CHAPITRE 2 OPÉRATIONS IMPOSABLES PAR DISPOSITION EXPRESSE DE LA LOI
CHAPITRE 2
OPÉRATIONS IMPOSABLES PAR DISPOSITION EXPRESSE DE LA LOI
SECTION 1
Les opérations réalisées par les personnes morales de droit public
A. PRINCIPES GÉNÉRAUX
1Aux termes de l'article 4 § 5 de la 6e directive, les organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations, qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques sauf si leur non-assujettissement conduit à des distorsions de concurrence.
Remarque : Il convient de souligner que les services de l'État doivent acquitter la TVA lorsqu'ils réalisent des travaux d'études, de recherches, ou de conseils pour le compte de tiers, et notamment les collectivités locales. En effet, leur non-assujettissement entraînerait des distorsions de concurrence au détriment des bureaux d'études privés normalement soumis à l'impôt.
Il en est par exemple ainsi de certains concours techniques permanents (activités de gestion et de conseil technique pour les chambres de commerce et d'industrie) et occasionnels (missions de maîtrise d'oeuvre pour le compte des collectivités locales, d'établissements publics, de sociétés ou de particuliers) apportés par les services dépendant du ministère de l'Équipement et des Transports (ingénieurs de l'équipement) et du ministère de l'Agriculture (ingénieurs du génie rural et des eaux et forêts).
Ces dispositions sont reprises à l'article 256 B du CGI qui, conformément à la directive, précise également les opérations pour lesquelles les personnes morales de droit public sont obligatoirement assujetties à la TVA. L'article 260 A du CGI permet cependant aux collectivités locales, à leurs groupements ou à leurs établissements publics, d'opter pour l'imposition de certaines de leurs activités (cf. DB 3 A 54 ).
2Les activités hors du champ d'application de la TVA ne devant plus être prises en compte dans le prorata de déduction, il convient de distinguer les activités des personnes morales de droit public qui ne sont pas placées dans le champ d'application de la taxe, de celles qui sont exonérées ou imposées.
L'activité hors du champ d'application de la TVA, au sens de l'article 256 B du CGI, doit répondre à deux critères :
- elle doit être exercée par une personne morale de droit public ;
- elle doit être accomplie par cette personne en tant qu'autorité publique.
Ces deux principes appellent les précisions suivantes :
B. LA NOTION DE PERSONNES MORALES DE DROIT PUBLIC
3Les personnes morales de droit public concernées sont essentiellement :
1° Les administrations de l'État, au niveau central ;
2° Les collectivités locales (départements, communes, régions) et leurs groupements ;
3° Les établissements publics de l'État, y compris ceux ayant un caractère industriel ou commercial ;
4° Les établissements publics locaux ;
a. Établissements rassemblant plusieurs collectivités territoriales :
- communautés urbaines ;
- communautés de villes ;
- communautés de communes ;
- districts ;
- établissements publics des villes nouvelles ;
- institutions interdépartementales ;
- syndicats de communes ;
- syndicats mixtes.
b. Établissements dépendant d'une collectivité locale :
- offices publics d'HLM ;
- offices de tourisme ;
- services départementaux de lutte contre l'incendie.
5° Les groupements constitués exclusivement entre des personnes morales de droit public dès lors qu'ils :
- assurent des missions de service public ;
- fonctionnent avec la participation et sous le contrôle d'autorité publique et dont le financement est assuré en quasi-totalité par des fonds publics (subventions).
C. LES ACTIVITÉS ACCOMPLIES EN TANT QU'AUTORITÉ PUBLIQUE
4Les activités exercées en tant qu'autorité publique sont celles qu'accomplissent les organismes de droit public dans le cadre du régime juridique qui leur est particulier, à l'exclusion des activités qu'ils exercent dans les mêmes conditions juridiques que les opérateurs économiques privés (CJCE, 17/10/89, n°s 231/87 et 129/88, communes de Carpaneto, Piacentino et de Rivergaro).
Ce sont donc les modalités d'exercice des activités qui permettent de déterminer la portée du non-assujettissement de ces organismes et non l'objet ou le but de leur activité.
Ce non-assujettissement peut donc concerner des activités économiques.
Il importe peu par ailleurs, qu'à l'occasion de ces activités ou opérations, il soit perçu des droits, redevances, cotisations ou rétributions.
Pour apprécier si une activité exercée par une personne morale de droit public est placée ou non dans le champ d'application de la TVA il convient de déterminer parmi les trois catégories suivantes, celle dont relève l'activité en cause.
I. Les activités exercées en vertu d'un pouvoir de souveraineté ou d'intérêt général
5Il s'agit :
- des tâches administratives fondamentales et obligatoires que l'État et les autres collectivités publiques exercent en vertu de leurs prérogatives de puissance publique (défense nationale, gendarmerie, éducation nationale, police, sécurité publique, justice, diplomatie, santé publique, état civil, recouvrement de l'impôt, etc.).
