;

- les locations de véhicules et de matériels pour les besoins de transports de marchandises ;

- le gardiennage, le magasinage, la manutention, le chargement et le déchargement des marchandises.

A titre de règle pratique, les critères suivants pourront être retenus :

- la distance parcourue hors de la Communauté européenne, s'agissant des transports de marchandises et des prestations de convoyage de moyens de transport ;

- de même, la distance parcourue hors de la Communauté européenne, s'agissant des locations de véhicules et de matériels, ainsi que des commissions afférentes aux transports ;

- le lieu de leur exécution matérielle, s'agissant de gardiennage, de magasinage, de manutention, ou de chargement et de déchargement.

En sorte d'éviter les contraintes de double imposition, il est également admis que bénéficient du même traitement les prestations de réparation, de transformation, d'adaptation, de façon ou d'ouvraison portant sur les biens qui sont soumis à la TVA lors de leur importation ou de leur réimportation soit en application du premier alinéa de l'article 292, soit en application de l'article 293.


  II. Notion d'assujetti agissant en tant que tel


28.Pour la détermination du lieu des prestations de services, un assujetti au sens des articles 256 A et 259-0 (Cf. paragraphe 9 ) est réputé agir comme un non assujetti lorsqu'il acquiert des services pour ses besoins privés ou ceux de son personnel (CJCE, Aff. C-415/98 du 8 mars 2004, « Baksci »). Le lieu de ces prestations est alors situé à l'endroit où le prestataire est établi conformément à l'article 259-2° (cf. paragraphes 33 et s. ), à moins que, selon la nature du service, ce lieu soit déterminé en fonction des règles dérogatoires (cf. § 40 et suivants et §102 et suivants).

Exemple 10  : M. X, commerçant, acquiert des prestations informatiques pour la création d'un site internet destiné à présenter son activité et commercialiser ses produits à distance. Dans cette situation, M. X agit bien en qualité d'assujetti (le service relèvera alors de l'article 259-1°). A l'inverse, cela ne sera pas le cas, s'il demande à ce même prestataire de lui créer un site personnel à usage familial (le service relèvera alors de l'article 259-2°).

29. Précision  : si toutes les activités non économiques sont placées hors du champ d'application de la TVA, toutes ne peuvent pas être considérées comme étant réalisées à des fins étrangères à l'entreprise au sens de l'article 26, paragraphe 1, sous a) de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 (CJCE, Aff. C-515/07 du 12 février 2009, « VNLTO »).

Exemple 11   : un holding mixte qui gère un portefeuille de participations (activité hors du champ d'application de la TVA) et qui rend des services de gestion à certaines de ses filiales (activité dans le champ d'application de la TVA), n'exerce pas la première activité à des fins étrangères à l'entreprise, bien que ce ne soit pas une activité économique au sens de l'article 256 A. Pour la territorialité des prestations de services, ce holding mixte qui est assujetti partiel est caractérisé, d'une part, comme un assujetti et, d'autre part, comme un « assujetti agissant en tant que tel », y compris pour les services acquis pour les besoins de son activité de gestion de portefeuille. Aux fins d'une application correcte des règles de territorialité, il incombe au prestataire de s'assurer de la position du preneur.

30.Dans ce cadre, la communication par le preneur à son prestataire de son numéro d'identification à la TVA en cours de validité à la date de l'opération, la mention de ce numéro sur la facture ainsi qu'une référence à l'article 44 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 faisant apparaître que le preneur a déclaré utiliser le service aux fins de son entreprise constitue une présomption simple que le preneur agit bien en tant qu'assujetti permettant de ne pas engager la responsabilité du prestataire s'agissant du lieu des prestations de services. Toutefois, cette présomption simple ne dispense pas le prestataire de son obligation de vigilance et notamment de vérifier la validité du numéro d'identification de son preneur.

Précision  : Pour les preneurs assujettis non établis dans la Communauté visés au § 12 , la mention sur la facture d'une référence à l'article 44 de la directive 2006/112/CE confère une présomption simple que le preneur a la qualité d'un assujetti agissant en tant que tel. Pour les services qui ne sont pas de ceux qui sont communément utilisés dans le cadre de l'activité exercée par le preneur, il est recommandé au prestataire de réunir tous autres éléments attestant que son preneur agit bien en tant qu'assujetti.

