SOUS SECTION 3 RECTIFICATIONS À OPÉRER PAR LA SOCIÉTÉ MÈRE EN VUE D'ASSURER LA NEUTRALITÉ DE CERTAINES OPÉRATIONS ENTRE DES SOCIÉTÉS DU GROUPE OU D'ÉVITER UN CUMUL D'AVANTAGES FISCAUX
2. Régime des abandons de créances, subventions directes ou indirectes consenties entre sociétés du groupe.
a. Rappel des règles de droit commun applicables pour la détermination du résultat des sociétés membres du groupe.
40Conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, le résultat de chacune des sociétés du groupe est déterminé dans les conditions de droit commun ; à ce titre, le régime des abandons de créances et subventions directes et indirectes consentis par une société mère à sa filiale s'applique pour la détermination du résultat propre de chacune des sociétés du groupe.
L'application du droit commun emporte les conséquences suivantes :
1° Abandons de créances et subventions directes.
41Lorsque les abandons de créances et les subventions sont déductibles, aucune réintégration ou déduction ne doit être opérée sur le résultat de la société.
42Lorsque tout ou partie des abandons de créances ou des subventions n'est pas déductible, la fraction non déductible est rapportée au résultat de la société qui les a consentis ; néanmoins, l'abandon ou la subvention est imposable chez la société bénéficiaire, sauf en cas d'application de l'article 216 A du code général des impôts.
2° Subventions indirectes afférentes à des cessions de biens composant l'actif immobilisé.
43Selon la jurisprudence, l'insuffisance de prix ou l'excédent de prix stipulé lors de la cession d'un élément de l'actif immobilisé, même entre société mère et filiale, est réputé constituer à concurrence de cette insuffisance ou de cet excédent de prix, un avantage accordé sans contrepartie à la société cessionnaire ou à la société cédante (CE 21.11.1980, n° 17.055 et CE 2.10.1985, n° 37.791).
44La société qui consent la subvention doit donc la rapporter à son résultat imposable au taux normal de l'impôt sur les sociétés. Il s'agit soit de la société vendeuse si le prix est minoré soit de la société cessionnaire si le prix est majoré. De même, la société qui bénéficie de cette subvention indirecte doit la rapporter à son résultat imposable.
45En cas d'excédent du prix de cession sur la valeur réelle l'opération a donné lieu à la réalisation d'une plus-value majorée à hauteur de l'excédent de prix ou d'une moins-value minorée de cet excédent. La réintégration de la subvention indirecte au résultat de la société cessionnaire bénéficiaire de cette subvention ouvre donc droit corrélativement à la déduction de la plus-value ou à la majoration de la moins-value à hauteur du montant de la subvention indirecte ainsi rapportée au résultat ; cette rectification s'opère en priorité sur la partie à long terme de la plus ou moins-value et pour le solde sur la partie à court terme.
46En cas d'insuffisance du prix de cession, la subvention indirecte représentée par la minoration du prix n'affecte pas, même implicitement l'actif net de la société cessionnaire bénéficiaire de la subvention ; par conséquent elle doit rapporter la subvention reçue à son résultat imposable. En contrepartie, si la société cessionnaire choisit de porter le bien à son bilan non pour sa valeur d'acquisition mais pour sa valeur réelle, il sera admis que le profit ainsi constaté comptablement soit extourné de son résultat imposable dès lors que la société a déjà pris en compte dans son résultat fiscal la subvention indirecte reçue. Dans ce cas, les amortissements, les provisions et les plus ou moins-values ultérieures seront calculés par rapport à cette nouvelle valeur mais, bien entendu, s'il s'agit d'un bien amortissable les dispositions de l'article 39 B du code déjà cité relatives à l'obligation d'amortissement minimal restent opposables à la société.
3° Subventions indirectes résultant de la cession de titres exclus du régime des plus ou moins-values à long terme.
47Le II de l'article 11 de la loi de finances pour 1996 étend le régime des subventions indirectes provenant de la cession d'immobilisations aux subventions indirectes résultant de la cession de titres exclus du régime des plus ou moins-values à long terme.
Par conséquent, la subvention indirecte qui provient de la remise de titres de portefeuille exclus du régime des plus-values ou moins-values à long terme pour un prix différent de leur valeur réelle n'est pas prise en compte dans le résultat d'ensemble de l'exercice au cours duquel elle a été consentie. Les sommes déduites à ce titre du résultat d'ensemble sont rapportées, sans condition de délai, lorsque la société qui consent la subvention ou celle qui en est la bénéficiaire sort du groupe.
4 ° Autres subventions indirectes.
