Date de début de publication du BOI : 11/01/2010
Identifiant juridique :
Annotations :  Lié au Rescrit N°2010/53

B.O.I. N° 4 DU 11 JANVIER 2010


Section 3 :

Dérogations aux règles générales


38.Aux fins de garantir que les prestations sont imposées au plus près de leur lieu de consommation, d'autres critères que ceux résultant des règles générales exposées à la section 2 sont utilisés pour déterminer le lieu d'imposition de certains services.

39.Ces dérogations concernent, d'une part, certains des services de l'article 259 A fournis indistinctement à des assujettis ou des personnes non assujetties, et d'autre part, certains services des articles 259 A, 259 B, 259 C, 259 D fournis aux seules personnes non assujetties.


  A. DEROGATIONS A LA REGLE GENERALE REGISSANT LE LIEU DES PRESTATIONS DE SERVICES FOURNIES TANT A DES ASSUJETTIS QU'A DES PERSONNES NON ASSUJETTIES


40.Par dérogation à la règle générale posée à l'article 259, la détermination du lieu d'imposition des services suivants s'effectue en fonction d'autres critères que celui de la qualité du preneur :

- les locations de moyens de transport de courte durée (259 A-1°) ;

- les services se rattachant à un immeuble (259 A-2°) ;

- les prestations de transport de passagers (259 A-4°) ;

- les prestations culturelles, artistiques, sportives, scientifiques, éducatives, de divertissement ou similaires, leurs prestations accessoires ainsi que leur organisation (259 A-5°-a) ;

- les ventes à consommer sur place (259 A-5°-b et c) ;

- les prestations des agences de voyages (259 A-8°).


  I. Les locations de moyen de transport (art. 259 A-1°)


  1. Définition du moyen de transport

41.Aux fins des articles 259 A-1° et 259 B, les véhicules motorisés ou non et les autres dispositifs ou équipements conçus dans le but de transporter des personnes ou des objets d'un endroit à un autre, pouvant être tirés, tractés ou poussés par des véhicules et normalement conçus et utilisés pour le transport, doivent être considérés comme des moyens de transport. Il en est de même des remorques, semi-remorques et des wagons de chemin de fer.

42.Les dispositifs suivants constituent notamment des moyens de transport dans la mesure où ils sont normalement conçus et effectivement capables d'être utilisés pour transporter des biens ou des personnes :

- les véhicules terrestres motorisés ou non, comme les automobiles, les motocyclettes, les bicyclettes, les tricycles et les caravanes, à moins qu'elles soient fixées au sol ;

- les bateaux et les aéronefs motorisés ou non ;

- les véhicules spécialement conçus pour le transport de personnes malades ou blessées ;

- les tracteurs agricoles et les autres véhicules agricoles ;

- les véhicules militaires, autres que ceux destinés au combat, et les véhicules de surveillance ou de défense passive ;

- les véhicules à propulsion mécanique pour personnes handicapées.

43. Attention   : les conteneurs ne constituent pas des moyens de transport. Par conséquent, la location de conteneurs est couverte par les dispositions générales de l'article 259 dans sa rédaction en vigueur au 1er janvier 2010, et le cas échéant, par les dispositions de l'article 259 B ou de l'article 259 C.

44.Cette définition aux fins de la territorialité des prestations de services demeure sans incidence sur la définition des moyens de transport neufs ou d'occasion aux fins du régime prévu à l'article 298 sexies.

  2. Locations imposables

45.Le lieu d'une location de courte durée d'un moyen de transport est situé en France lorsque le moyen de transport est effectivement mis à la disposition du preneur en France 23 .

46.Un moyen de transport est considéré comme « effectivement mis à la disposition du preneur » à l'endroit où ce moyen de transport se trouve au moment où le preneur en prend effectivement et physiquement possession. La simple prise de possession juridique du moyen de transport (signature du contrat, remise des clés) ne suffit pas à caractériser la mise à disposition du preneur.

47.Une location d'un moyen de transport est dite de courte durée lorsque la possession ou l'utilisation continue de ce moyen de transport couvre une période ne dépassant pas trente jours. Dans le cas d'un moyen de transport maritime, la période de location ne doit pas dépasser quatre-vingt dix jours.

48.L'évaluation de la durée de la possession ou de l'utilisation continue d'un moyen de transport est, en principe, réalisée selon la durée réelle de cette possession ou de cette utilisation continue et doit, en tout état de cause, s'apprécier au cas par cas.

49.Toutefois, il est admis que la durée de la location puisse être déterminée sur la base de l'analyse des dispositions du contrat signé entre les parties. Néanmoins, la durée contractuelle de possession ou d'utilisation continue ne constitue qu'une présomption simple qui pourra être réfutée par tous moyens de fait ou de droit permettant d'établir la durée réelle de cette possession ou utilisation continue.

