Date de début de publication du BOI : 08/02/2010
Identifiant juridique : 5F-6-10
Références du document :  5F-6-10

B.O.I. N° 17 DU 8 FEVRIER 2010


BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS

5 F-6-10

N° 17 DU 8 FEVRIER 2010

INSTRUCTION DU 28 JANVIER 2010

IMPOT SUR LE REVENU. TRAITEMENTS ET SALAIRES. DEPENSES PROFESSIONNELLES. OPTION POUR LE REGIME DES FRAIS REELS ET JUSTIFIES. DEDUCTIBILITE DES INTERETS D'EMPRUNT SOUSCRITS PAR LES SALARIES POUR L'ACQUISITION DE TITRES DE LEUR ENTREPRISE. ARTICLE 37 DE LA LOI N° 2008-1143 DU 30 DECEMBRE 2008 DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2008.

(C.G.I., art. 83-3°)

NOR : ECE L 10 20738 J

Bureau C 1



PRESENTATION


L'article 37 de la loi n° 2008-1143 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, qui complète le 3° de l'article 83 du code général des impôts (CGI), précise les conditions dans lesquelles, en cas d'option pour le régime des frais réels et justifiés, les frais, droits et intérêts d'emprunt versés par un salarié ou un dirigeant pour l'acquisition ou la souscription de titres de la société dans laquelle il exerce son activité principale sont déductibles. Ces dépenses sont déductibles sous réserve :

- d'être versées pour acquérir ou souscrire des parts ou des actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ;

- d'être utiles à l'acquisition ou à la conservation du revenu provenant de l'activité exercée par le salarié ou le dirigeant dans la société ;

- de correspondre à la part de l'emprunt dont le montant est proportionné à la rémunération annuelle perçue ou escomptée au moment où l'emprunt est contracté, c'est-à-dire à la part de l'emprunt qui n'excède pas le triple de cette rémunération.

Aucune déduction n'est admise si les titres ont ouvert droit aux bénéfices des réductions d'impôt prévues aux articles 199 terdecies -0 A, 199 terdecies- 0 B ou 885-0 V bis du CGI ou si les titres figurent dans un plan d'épargne en actions ou dans un plan d'épargne salariale.

La déduction de ces frais entraîne obligatoirement la renonciation à la déduction forfaitaire de 10 % au titre des frais professionnels.

La présente instruction commente ces règles qui s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de l'année 2009.


SOMMAIRE

INTRODUCTION
 
1
CHAPITRE 1 : CHAMP D'APPLICATION DE LA DEDUCTION
 
6
S ection 1 : Personnes concernées
 
7
A. SALARIES OU DIRIGEANTS
 
7
B. EXERCICE DE L'ACTIVITE PROFESSIONNELLE PRINCIPALE
 
9
Section 2 : Titres concernés
 
13
Section 3 : Condition tenant à l'utilité de l'achat ou de la souscription des titres pour l'acquisition et la conservation des revenus
 
15
A. PRINCIPE
 
15
B. MODALITES D'APPRECIATION
 
18
     1. S alariés et dirigeants membres des professions réglementées
 
19
     2. Reprise ou création d'entreprise
 
23
     3. Autres situations
 
25
CHAPITRE 2 : MODALITES D'APPLICATION DE LA DEDUCTION
 
28
Section 1 : Dépenses admises en déduction
 
29
Section 2 : Proportionnalité des frais d'emprunts déduits à la rémunération annuelle
 
34
A. PLAFOND DE LA DEDUCTION
 
36
B. REMUNERATION A PRENDRE EN COMPTE
 
42
Section 3 : Non-cumul de la mesure avec d'autres dispositifs
 
46
CHAPITRE 3 : ENTREE EN VIGUEUR
 
50
Annexe
 


INTRODUCTION


1. Pour la détermination du revenu net imposable à l'impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des traitements et salaires, les frais professionnels sont, en application du 3° de l'article 83 du code général des impôts (CGI), déductibles du montant brut des sommes payées et des avantages accordés, soit pour un montant forfaitaire, soit, sur option, pour leur montant réel et justifié.