48Les autres subventions indirectes ne nécessitent aucune réintégration ou déduction du résultat de la société lorsqu'elles sont déductibles en application des règles de droit commun ; dans cette situation en effet la subvention indirecte affecte implicitement l'actif net des sociétés concernées (CE 25.07.1980, n° 15.073) ; si la subvention n'est pas déductible, seule la société qui l'accorde doit la rapporter à son résultat dès lors que l'avantage en résultant s'est trouvé nécessairement pris en compte dans les bases d'imposition déclarées par la société bénéficiaire de la subvention (CE 25.07.1980 déjà cité).
b. Rectifications à opérer pour la détermination du résultat d'ensemble en application du sixième alinéa de l'article 223 B du code général des impôts.
49Selon les dispositions du sixième alinéa de l'article 223 B, la subvention directe ou indirecte ou l'abandon de créance consenti entre des sociétés du groupe n'est pas pris en compte pour la détermination du résultat d'ensemble.
50L'application de cette règle conduit à rapporter au résultat d'ensemble les subventions et abandons de créances déduits, implicitement ou explicitement du résultat des sociétés qui les ont consentis : bien entendu, cette réintégration n'a pas à être effectuée lorsque la subvention a été rapportée au résultat imposable de la société qui l'a consentie en application des règles de droit commun.
51En application de la règle définie au sixième alinéa de l'article 223 B déjà cité, le résultat d'ensemble est également minoré du montant pour lequel les subventions et abandons de créances ont affecté, implicitement ou explicitement le résultat des sociétés qui en ont bénéficié.
52Dans tous les cas, la correction apportée au résultat d'ensemble est effectuée de la manière suivante :
- il est minoré du montant de la somme comprise dans le résultat propre de la société bénéficiaire de l'abandon ;
- il est majoré du montant de la somme déduite, du point de vue fiscal, du résultat de la société qui a consenti l'abandon.
Lorsque l'abandon de créances n'est pas déductible, aucune somme ne doit être ajoutée au résultat d'ensemble.
Ainsi lorsque la société qui consent l'avantage, a réintégré dans son résultat imposable les sommes non facturées à d'autres sociétés du groupe en application des règles de droit commun, le résultat d'ensemble est seulement minoré du montant pour lequel les opérations en cause ont affecté le résultat de la société bénéficiaire de la subvention.
c. Traitement des abandons de créances avec clause de retour à meilleure fortune au sein des groupes.
53Certains abandons de créances sont accordés avec une clause de retour à meilleure fortune et ne sont pas définitifs. Lorsque cette clause joue, la société bénéficiaire de l'aide reverse tout ou partie de celle-ci à la société qui avait abandonné ses créances.
Les règles applicables en droit commun prévoient lors du retour à meilleure fortune un traitement fiscal symétrique à celui qui a été appliqué à l'opération initiale (RM Haenel, Sénat, 29 décembre 1994, n° 6411, p. 3075). La mise en oeuvre de la clause de retour à meilleure fortune peut avoir différentes conséquences sur la détermination du résultat d'ensemble, dès lors qu'une période d'un ou plusieurs exercices s'est écoulée entre les deux phases de l'opération.
En principe, le retour à meilleure fortune doit être traité de façon symétrique à l'opération initiale au regard des règles du régime de groupe comme en droit commun.
Ainsi, les situations suivantes peuvent se présenter :
1° Les deux sociétés concernées sont demeurées dans le groupe fiscal.
54Les conséquences de l'abandon de créances initial ont été neutralisées pour la détermination du résultat d'ensemble de l'exercice de sa réalisation. Les conséquences du retour à meilleure fortune, qui sont symétriques à celles de l'abandon, sont également neutralisées pour la détermination du résultat d'ensemble. Les deux opérations se compensent.
2° L'abandon de créances a eu lieu avant l'application du régime d'intégration.
55Le retour à meilleure fortune est traité de façon classique en droit commun, dès lors qu'il ne s'analyse pas en une nouvelle subvention, mais revient sur l'abandon initialement assorti d'une condition suspensive.
Pour la détermination du résultat du groupe, aucune correction n'est nécessaire en raison de l'absence de retraitement lors de l'abandon de créances.
Dans la situation où, au cours de la période d'intégration, la société qui a octroyé l'abandon ne fait pas jouer la clause de retour à meilleure fortune, l'administration considère qu'il y a un second abandon de créances non accompagné d'une clause de retour à meilleure fortune.
3° Le retour à meilleure fortune intervient après la sortie de l'une au moins des sociétés concernées.
56Si l'une des deux sociétés concernées est sortie du groupe, les subventions constatées lors de l'abandon de créances ont été réintégrées et déduites au moment de la sortie. Le versement consécutif à l'application de la clause de retour à meilleure fortune ne constitue pas une nouvelle subvention entre les deux sociétés du groupe. Aucune correction du résultat d'ensemble n'est donc nécessaire. Les règles de droit commun s'appliquent.
