B.O.I. N° 58 du 30 MAI 2008
Section 2 :
Les limites et conditions d'exonération
59.L'exonération de la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires ainsi définies est plafonnée à certains montants et soumise au respect de certaines conditions.
A. LES MONTANTS PRIS EN COMPTE ET LE PLAFONNEMENT DES MAJORATIONS
60.Le II de l'article 81 quater du CGI précise les montants pris en compte pour l'exonération, d'une part, pour les salariés de droit privé et, d'autre part, pour les agents publics. Pour ces derniers, les éléments de rémunération mentionnés au 5° du I de l'article 81 quater précité sont exonérés « dans la limite des dispositions applicables aux agents concernés », lesquelles sont mentionnées par le décret du 4 octobre 2007 précité.
I. Les salariés à temps plein
1. Le cas général
61.C'est l'intégralité de la rémunération des heures supplémentaires, c'est-à-dire la rémunération de base et ses compléments de rémunération, ainsi que la majoration de salaire versée au titre des heures supplémentaires, qui est exonérée.
62.Les compléments et accessoires de salaire calculés sur le salaire mensuel brut, majorations pour heures supplémentaires comprises, qui constituent directement une contrepartie du travail accompli pendant les heures supplémentaires et assimilés à un salaire ainsi que les primes liées au rendement individuel ou collectif sont exonérés d'impôt sur le revenu.
63.En tout état de cause, la mesure n'est pas applicable aux repos compensateurs de remplacement donnés en lieu et place de la rémunération des heures supplémentaires, de même qu'aux jours de repos placés sur un compte épargne temps (CET) et pris, ou liquidés sous forme monétaire, postérieurement.
64.Toutefois, lorsque les heures supplémentaires sont pour une part payées et pour l'autre part compensées par du repos compensateur de remplacement, le paiement direct de ces heures, et lui seul, est exonéré d'impôt sur le revenu.
65.En application des dispositions de l'article L. 3121-22 du code du travail et en l'absence de dispositions conventionnelles fixant un autre taux, lequel ne peut être inférieur à 10 %, les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour les huit premières heures (de la 36 ème à la 43 ème heure) et de 50 % au-delà.
66.La majoration de salaire au titre de l'heure supplémentaire est exonérée dans la limite des taux fixés par voie de convention collective ou d'accord professionnel ou interprofessionnel applicable. A défaut d'une telle convention collective ou d'un tel accord, en particulier lorsque les taux sont fixés par simple accord de groupe, d'entreprise ou d'établissement, la majoration est prise en compte dans la limite de :
- 25 % pour les huit premières heures ;
- 50 % pour les heures suivantes.
67.Cela étant, lorsque le taux de majoration prévu par la convention collective ou l'accord professionnel ou interprofessionnel est inférieur au taux fixé par l'accord de groupe, d'entreprise ou d'établissement ou par décision unilatérale de l'employeur, c'est ce dernier taux qui est pris en compte pour le calcul de l'exonération, dans la limite toutefois des taux de majoration de droit commun de 25 % et 50 % précités.
2. Les cadres au forfait
68.Pour les salariés relevant d'une convention de forfait établie en heures sur une base annuelle, la majoration de salaire au titre des heures supplémentaires exonérées est prise en compte dans la limite de 25 % de la rémunération horaire déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre d'heures de travail prévu dans le forfait, les heures incluses dans le forfait mais majorées étant pondérées en fonction des taux de majoration appliqués à leur rémunération.
Ainsi, un salarié est soumis à une convention de forfait en heures sur une base annuelle de 1 650 heures prévoyant une rémunération forfaitaire fixée à 50 000 €, les heures supplémentaires étant majorées de 30 %. Les 43 heures supplémentaires au-delà de 1607 heures sont exonérées dans la limite de :
43 x 1,25 x (50 000 / [1607 + (43 x 1,30)]) = 1616,15 €
69.Pour les salariés relevant d'une convention de forfait annuel en jours, l'exonération s'applique au salaire versé au titre des jours de travail supplémentaires effectués au-delà de 218 jours et ce, par jour de travail, dans la limite de la rémunération journalière déterminée à partir du rapport entre la rémunération forfaitaire annuelle et le nombre de jours de travail prévu dans le forfait, majoré de 25 %.