Les recettes perçues par les collectivités dans le cadre de l'exercice de ces prérogatives hors du champ de la taxe ne sont donc pas imposables à la TVA. Tel est le cas notamment :
• des impôts et taxes locaux ;
• des droits perçus en contrepartie du stationnement sur les voies publiques affectées à la circulation.
- des activités qui, bien que ne relevant pas de l'exercice de la souveraineté et n'impliquant pas l'exercice de pouvoirs coercitifs, sont exercées en tant qu'autorité publique par les personnes morales de droit public.
Tel est le cas des redevances perçues par une collectivité au titre de l'affermage ou de la concession d'un service public.
Sont également concernées les activités suivantes :
- fourniture de l'eau ;
- assainissement ;
- abattoirs publics ;
- enlèvement et traitement des ordures ménagères ;
- marchés d'intérêt national ;
Ces activités peuvent toutefois être soumises à la TVA par détermination expresse de la loi ou par exercice du droit d'option prévu à l'article 260 A du CGI.
6Il est à noter que l'assujettissement des personnes morales de droit public dépend de la nature des opérations qu'elles effectuent et non du statut des personnes qui les accomplissent (État, collectivités locales, établissements publics, etc.)
II. Les activités expressément imposées
7L'imposition de certaines activités des personnes morales de droit public est expressément prévue par la loi.
Il s'agit des activités désignées à l'article 256 B du CGI, c'est-à-dire :
- livraisons de biens neufs fabriqués en vue de la vente ;
- distribution de gaz, d'électricité et d'énergie thermique ;
- opérations des économats et établissements similaires ;
- transports de biens, à l'exception de ceux effectués par La Poste ;
- transports de personnes (y compris l'exploitation de remonte-pentes) ;
- opérations des organismes d'intervention agricole portant sur les produits agricoles et effectuées en application des règlements portant organisation commune du marché de ces produits à l'exception de leur activité de redistribution des subventions pour le compte de l'État ou de la Communauté européenne ;
- organisation d'expositions à caractère commercial ;
- prestations de services portuaires et aéroportuaires ;
- entreposage de biens meubles ;
- organisation de voyages et de séjours touristiques ;
- diffusion ou redistribution de programmes de radiodiffusion ou de télévision ;
- télécommunications ;
-fourniture d'eau dans les communes d'au moins 3 000 habitants ou par les établissements publics de coopération intercommunale dont le champ d'action s'exerce sur un territoire d'au moins 3 000 habitants (à compter du 1er janvier 1993) 1 .
Cette liste n'est pas limitative. Les activités économiques qui ne relèvent pas des services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs des organismes de droit public mais, notamment, de certains de leurs services à caractère industriel et commercial, sont soumises de plein droit à la TVA.
Il s'agit en particulier des opérations suivantes : location de locaux aménagés, location d'emplacements de stationnement 2 , location de meublés (ex : gîtes communaux), exploitation de bars et buvettes, travaux d'études et de recherches, ventes de terrains à bâtir, opérations agricoles lorsque la moyenne des recettes calculée sur deux années civiles consécutives excède 300 000 F.
Il est à noter que l'assujettissement des personnes morales de droit public dépend de la nature des opérations qu'elles effectuent et non du statut des personnes qui les accomplissent (État, collectivités locales, établissements publics, etc.).
III. Les activités des services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs dont le non-assujettissement est susceptible d'entraîner des distorsions dans les conditions de la concurrence
8La notion de concurrence à laquelle il convient de se référer pour savoir si un organisme de droit public est ou non assujetti à la TVA s'apprécie dans un cadre qui peut dépasser les limites territoriales de la circonscription dans laquelle s'exerce son activité. Il convient donc, suivant les cas, de situer au plan communal, départemental, ou même national, le domaine concurrentiel. Celui-ci peut, en effet, varier en fonction du champ d'action géographique de l'organisme concerné, de l'étendue du marché ou de la clientèle vers laquelle son activité est orientée.
9Le caractère concurrentiel de l'activité d'un organisme public ne peut être établi que par rapport à la même activité ou une activité semblable au titre de laquelle les entreprises privées sont soumises à la taxe. Il s'ensuit que l'organisme de droit public exerçant la même activité qu'un organisme de droit privé exonéré ne doit pas être recherché en paiement de la TVA.
10Les services à caractère social exploités par les régies communales ou départementales, qui, en vertu de l'article L. 2221 du code des collectivités territoriales, sont exclues du nombre des régies à caractère industriel et commercial, ne sont pas, en principe, susceptibles d'entrer en concurrence avec les activités du secteur privé (régies d'hygiène ou d'assistance).