31.Lorsqu'une prestation de services est destinée en partie à des besoins privés et en partie à des besoins professionnels d'un preneur assujetti, y compris des activités ou opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la TVA (cf. § 29 ), la qualité d'assujetti du preneur n'est pas remise en cause et le lieu de la prestation doit être déterminé, pour la totalité de la prestation sans possibilité de la scinder, selon les règles applicables aux preneurs assujettis.

32.Les circonstances d'utilisation du service intervenant dans la détermination de son lieu d'imposition sont à prendre en considération uniquement au moment où le service est fourni. Sauf abus de droit, le lieu d'imposition du service ne sera pas remis en cause par la modification ultérieure de l'utilisation qui en sera faite.


  B. LIEU DES PRESTATIONS DE SERVICES FOURNIES A UNE PERSONNE NON ASSUJETTIE


33.En ce qui concerne les prestations de services fournies à des personnes non assujetties, le lieu des prestations de services autres que celles désignées aux articles 259 A, est dans tous les cas réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, a son domicile ou sa résidence habituelle, sous réserve, le cas échéant, des dispositions des articles 259 B, 259 C et 259 D.

34.Pour la détermination du lieu d'une prestation de services, le siège de l'activité économique apparaît comme un point de rattachement prioritaire sauf si le service est fourni par un établissement stable du prestataire. Dans cette hypothèse, il convient de rattacher la prestation au lieu d'établissement stable (CJCE, Aff. C-168/84 du 4 juillet 1985, « Berkholz »). A défaut de siège économique ou que le service soit rendu par un établissement stable établi hors de France, le domicile ou la résidence habituelle du prestataire peuvent constituer un autre point de rattachement.

35.  Les services visés par ces dispositions peuvent être, par exemple :

- des prestations destinées à la consommation des particuliers (services rendus à la personne tels que la coiffure, les soins corporels…) ;

- des prestations de services listées à l'article 259 B ;

- des prestations d'exécution testamentaire 20 .

36.Précisions :

- les locations de moyens de transport autres que de courte durée au sens de l'article 259 A 1° relèvent en principe des dispositions de l'article 259-2° et sont donc taxables en France lorsque le prestataire y a son siège économique ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu, ou à défaut que les services soient rendus par un établissement stable hors de France, y a son domicile ou sa résidence habituelle 21 . Toutefois, lorsque le service est utilisé en France, cf. §

Pour information : ces dispositions sont applicables jusqu'au 31 décembre 2012. A compter du 1 er  janvier 2013, les locations de moyens de transport autres que de courte durée au sens de l'article 259 A-1° à une personne non assujettie seront taxables en France lorsque cette personne y sera établie, ou y aura son domicile ou sa résidence habituelle. Toutefois, les locations de bateaux de plaisance, autres que de courte durée à des personnes non assujetties, demeureront taxables en France lorsque ces bateaux y seront effectivement mis à la disposition de ces personnes et que le prestataire rendra effectivement le service à partir de son siège économique ou d'un établissement stable situé en France.

Ces modifications feront l'objet de commentaires ultérieurement :

- pour les services fournis par voie électronique, cf. § 148 et suivants  ;

- pour certains services immatériels fournis à des personnes non assujetties établies hors de la Communauté, cf. § 117 et suivants.

37. Cas de certaines prestations de services utilisées ou exploitées hors de la Communauté .

Les prestations de services relevant de l'article 259-2° et fournies à des collectivités publiques établies hors de la Communauté européenne sont normalement soumises à la TVA en France lorsqu'elles n'ont pas la qualité d'assujetti 22 . Toutefois, sur le fondement du a) de l'article 59 bis de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, il y a lieu de considérer comme étant situées hors de la Communauté européenne et non soumises à la TVA en France les prestations de services rendues depuis la France à ces collectivités publiques, dès lors qu'en règle générale l'utilisation de ces services s'effectue sur le territoire de ces collectivités.