50.Ainsi, en cas de contrats de location successifs entre les mêmes parties portant sur un même moyen de transport, la durée du premier contrat sera prise en compte pour évaluer si le deuxième contrat est de courte durée ou non. Sont considérés comme successifs, les contrats qui se succèdent avec une interruption de 48 heures au plus. La durée de chaque contrat ultérieur est évaluée dans les mêmes conditions en tenant compte de la durée des contrats précédents portant sur le même moyen de transport. A cet égard, le fait qu'un contrat de courte durée ait une clause de reconduction tacite n'est pas suffisant en soi pour considérer que la location n'est pas de courte durée.

51.Par contre, la durée des contrats de location de courte durée qui précèdent le contrat qui est qualifié de longue durée, compte tenu des contrats précédents, ne sera pas remise en cause rétroactivement, sous réserve de l'abus de droit.

52.De même, lorsqu'un contrat de courte durée fait l'objet d'une prolongation due à des raisons échappant au contrôle des parties signataires (comme par exemple, le cas de force majeure tel que l'état de catastrophe naturelle interdisant tout déplacement) conduisant à dépasser la durée de 30 ou 90 jours, cela n'est pas suffisant pour requalifier la location comme étant de la longue durée.

53.Enfin, si des contrats de location se succèdent entre les mêmes parties contractantes mais portent sur des moyens de transport différents 24 , chaque contrat est examiné séparément afin de déterminer s'il est ou non de courte durée sous réserve de l'abus de droit.

Exemple 12   : une entreprise établie dans un autre Etat membre de la Communauté européenne que la France donne en location pour deux semaines un véhicule automobile à Monsieur Y domicilié en France qui souhaite visiter cet autre Etat membre. Le contrat prévoit que le véhicule est mis à disposition du client dans cet autre Etat membre, mais la remise matérielle du véhicule se fait en France et le véhicule doit être rendu au terme du contrat dans une succursale de l'entreprise également située dans cet autre Etat membre. La location du véhicule est réputée se situer en France.

Exemple 13  : lors de son séjour dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, M. Y prend en location pour une journée un hélicoptère auprès d'une société établie dans cet autre Etat membre. L'hélicoptère y est également mis à sa disposition. Le lieu de la prestation de location n'est pas en France.

Exemple 14  : la société X, assujettie établie en France, prend en location un camion auprès d'une société établie dans un Etat membre A de la Communauté européenne autre que la France pour une durée de 31 jours consécutifs. Le camion est mis à disposition dans un autre Etat membre B. Cette location est taxable en France sur le fondement de l'article 259-1° (principe général), dès lors que la location n'est pas de courte durée.

Exemple 15  : la société Z, assujettie établie en France, prend en location un navire de commerce auprès d'un armateur établi dans un autre Etat membre de la Communauté européenne que la France pour une durée de 91 jours. Le navire est mis à sa disposition en France à partir du 1 er mai. Or la société Z ne récupère le navire que le 3 mai pour des raisons qui lui sont propres et l'utilise effectivement pendant 89 jours. Dès lors qu'aux termes du contrat, la société Z avait la jouissance du navire pendant une période consécutive de 91 jours, il ne s'agit pas d'une location de courte durée. Le lieu de l'opération relève donc des dispositions de l'article 259.

Exemple 16  : M et Mme X louent un camping-car auprès d'une société établie dans un autre Etat membre que la France. La location est consentie pour 30 jours (du 1 er au 30 septembre) et le véhicule est mis à leur disposition en France. Toutefois, M et Mme X rendent le véhicule le 2 octobre à la suite d'une tempête intervenue le 29 septembre rendant toute circulation impossible. Bien que la possession réelle du véhicule soit supérieure à 30 jours, le caractère de location de courte durée n'est pas remis en cause dès lors que la non restitution du véhicule n'est pas liée à la volonté du preneur (cas de force majeure).


  II. Les services se rattachant à un bien immeuble (art. 259 A-2°)


54.Les prestations de services se rattachant à un bien immeuble, y compris les prestations d'experts et d'agents immobiliers, la fourniture de logements dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire tels que des camps de vacances ou des sites aménagés pour camper, l'octroi de droits d'utilisation d'un bien immeuble et les prestations tendant à préparer ou à coordonner l'exécution de travaux immobiliers, telles que celles fournies par les architectes et les entreprises qui surveillent l'exécution des travaux, sont taxables en France lorsque le bien immeuble y est situé.

55.Définition : outre les terrains, entendus comme portion déterminée de la surface terrestre, constituent des « biens immeubles », les constructions incorporées au sol, y compris leurs accessoires 25 , lorsqu'elles ne sont pas aisément démontables et déplaçables. Ainsi, un bien qui n'est pas indissociablement incorporé au sol peut présenter un caractère immobilier 26 .