En cas d'option pour le régime des frais réels et justifiés, les frais dont la déduction est admise s'entendent de ceux qui respectent les conditions générales de déduction qui résultent du 1 de l'article 13 et du 3° de l'article 83 du CGI : les intéressés doivent pouvoir justifier que les frais déduits pour la détermination du revenu net imposable selon les règles des traitements et salaires au titre d'une année d'imposition ont bien été exposés en vue d'acquérir ou de conserver ce revenu et ont été effectivement payés au cours de l'année d'imposition considérée.

2. En application de ces principes, le Conseil d'Etat (arrêts du 25 octobre 2004, n° 255092 X... et n° 255093 Y... ) a admis la déduction par un salarié, au titre des frais réels, des dépenses qui, eu égard à leur objet et à leur ampleur, peuvent être regardées comme directement utiles à l'acquisition ou la conservation de ses revenus, alors même que ni les circonstances de fait ni aucun texte ne les rendaient obligatoires.

A ce titre, le juge administratif a admis la déduction d'intérêts d'emprunt contracté par un salarié pour l'acquisition de titres d'une société dans laquelle il exerce son activité dès lors que cette acquisition était directement de nature à faciliter la poursuite de son contrat de travail et que les frais déduits n'étaient pas hors de proportion avec la rémunération perçue ou escomptée de cette société au moment où l'emprunt est contracté. Cette jurisprudence a été commentée dans l'instruction administrative en date du 23 novembre 2006, publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 5 F-20-06 .

3. Le dernier alinéa du 3° de l'article 83 du CGI, issu de l'article 37 de la loi n° 2008-1143 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, confirme cette jurisprudence et autorise la déduction des frais, droits et intérêts d'emprunt versés pour acquérir ou souscrire des parts ou actions d'une société exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale dans laquelle le salarié ou le dirigeant exerce son activité professionnelle principale, dès lors que ces dépenses sont utiles à l'acquisition ou à la conservation de ses revenus.

4. La déduction de ces frais entraîne obligatoirement la renonciation à la déduction forfaitaire de 10% au titre des frais professionnels.

5. La présente instruction a pour objet de commenter cette nouvelle disposition. Sauf mention contraire, les articles cités sont ceux du code général des impôts et de ses annexes.


CHAPITRE 1 :

CHAMP D'APPLICATION DE LA DEDUCTION


6. Pour bénéficier de la déduction prévue au dernier alinéa du 3° de l'article 83 au titre des frais réels :

- les salariés et dirigeants doivent exercer leur activité professionnelle principale dans la société dont ils achètent ou souscrivent les parts ou actions (section 1) ;

- la société doit avoir une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (section 2) ;

- l'acquisition ou la souscription des titres doit être utile à l'acquisition ou à la conservation de leurs revenus (section 3).


Section 1 :

Personnes concernées



  A. Salariés ou dirigeants


7. Sont susceptibles de pouvoir déduire les frais, droits et intérêts d'emprunt versés pour l'acquisition ou la souscription de titres de la société dans laquelle ils travaillent selon les modalités précisées dans la présente instruction les salariés ou dirigeants qui ont opté pour la déduction de leur frais professionnels pour leur montant réel et justifié.

8. Les dirigeants concernés sont ceux qui perçoivent une rémunération imposable selon les règles des traitements et salaires, y compris donc ceux dont les rémunérations relèvent de l'article 62 tels que, par exemple, les gérants majoritaires de sociétés à responsabilité limitée (SARL).


  B. EXERCICE DE L'ACTIVITE PROFESSIONNELLE PRINCIPALE


9. Pour déduire les frais, droits et intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition des droits ou parts d'une société, les personnes doivent y exercer leur activité professionnelle principale en qualité de salarié ou de dirigeant. Le dispositif est également applicable en cas de cumul de fonctions.