L'ensemble de l'opération est équilibré, dès lors que les retraitements de sortie du groupe ont replacé l'opération dans les conditions de droit commun. Tout se passe en effet comme si, pour l'opération en cause, les deux sociétés n'avaient jamais fait partie du groupe.
La solution est donc identique à celle de la situation exposée au 2° ci-dessus, sauf pour les subventions de plus de cinq ans ne portant pas sur des immobilisations. Mais lesdites subventions sont, dans le cas général, déductibles pour la société qui les a consenties et imposables pour celle qui les a reçues.
4° Les deux sociétés concernées sont demeurées dans le groupe intégré mais le retour à meilleure fortune intervient plus de cinq ans après l'abandon de créances.
57Les écritures de droit commun constatées lors de la réalisation de la clause de retour à meilleure fortune ne nécessitent aucune correction pour la détermination du résultat d'ensemble. En effet, les subventions réintégrées ou déduites lors de la constatation de l'abandon de créances, sont maintenues en « sursis » pendant cinq ans.
Au-delà de cette période, aucune correction n'est plus à apporter en cas de sortie. L'annulation de ces opérations de retraitement n'est donc plus nécessaire puisque celles-ci sont devenues définitives à l'issue de ce délai de cinq ans. En conséquence, des déséquilibres équivalents à une double déduction peuvent exister lorsque la subvention initiale avait un caractère anormal.
5° Cas particulier de la subvention pour impôt.
58Lorsque la société mère paie le gain d'impôt afférent au déficit que lui transmet la filiale, il y a indubitablement subvention indirecte, mais celle-ci est neutralisée pour le calcul du résultat d'ensemble. Aussi, lorsque la filiale redevient bénéficiaire et paie l'impôt sur son résultat avant imputation du déficit antérieur, y a-t-il annulation des conséquences de l'opération initiale tant en droit commun qu'en régime de groupe comme si celle-ci avait été une subvention expressément assortie d'une clause de retour à meilleure fortune.
d. Remarque.
59Les dispositions de l'article 223 B du CGI rendent sans portée celles de l'article 216 A du même Code dès lors que les profits réalisés par une société qui bénéficie d'un abandon de créances sont déduits du résultat d'ensemble. Toutefois, si les conditions d'application de ce dernier article sont remplies et si les sociétés concernées en ont demandé l'application, la société mère peut s'abstenir d'effectuer les retraitements prévus à l'article 223 B.
3. Obligations déclaratives.
60Aux termes du 4 du I de l'article 98 de la loi de finances pour 1992 (loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991), codifié au sixième alinéa de l'article 223 B du CGI, la société mère est tenue de joindre à la déclaration du résultat d'ensemble de chaque exercice un état des abandons de créances ou des subventions consentis à compter du 1er janvier 1992 ; ces obligations déclaratives ont été définies par le décret n° 92-527 du 15 juin 1992.
Les dispositions du 5 du I du même article 98 prévoient que le non-respect de ces obligations entraîne l'application de l'amende mentionnée à l'article 1734 bis du CGI.
61Par ailleurs, selon les dispositions de l'article 3 du décret n° 92-527 du 15 juin 1992 (codifié à l'article 46 quater-0 ZL de l'annexe III au CGI) pris en application du 4 du I de l'article 98 de la loi de finances pour 1992, la société mère est tenue de joindre à la déclaration du résultat d'ensemble visée à l'article 223 Q du code général des impôts un état des subventions directes ou indirectes et des abandons de créances consentis ou reçus par chacune des sociétés membres du groupe, à compter du 1er janvier 1992, indiquant la dénomination des sociétés concernées ainsi que la nature et le montant de ces subventions ou abandons.
62Ces renseignements doivent être présentés sur un document conforme au modèle établi par l'administration (cf. annexe).
63L'amende prévue à l'article 1734 bis du code déjà cité est susceptible de s'appliquer en cas de non-respect de ces obligations. Par suite, la société mère qui n'aura pas produit à l'appui de la déclaration du résultat d'ensemble des exercices clos après le 1er janvier 1992, l'état des subventions et abandons de créances consentis à compter de cette date prévu au sixième alinéa de l'article 223 B du même code ou qui aura fourni des renseignements incomplets, sera passible d'une amende égale à 5 % des sommes ne figurant pas sur cet état.
64En application des dispositions du dernier alinéa de l'article 1734 bis déjà cité, ce taux est toutefois ramené à 1 % lorsqu'aucune infraction de même nature n'a été antérieurement commise par le contribuable au titre des trois années précédant celle au titre de laquelle l'infraction est commise et que les sommes correspondantes sont déductibles.
Pour l'application du taux réduit de l'amende, le caractère déductible des sommes en cause s'apprécie au niveau du résultat propre de la société du groupe qui a consenti l'abandon de créances ou la subvention.