Date de début de publication du BOI : 10/08/1998
Identifiant juridique : 13O3232
Références du document :  13O3232

SOUS-SECTION 2 CONTENU DES DEMANDES

SOUS-SECTION 2

Contenu des demandes

1Toute demande au tribunal administratif doit contenir l'exposé des faits et moyens, les conclusions, les nom et demeure du requérant (C.TA-CAA, art. R 87).

Par ailleurs, le 2ème alinéa nouveau de l'article R 87 issu du décret n° 97-563 du 29 mai 1997, et entré en vigueur le 1er septembre 1997, précise que l'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours.

  A. INDIVIDUALITÉ DE LA REQUETE

2Aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit au contribuable de présenter une requête unique contre plusieurs décisions. Toutefois, dans certains cas, la jurisprudence a restreint la portée de ce principe. En effet, la présentation de plusieurs demandes -et non d'une demande unique- a été déclarée nécessaire. Les solutions retenues sont les suivantes :

1er cas. - Notification séparée de plusieurs décisions de l'Administration.

3Dans le cas de décisions notifiées séparément par l'Administration, la présentation d'une demande unique est valable, lorsque d'une part, les décisions en cause concernent des cotisations établies au titre des mêmes impôts ou visent des impositions assises sur les mêmes bases, et lorsque, d'autre part, la demande en cause est fondée sur des moyens identiques.

Des décisions du directeur notifiées séparément peuvent, lorsqu'elles concernent des cotisations établies au titre des mêmes impôts pour des années successives, être valablement attaquées devant la juridiction administrative par une demande unique fondée sur les mêmes moyens (CE, arrêt du 8 mars 1948, n° 82622, RO, p. 24, Leb. chron., p. 558).

La demande unique par laquelle une société a saisi le tribunal administratif d'un litige concernant l'impôt sur les sociétés, le prélèvement temporaire sur les suppléments de bénéfices et la contribution extraordinaire sur les bénéfices des sociétés, auxquels elle a été assujettie, doit -bien que l'impôt sur les sociétés d'une part, les autres impôts d'autre part, aient fait l'objet de réclamations distinctes et de deux décisions de rejet du directeur qui ont été notifiées séparément- être regardée comme recevable dans sa totalité dès lors que les conclusions concernant l'ensemble desdites impositions, lesquelles sont toutes assises d'après la même base, étaient assorties de moyens identiques (CE, arrêt du 21 février 1968, n° 70026, RJ, 2ème partie, p. 48).

4En revanche, n'est recevable qu'à l'égard de l'imposition qui s'y trouve mentionnée la première, la demande unique qui, formée devant le tribunal administratif contre des décisions notifiées séparément et concernant des impositions distinctes, est fondée, au surplus, sur des moyens différents pour chacune des cotisations en cause (CE, arrêt du 24 janvier 1966, n° 64452, RO, p. 31).

2ème cas. - Pluralité de contribuables.

5En pareil cas, la règle suivant laquelle les réclamations doivent être individuelles s'applique également aux demandes présentées devant les tribunaux administratifs.

Ainsi :

- les membres d'une société de fait ne peuvent, eu égard à la règle du secret des impôts sur le revenu, contester par une même requête, leurs cotisations de surtaxe progressive 1 , car ces dernières constituent, contrairement aux cotisations de taxe proportionnelle 1 , non pas des dettes sociales mais des dettes personnelles à chacun des associés. Il s'ensuit que la requête présentée collectivement par les intéressés est irrecevable, tant à l'égard de l'associé qui y est nommé le premier que des autres (CE, arrêt du 7 décembre 1966, n° 54065, RO, p. 297) ;

- la demande unique par laquelle un contribuable conteste à la fois l'impôt sur le revenu des personnes physiques établi à son nom et l'impôt sur les sociétés mis à la charge d'une société à responsabilité limitée dont il était le gérant, n'est recevable qu'à l'égard de l'impôt qui y est dénommé le premier, alors même qu'il existerait une corrélation entre les deux impositions visées dans la réclamation et que la société ayant été dissoute du fait que toutes les parts sociales s'étaient trouvées réunies entre les mains de l'intéressé, celui-ci serait ainsi devenu personnellement redevable de l'impôt sur les sociétés (CE, arrêt du 10 janvier 1964, n° 53859, RO, p. 5).

3ème cas. - Pluralité de communes concernées.

6Un contribuable peut valablement porter le litige devant le tribunal administratif par une demande unique notamment :

- lorsque, en matière d'impôts directs, le directeur a statué par une seule décision sur des réclamations distinctes visant des impositions établies dans deux communes différentes (CE, arrêt du 12 janvier1949, n° 98718, X... , RO, p. 129, Leb. chron., p. 667) ;

- lorsque, en matière de taxes sur le chiffre d'affaires, ledit contribuable demande la restitution de la taxe sur les prestations de services 2 acquittée dans trois communes différentes d'un même département, dès lors que cette demande présente à juger la même question, sans qu'il y ait à examiner des circonstances de droit ou de fait particulières à chacune de ces communes (CE, arrêt du 24 février 1967, n° 64756, RJ, 2ème partie, p. 50).