10. Lorsque le contribuable exerce simultanément plusieurs activités professionnelles, l'activité professionnelle principale est celle à laquelle il consacre le plus de temps effectif ou, si ce critère n'est pas applicable, celle qui lui procure plus de 50 % de l'ensemble de ses revenus professionnels 1 .

Le respect de cette condition s'apprécie annuellement.

11. Lorsque la condition d'exercice de l'activité à titre principal n'est pas respectée au cours de l'année considérée, aucune déduction n'est admise.

12.Toutefois, cette condition s'apprécie selon des modalités particulières l'année de souscription ou d'acquisition et l'année de cession des titres :

- au titre de l'année d'acquisition ou de souscription des titres, elle sera réputée remplie si, à partir du troisième mois suivant l'acquisition ou la souscription des titres, l'activité exercée dans la société est l'activité principale du salarié ou du dirigeant concerné,

- au titre de l'année de cession des titres, la condition sera réputée remplie si l'activité exercée dans la société est l'activité principale du salarié ou du dirigeant jusqu'à la cession des titres.


Section 2 :

Titres concernés


13. Les frais, droits et intérêts d'emprunt déductibles en application du huitième alinéa du 3° de l'article 83 sont ceux versés à raison d'un emprunt contracté pour acquérir ou souscrire des titres de sociétés :

- passibles de plein droit de l'impôt sur les sociétés 2 ou soumises sur option à cet impôt

- qui exercent une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale au sens des articles 34, 35, 63 et 92.

Sont par suite notamment exclues :

- les sociétés dont l'activité est la gestion de leur propre patrimoine mobilier. Il s'agit notamment des sociétés civiles de portefeuille, des sociétés de capital-risque ou des holdings non animatrices de leur groupe, dont la seule activité est de détenir des participations et d'exercer les prérogatives usuelles d'un actionnaire ;

- ou les sociétés dont l'activité est la gestion de leur propre patrimoine immobilier (par exemple les sociétés immobilières ayant pour objet la location de leurs immeubles nus).

14. La forme juridique de la société passible de l'impôt sur les sociétés ou soumise sur option à cet impôt importe peu, sous réserve que les titres concernés soient des actions ou des parts sociales, déjà émises ou à émettre.


Section 3 :

Condition tenant à l'utilité de l'achat ou de la souscription des titres  pour l'acquisition et la conservation des revenus



  A. PRINCIPE


15. Les salariés et dirigeants ayant opté pour le régime des frais réels peuvent déduire les frais, droits et intérêts d'emprunt versés pour l'acquisition ou la souscription de titres de la société dans laquelle ils exercent leur activité professionnelle principale à la condition que cette opération soit utile à l'acquisition ou à la conservation de la rémunération perçue de cette société.

16. Cette condition d'utilité est considérée comme remplie lorsque l'acquisition ou la souscription des titres est de nature à permettre l'exercice de l'activité en qualité de salarié ou dirigeant.

Il doit exister un lien direct entre la conclusion ou la poursuite du contrat de travail ou de mandat social, l'acquisition ou la souscription des titres et enfin la souscription de l'emprunt.


  B. MODALITES D'APPRECIATION


17. L'utilité de l'achat ou de la souscription des titres pour l'acquisition ou la conservation des revenus professionnels perçus ou escomptés de la société résulte de l'examen des circonstances de fait et doit être établie.

Le seul fait pour un salarié ou un dirigeant d'exercer son activité professionnelle dans une société n'est pas suffisant pour établir l'utilité de l'acquisition des titres de cette société à l'acquisition ou la conservation de la rémunération versée par cette société.

En revanche, cette condition d'utilité pourra notamment être considérée comme remplie dans les situations suivantes.