Ainsi, un salarié, soumis à une convention de forfait en jours sur une base annuelle de 210 jours prévoyant une rémunération forfaitaire fixée à 50 000 €, effectue 220 jours de travail. La rémunération des deux jours supplémentaires de travail effectués au-delà de 218 jours est exonérée dans la limite de :
2 x [(50 000 / 210) x 1,25] = 595,24 €
II. Les salariés à temps partiel
70.En application de l'article L. 3123-19 du code du travail, les heures complémentaires effectuées au-delà du dixième et dans la limite du tiers de la durée contractuelle donnent lieu à une majoration de salaire de 25 %.
71.Pour autant, l'exonération des heures complémentaires s'applique à la rémunération ainsi qu'à la majoration même si celle-ci est versée au titre d'heures complémentaires réalisées dans la limite du dixième de la durée contractuelle. La majoration est retenue dans la limite des taux fixés par voie de convention collective ou d'accord professionnel ou interprofessionnel applicable et, à défaut, dans la limite d'un taux de 25 %.
III. Dans les entreprises d'au plus 20 salariés
72.Le I de l'article 4 de la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise 24 avait prévu, dans les entreprises d'au plus vingt salariés au 31 mars 2005, des dispositions dérogatoires au regard tant du taux de majoration des heures supplémentaires (10 %, au lieu de 25 %, pour les quatre premières heures, en l'absence d'accord collectif) que de leur prise en compte dans le contingent d'heures supplémentaires (décompte uniquement à partir de la 37 ème heure). Ces dispositions devaient prendre fin le 31 décembre 2008.
73.Le IX de l'article 1 er de la « loi TEPA » met fin de façon anticipée, soit à compter du 1 er octobre 2007, à ces dispositions dérogatoires.
Par suite, les rémunérations des heures supplémentaires réalisées dans les entreprises d'au plus 20 salariés sont exonérées dans les limites de droit commun précitées (cf. n° 66 et 67 ).
B. LE RESPECT DE LA RÉGLEMENTATION DE LA DURÉE DU TRAVAIL
74.Le premier alinéa du III de l'article 81 quater du CGI conditionne le bénéfice de l'exonération d'impôt sur le revenu au respect par l'employeur des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail.
Cette mesure a pour objectif d'éviter le recours abusif aux heures supplémentaires. En effet, un salarié est tenu d'accomplir les heures supplémentaires et assimilées légalement décidées par l'employeur (notamment, respect des durées maximales du travail, information de l'inspection du travail) dans la limite du contingent légal ou conventionnel applicable.
75.Ainsi, l'exonération n'est pas applicable notamment :
- aux heures supplémentaires effectuées au-delà des limites maximales quotidiennes ou hebdomadaires fixées par la loi ou les conventions ou accords collectifs ;
- aux heures supplémentaires effectuées illégalement, notamment le dimanche ou de nuit sans autorisation préalable ;
- en cas de non-respect par l'employeur de ses obligations déclaratives relatives à la durée du travail.
76.Les heures supplémentaires réalisées illégalement n'ouvrent pas droit à exonération pour les seuls salariés concernés 25 . En revanche, pour ces salariés, la rémunération relative aux heures supplémentaires légalement accomplies, par exemple celles effectuées dans les limites maximales légales ou conventionnelles, bénéficie de l'exonération.
C. LES DISPOSITIONS VISANT À PRÉVENIR LES ABUS
77.Trois dispositions sont prévues afin de prévenir les abus.
I. Non-substitution à des éléments de salaire
78.La mesure n'est pas applicable lorsque la rémunération, versée au titre des heures supplémentaires ou complémentaires ainsi que des jours auxquels le salarié aura renoncé, se substitue à d'autres éléments de rémunération, à moins qu'un délai de douze mois ne se soit écoulé entre le dernier versement de l'élément de rémunération en tout ou partie supprimé et le premier versement de la rémunération des heures supplémentaires éligibles au dispositif d'exonération.
79.L'objectif poursuivi par ces dispositions, prévues au premier alinéa du III de l'article 81 quater du CGI, est d'éviter la suppression d'un élément de rémunération existant (prime de résultat, par exemple) au bénéfice de l'accomplissement d'heures supplémentaires ou complémentaires exonérées.
80.Ce principe de non-substitution s'applique ainsi dans les mêmes conditions que celles prévues en matière d'épargne salariale 26 .
81.Si la substitution à une prime préexistante d'un premier versement de la rémunération des heures supplémentaires exonérées au titre du mois d'octobre 2007 est établie, cette rémunération ne sera pas exonérée d'impôt sur le revenu à due concurrence.