  B. INTÉRÊT

7Le défaut d'intérêt entraîne l'irrecevabilité de la requête. Ainsi, un contribuable ayant obtenu, par application de l'article 1758 du CGI 3 , le bénéfice du sursis à l'application de la fraction de la majoration qui excède le montant des intérêts de retard, n'est pas recevable à contester devant le juge de l'impôt le bien-fondé de ladite majoration dès lors que cette dernière n'a pas été mise en recouvrement (CE, arrêt du 27 octobre 1965, n°s 47556, 47557 et 55607, RO, p. 411).

  C. DÉSIGNATION DU REQUÉRANT - ÉLECTION DE DOMICILE

  I. Désignation du requérant

8La demande doit bien entendu comporter les indications indispensables pour identifier le requérant, c'est-à-dire son nom et l'adresse de sa résidence.

  II. Élection de domicile

1. Principe.

9En ce qui concerne la présentation des instances devant le tribunal administratif, le Code général des Impôts ne prévoit pas expressément pour le requérant domicilié hors de la métropole, l'obligation de faire élection de domicile en France, comme il l'édicte pour la réclamation préalable devant le service des Impôts (LPF, art. R* 197-5).

Cependant, dans le cadre des dispositions de droit commun, les parties non représentées devant un tribunal administratif qui ont leur résidence hors du territoire de la République française doivent faire élection de domicile dans le ressort de ce tribunal (C.TA-CAA, art. R 113) 4 .

2. Défaut d'élection de domicile.

10En ce qui concerne la réclamation préalable, l'obligation qui est faite aux contribuables domiciliés hors de la métropole d'élire domicile en France n'est pas prescrite à peine de nullité (CE, arrêt du 22 mai 1963, n° 46870, RO, p. 340) et la fin de non-recevoir qui résulte du défaut d'élection de domicile n'est pas d'ordre public et ne peut être soulevée d'office (CE, arrêt du 25 octobre 1963, n°s 52334 à 52336, RO, p. 424) [cf. 13 O 2134 ].

Le Conseil d'État a, d'autre part, jugé que l'obligation qui était faite à la partie domiciliée hors des départements du ressort du tribunal administratif de faire élection de domicile au siège du tribunal, par l'article 8 de la loi du 22 juillet 1889, n'avait pas pour effet de rendre irrecevable la demande présentée par une personne domiciliée hors du ressort du tribunal saisi (CE, arrêt du 12 juin 1967, n° 62781, RJ, 2ème partie, p. 138).

  D. EXPOSÉ DES FAITS, MOYENS ET CONCLUSIONS

11En précisant que la demande doit contenir explicitement l'exposé des faits, moyens et conclusions, l'article R 87 du C.TA-CAA fait une obligation au contribuable d'indiquer nettement dans son exposé les faits se rapportant au litige, les points sur lesquels porte la contestation, les motifs justifiant le bien-fondé de ses prétentions ainsi que l'objet réel de son instance.

Par suite, la demande ne peut se limiter à l'énoncé d'une ou plusieurs formules générales ou imprécises.

Mais il n'est pas nécessaire que l'enchaînement des différents points de la demande soit formulé expressément. Ainsi, des conclusions en décharge de pénalités ne sauraient être considérées comme non motivées dès lors qu'elles sont jointes à des conclusions motivées dirigées contre les droits en principal en proportion desquels lesdites pénalités sont calculées.

Par conséquent, les moyens invoqués à l'appui de conclusions dirigées contre les droits en principal doivent être regardés comme dirigés également contre les pénalités qui sont calculées en proportion de ces droits. D'où il suit qu'en l'absence de motivation propre aux pénalités :

- les conclusions en décharge des pénalités ne sauraient être écartées comme non motivées (CE, arrêt du 21 mars 1973, n° 82902, X... , RJ, n° IV, p. 41 et CE, arrêt du 28 novembre 1973, n° 84630, X... , RJ, n° IV, p. 121) ;

- le rejet des moyens concernant les droits en principal entraîne le rejet des conclusions relatives aux pénalités (ibid.).

Enfin, le 2ème alinéa nouveau de l'article R 87 du C. TA-CAA issu du décret n° 97-563 du 29 mai 1997, et entré en vigueur le 1er septembre 1997, précise que l'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours.