  1. Salariés et dirigeants membres des professions réglementées

18. Les statuts de certaines professions réglementées imposent un pourcentage minimal, au sein des sociétés de capitaux, d'associés disposant d'une qualification professionnelle spécifique. Il en est notamment ainsi pour les membres des sociétés d'exercice libéral (SEL), qui peuvent par exemple être formées entre des avocats, des experts-comptables, des pharmaciens ou des huissiers, dont les dirigeants et les deux tiers des membres du conseil d'administration ou de surveillance doivent être des associés exerçant leur profession au sein de la société et dont la moitié des actions ou parts doit être détenue par des professionnels exerçant leur activité au sein de la société 3 .

19. Dès lors que l'exercice de leurs fonctions au sein de la société considérée implique pour les intéressés une participation à son capital, les membres des professions réglementées peuvent déduire, pour la détermination de leur rémunération nette imposable à l'impôt sur le revenu, les frais, droits et intérêts d'emprunt versés, le cas échéant, pour l'acquisition ou la souscription de titres de ladite société.

20. Les associés de ces mêmes professions, qui exercent leur activité au sein de sociétés civiles professionnelles (SCP) qui ont opté pour l'impôt sur les sociétés, peuvent également déduire les frais, droits et intérêts d'emprunts versés pour l'acquisition ou la souscription de parts de la société dans laquelle ils exercent leur activité principale.

21. Les dirigeants de sociétés de capitaux, visés au premier alinéa de l'article 12 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, peuvent également déduire les frais, droits et intérêts d'emprunt versés pour l'acquisition ou la souscription de titres de la société dans laquelle ils exercent leur activité principale. Il en est de même pour les gérants de SCP soumises à l'impôt sur les sociétés, dès lors que le statut de la profession concernée l'exige.

  2. Reprise ou création d'entreprise

22. La condition d'utilité des titres, et donc des dépenses supportées pour leur acquisition ou leur souscription, doit également être considérée comme respectée lorsque la personne acquiert des actions ou parts d'une société déjà existante en vue d'y exercer son activité professionnelle principale en qualité de salarié ou dirigeant, et que l‘exercice de cette activité découle directement de cette acquisition.

Tel est notamment le cas lorsque l'acquisition des titres permet la reprise d'une entreprise par une personne qui en prend le contrôle, en devient le dirigeant et y exerce son activité professionnelle principale (acquisition d'un « outil professionnel »).

23. Il en est de même lorsque la souscription des titres permet la création d'une entreprise dans les mêmes conditions.

  3. Autres situations

24. Dans les autres situations, l'utilité de l'achat ou de la souscription des titres pour l'acquisition et la conservation de la rémunération perçue doit être effectivement établie.

Tel pourra être le cas lorsque l'acquisition ou la souscription des titres et par voie de conséquence l'emprunt a pour objet d'assurer la pérennité de la société confrontée à des difficultés financières, constatée par l'ouverture d'une procédure collective, et donc, en définitive, de permettre à l'intéressé de préserver son revenu.

25. Lorsque l'acquisition ou la souscription des titres est nécessaire pour accéder à de nouvelles fonctions dans la société dans laquelle l'activité est exercée, et dans la mesure où ce lien peut être justifié par l'intéressé, il peut également être admis que l'achat ou la souscription des titres est utile à l'acquisition de la rémunération perçue ou escomptée de la société au moment où les titres sont acquis ou souscrits.

Il en est ainsi, par exemple, pour un salarié qui deviendrait associé, seul ou avec d'autres associés, d'une société et accéderait ainsi à des fonctions de dirigeant.

26. En revanche, les frais, droits et intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition ou la souscription des titres de la société dans laquelle le salarié ou le dirigeant exerce son activité ne sont pas admis en déduction si cette acquisition n'a aucun effet sur la situation professionnelle de l'intéressé, mais répond simplement à un objectif de constitution d'une épargne sous la forme d'un portefeuille de valeurs mobilières ou de droits sociaux.

Il en est ainsi, notamment, des acquisitions d'actions réalisées dans le cadre des dispositifs d'épargne salariale et d'actionnariat salarié.