11À titre de règle pratique, il convient de considérer que sont plus particulièrement susceptibles d'entrer en concurrence avec le secteur privé les services publics à caractère industriel et commercial des collectivités locales qui peuvent être concédés à des entreprises privées.
12Lorsqu'une personne morale de droit public est considérée comme assujettie, soit parce qu'elle exerce des activités qui sont obligatoirement soumises à la taxe, soit parce qu'elle se trouve en concurrence avec des entreprises privées, les opérations qu'elle effectue ne donnent effectivement lieu au paiement de la TVA que si elles ne bénéficient pas d'une exonération de caractère général.
13Sauf circonstances particulières qui ne peuvent être appréciées que cas par cas, les activités des services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs des personnes morales de droit public également susceptibles d'être effectuées par des opérateurs privés peuvent être réparties en trois catégories.
1. Les activités pour lesquelles la non-concurrence doit être présumée et qui sont alors placées hors du champ d'application de la TVA.
14 - les opérations étroitement liées à l'assistance sociale et à la sécurité sociale. Sont notamment visées les activités fournies dans les maisons de retraite et les foyers logements, dès lors qu'en raison de leur mode de fonctionnement et de leur caractère social très marqué, le non-assujettissement de ces établissements n'est pas susceptible de provoquer des distorsions de concurrence, ainsi que l'exploitation des campings municipaux lorsqu'elle procure à la commune moins de 100 000 F de recettes annuelles ;
15 - l'hospitalisation, les soins médicaux ainsi que les activités qui leur sont étroitement liées ;
16 - les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à la protection de l'enfance et de la jeunesse ( crèches, centres de loisirs, centres de vacances) ;
17- les prestations sportives et culturelles. Sont concernés les droits d'entrée perçus au titre de l'exploitation d'une piscine, d'une patinoire, d'une bibliothèque, de musées, de monuments historiques, ainsi que les droits d'entrée perçus au titre de l'organisation d'expositions d'intérêt local et les recettes afférentes aux activités d'enseignement musical ou artistique.
18 - les prestations télématiques effectuées dans le cadre d'une mission de service public (ex. : service télématique d'information municipale).
2. Les activités pour lesquelles la concurrence doit être présumée et qui sont alors situées dans le champ d'application de la TVA.
19Il s'agit des activités qui sont par leur nature, leur étendue ou la clientèle à laquelle elles s'adressent et les moyens mis en oeuvre (publicité, tarifs pratiqués) en concurrence directe avec des entreprises commerciales qui proposent des services similaires.
Tel est le cas par exemple des recettes afférentes à l'exploitation d'un golf, d'un parc zoologique ou botanique, d'un parc d'attraction, d'une salle de spectacle ou de cinéma, d'établissements thermaux ou de thalassothérapie et d'organisation de spectacles de son et lumière ou de festival (musique, théâtre).
3. Les autres activités.
20Le régime de TVA applicable aux autres activités des personnes morales de droit public doit être apprécié au cas par cas compte tenu de la possibilité ou non pour le secteur privé de satisfaire les besoins concernés.
Tel est le cas par exemple des régies communales de pompes funèbres dont le monopole a été supprimé.
Lorsqu'une activité exercée par une personne morale de droit public n'est pas située hors du champ d'application de la TVA au regard des critères énoncés ci-dessus, elle est nécessairement située dans le champ d'application de la taxe c'est-à-dire soit taxée soit exonérée.
21Il convient en outre de souligner que les services de l'État doivent également acquitter la TVA lorsqu'ils réalisent des travaux d'études, de recherches, ou de conseils pour le compte de tiers, et notamment les collectivités locales. En effet, leur non-assujettissement entraînerait des distorsions de concurrence au détriment des bureaux d'études privés normalement soumis à l'impôt.
Il en est par exemple ainsi de certains concours techniques permanents (activités de gestion et de conseil technique pour les chambres de commerce et d'industrie) et occasionnels (missions de maîtrise d'oeuvre pour le compte des collectivités locales, d'établissements publics, de sociétés ou de particuliers) apportés par les services dépendant du ministère de l'Equipement et des Transports (ingénieurs de l'équipement) et du ministère de l'Agriculture (ingénieurs du génie rural et des eaux et forêts).
22L'imposition obligatoire de certaines catégories d'opérations et, notamment, des livraisons de biens neufs fabriqués en vue de la vente rend un certain nombre de services de l'État redevables de la TVA (Monnaies et Médailles, Imprimerie nationale, Manufactures nationales, etc.). En vertu du principe de concurrence, il en va de même par exemple des études effectuées par les services extérieurs de l'État pour le compte des collectivités locales ou de particuliers.
1 Loi n° 91-716 du 26 juillet 1991, art. 6.
2 Les locations d'emplacement sur la voie publique ne sont pas soumises à la TVA (cf. DB 3 A 1156, n° 8 ).