  1. Services expressément visés à l'article 259 A-2° comme devant être taxés au lieu de l'immeuble .

56.Il s'agit :

- Prestations d'experts et d'agents immobiliers : notamment services d'évaluation de biens immobiliers, prestations d'intermédiation à l'achat, à la vente ou à la location de biens immobiliers des agents immobiliers, prestations de bornage ;

- Fourniture de logements dans le secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire ;

- L'octroi de droits d'utilisation d'un bien immeuble : sont notamment visés sous cette dénomination les locations autres que dans le secteur hôtelier (à usage d'habitation meublé, à usage industriel, commercial 27 ou agricole), droits d'accès aux voies de communication et ouvrages d'art (péages), les cessions ou concessions de droits de chasse ou de pêche sur une partie déterminée d'un territoire, les prestations de garde-meubles 28 .

- Prestations tendant à préparer ou à coordonner l'exécution de travaux immobiliers : sont rattachées à l'immeuble sur ce fondement les prestations des architectes qu'elles consistent dans la conception des projets immobiliers dès la phase de dialogue compétitif ou dans leur mise en œuvre une fois leur projet sélectionné, y compris celles qui sont directement consécutives à la construction, les prestations des géomètres, bureaux d'études relatives à des projets immobiliers.

  2. Autres services se rattachant à l'immeuble .

57.Outre les services expressément visés à l'article 259 A 2° comme se rattachant à un immeuble, relèvent de cette catégorie les services présentant un lien suffisamment étroit avec un immeuble.

58.Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, doivent être regardés comme entretenant un lien suffisamment étroit avec l'immeuble les services dont l'immeuble constitue un élément central et indispensable de la prestation 29 .

59.A cet égard, les services ayant pour objet de modifier physiquement ou juridiquement un bien immeuble présentent un lien suffisamment étroit avec l'immeuble sur lequel ils portent.

60.Constituent des prestations modifiant physiquement un immeuble, notamment, les travaux immobiliers de construction, de démolition, de réparation, de rénovation, d'amélioration, transformation, d'aménagement portant sur un immeuble bâti ou non bâti (aménagements de jardins, terrassements de terrains).

61.  Constituent notamment des prestations modifiant juridiquement un immeuble, l'établissement des actes et conventions par lesquels des droits réels ou personnels sont consentis sur un immeuble (rédaction des actes translatifs de propriété, rédaction de baux) 30 . Lorsque la transaction n'est pas menée à son terme, ces prestations relèvent néanmoins des dispositions de l'article 259 A 2°.

62.En revanche, ne peuvent être considérés comme modifiant juridiquement l'immeuble et relèvent par conséquent du principe général 31 , les prestations de conseil juridique antérieures à l'établissement d'un contrat de vente d'un bien immeuble (tendant, par exemple, à déterminer le régime fiscal applicable à l'opération envisagée ou à évaluer les conditions dans lesquelles le transfert du bien immeuble pourra se réaliser).

Exemple 17  : une prestation de conseil pour la mise en place d'un schéma de défiscalisation ayant pour objet l'acquisition d'un bien immobilier n'est pas imposable au lieu de situation de l'immeuble dont l'acquisition est projetée.

63.Il en est de même des services juridiques de conseil lorsque leur finalité immédiate n'est pas la modification juridique de l'immeuble mais concerne un différend au sujet d'un contrat portant sur un immeuble (par exemple : litige sur l'existence même d'un contrat ou sur l'exécution de ce contrat).

64.Les opérations portant sur les parts de sociétés immobilières non transparentes (ie. dont la détention n'assure ni en droit ni en fait l'attribution en propriété ou en jouissance d'un bien immeuble ou d'une fraction d'un bien immeuble) ne relèvent pas des dispositions du 2° de l'article 259 A.

65.Outre ces services, et à titre purement indicatif, constituent des prestations entretenant un lien suffisamment étroit avec l'immeuble, les services suivants dont la liste n'est pas exhaustive :

- les prestations de nettoyage d'immeuble ;

- les prestations de gardiennage/surveillance de l'immeuble ;

- les travaux de réparation et les prestations d'entretien de l'immeuble ;

- les prestations des experts relatives à l'évaluation des dommages et des indemnités destinées à réparer les dommages causés à l'immeuble.

66.Lorsqu'un service juridique, composé de plusieurs éléments, est fourni, il y a lieu de déterminer la finalité globale pour apprécier si le service unique relève des dispositions du 2° de l'article 259 A.

67. Cas particulier – Travaux immobiliers et convention franco-monégasque

Les entrepreneurs de travaux immobiliers qui ont le siège de leur exploitation en France, mais qui effectuent des travaux à Monaco, doivent acquitter les taxes sur le chiffre d'affaires afférentes à ces travaux auprès des services de la Principauté.

Réciproquement les entrepreneurs établis à Monaco, effectuant des travaux en France, sont tenus d'acquitter les mêmes taxes auprès des services fiscaux français.