II. Abaissement des durées hebdomadaires de travail
82.L'exonération d'impôt sur le revenu n'est pas applicable à la rémunération d'heures qui n'auraient pas été des heures supplémentaires sans abaissement, après le 20 juin 2007, soit de la limite haute de modulation dans les entreprises ayant opté pour la modulation du temps de travail, soit du plafond hebdomadaire pour l'octroi de « jours RTT ».
L'objectif est d'éviter une réduction artificielle du temps de travail dans l'entreprise compensée par un volume d'heures supplémentaires ayant pour effet de maintenir l'horaire antérieur.
83.Ces dispositions, qui visent à prévenir des abus, n'interdisent pas aux entreprises qui le souhaitent de procéder, pour des raisons propres à leur organisation interne, à un abaissement des durées hebdomadaires de travail prévues dans les accords concernés de modulation ( " limite haute " ) ou de réduction du temps de travail par l'attribution sur l'année de jours de repos ( " plafond " ).
84.Toutefois, la rémunération des heures supplémentaires ainsi effectuées entre la durée hebdomadaire résultant de cet abaissement (qui, par hypothèse, intervient après le 20 juin 2007) et la durée hebdomadaire prévue antérieurement à celui-ci, ne bénéficiera pas de l'exonération d'impôt sur le revenu.
Exemple : par avenant, postérieur au 20 juin 2007, à un accord d'entreprise de modulation du temps de travail, la limite hebdomadaire supérieure de 44 heures est réduite à 41 heures. Les 42 ème , 43 ème et 44 ème heures de travail ne seront pas éligibles à l'exonération, dès lors qu'elles ont été effectuées en deçà de la limite haute antérieure.
En revanche, lorsqu'un accord à durée déterminée arrive à expiration ou lorsqu'un accord à durée indéterminée est dénoncé après le 20 juin 2007, et que le nouvel accord conclu fixe une limite haute de modulation inférieure à celle qui était prévue dans le précédent accord, les heures supplémentaires effectuées au-delà de la nouvelle limite haute sont éligibles à l'exonération d'impôt sur le revenu.
III. Cas particulier des heures complémentaires effectuées de manière régulière
85.En application de l'article L. 3123-15 du code du travail, lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives ou pendant douze semaines au cours d'une période de quinze semaines, l'horaire moyen réellement effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou l'équivalent mensuel de cette durée, l'horaire prévu dans son contrat de travail, cet horaire doit être modifié, sous réserve d'un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié.
86.En cohérence avec ces dispositions, le III de l'article 81 quater du CGI prévoit que l'exonération d'impôt sur le revenu n'est pas applicable aux heures complémentaires accomplies de manière régulière au sens de l'article L. 3123-15 précité, sauf si elles ont été entièrement intégrées à l'horaire contractuel de travail pendant une durée minimale.
Cette durée minimale est fixée, par l'article 38 septdecies 27 de l'annexe III au CGI, à six mois, réduite, le cas échéant, à la durée restant à courir du contrat de travail si celle-ci est inférieure.
87. Exemple n° 1 : l'horaire contractuel d'un salarié en CDI est de 110 heures par mois. L'horaire effectif au cours des mois de janvier, février et mars 2008 est de 120 heures. En avril 2008, un avenant au contrat de travail est signé, portant l'horaire contractuel de travail à 120 heures.
Les conditions de l'article 38 septdecies de l'annexe III au CGI étant ainsi respectées, la rémunération des heures complémentaires effectuées au cours des douze dernières semaines précédant la modification du contrat de travail est exonérée. A compter du 1 er avril 2008, ces mêmes heures ayant été intégrées à l'horaire contractuel de travail, elles ne sont plus des heures complémentaires ; dès lors, elles n'ouvrent plus droit à l'exonération d'impôt sur le revenu.
Exemple n° 2 : le cas de figure est le même que dans l'exemple n° 1, mais le contrat de travail n'est pas modifié. Dans ces conditions, les heures complémentaires effectuées en janvier, février et mars 2008 ne sont pas exonérées.
Exemple n° 3 : le cas de figure est le même que dans l'exemple n° 1. En avril 2008, un avenant au contrat de travail est signé, qui porte l'horaire contractuel de travail à 120 heures. Mais, en juillet 2008, un nouvel avenant est signé, qui ramène l'horaire contractuel à 110 heures.
La « consolidation » contractuelle des heures complémentaires effectuées de manière régulière pour une durée minimale de six mois, prévue par l'article 38 septdecies de l'annexe III au CGI, n'a pas été respectée. En conséquence, les heures complémentaires effectuées en janvier, février et mars 2008 ne sont pas exonérées.