Doivent être considérées comme valablement motivées au sens de l'article R 87 du code précité :

- une demande portant instance devant le tribunal administratif dans laquelle le contribuable se borne à indiquer, en mentionnant expressément l'avis de dégrèvement qui lui a été notifié, que le dégrèvement qui lui a été accordé par le directeur est insuffisant (CE, arrêt du 12 janvier 1959, n° 41767, RO, p. 366 ; cf. toutefois ci-après CE, arrêt du 7 décembre 1966, n° 64115, RO, p. 296) ;

- une demande portant instance devant le tribunal administratif dans laquelle le contribuable se borne à faire valoir que « les motifs de la décision du directeur ne sont pas conformes à la réalité des faits » (CE, arrêt du 6 février 1956, n° 36641, RO, p. 29) ou que la décision de rejet du directeur ne tient pas compte de sa situation de fait (CE, arrêt du 12 janvier 1959, n° 44151, RO, p. 335 ; cf. toutefois ci-dessous CE, arrêt du 7 décembre 1966, n° 64115, RO, p. 296) ;

- une requête au tribunal administratif, dirigée contre la décision du directeur, qui, bien que ne contenant elle-même l'exposé d'aucun fait et l'énoncé d'aucun moyen, est accompagnée d'une copie de la réclamation primitive dans laquelle sont exposés les faits et moyens que l'intéressé entend invoquer et à laquelle il s'est expressément référé (CE, arrêt du 31 janvier 1979, n° 7408, RJ, n° IV, p. 5).

12 En revanche, le Conseil d'État a jugé irrecevable, comme insuffisamment motivée :

- une demande introductive d'instance ne contenant pas l'exposé des moyens exigés par l'ancien article 1940-2 du CGI dès lors qu'elle n'a pas été régularisée dans le délai prévu pour porter le litige devant le tribunal administratif (CE, arrêt du 7 mars 1953, n° 22159, RO p. 220) ;

- une demande dans laquelle, sans se référer aux moyens invoqués par lui dans sa réclamation initiale ou dans une précédente instance, le contribuable se borne à manifester son désir de « passer » devant le tribunal administratif (CE, arrêt du 20 juillet 1953, n°s 15143 et 15144, RO, p. 305, Leb. chron., p. 650) ;

- la demande dans laq.uelle le contribuable se borne à critiquer la législation en vertu de laquelle cette imposition est établie (CE, arrêt du 5 mars 1958, X... , RO, p. 81), à indiquer qu'il ne « doit rien » sans que cette affirmation soit précisée dans une pièce annexe permettant d'en apprécier la portée exacte (CE, arrêt du 11 janvier 1963, n° 46799, RO, p. 261) ;

- une demande introductive d'instance dans laquelle le requérant se borne à soutenir que le dégrèvement obtenu du directeur est nettement insuffisant et que la décision le lui accordant n'a pas fait une juste appréciation des faits. Ce vice de forme ne se trouve pas couvert par le fait que la décision contestée, qui était annexée à la demande, aurait contenu l'analyse des moyens invoqués dans la réclamation initiale (CE, arrêt du 7 décembre 1966, n° 64115, RO, p. 296 ; cf. toutefois ci-dessus CE, arrêt du 12 janvier 1959, n° 41767, RO, p. 336) ;

- la demande qui ne contient pas l'exposé des moyens même si l'Administration, après avoir opposé une fin de non-recevoir à la requête en a contesté le bien-fondé, cette circonstance ne pouvant avoir pour effet de couvrir le vice dont ladite demande se trouvait entachée (CE, arrêt du 28 juin 1968, n° 72067, X... , RJ, 2ème partie, p. 180) ;

- la demande dans laquelle un redevable qui conteste en la forme le titre de perception émis à son encontre se borne à affirmer que les prescriptions du CGI n'ont pas été respectées (CE, arrêt du 11 février 1970, n° 77787 : Sté Frantex-textiles, SARL, RJ, n° IV, p. 30).

13Au regard de l'ancien article 1915-2 du CGI 5 , ne pouvaient également être regardées comme suffisamment motivées :

- l'opposition par laquelle un redevable se bornait à affirmer que le titre de perception aurait été nul « comme portant sur des impôts et majorations qui n'étaient pas du » et n'aurait reposé « sur aucun élément de base sérieux » (CE, arrêt du 16 septembre 1955, n° 24348, X... ) ;

- l'opposition à titre de perception par laquelle un redevable se bornait à affirmer que « si l'on se réfère aux explications orales données par le vérificateur, les droits réclamés ne sont pas dus » (CE, arrêt du 2 mai 1957, n° 31280, société « Compagnie française de tourisme », BOCI, 1957, I, 187) ;

- l'opposition, qui se bornait à affirmer que les impositions étaient contestées dans leur totalité par le requérant, qu'ainsi les sommes réclamées n'étaient pas dues, que le requérant se réservait expressément d'exposer ses moyens plus amplement dans le mémoire qu'il déposerait au greffe du tribunal administratif (CE, arrêt du 6 mars 1961, n° 21201, X... ) ;

- la demande, ne contenant l'exposé même succinct d'aucun moyen propre aux impositions contestées par laquelle le redevable se borne à demander au tribunal administratif que son opposition au titre de perception soit jointe à l'instance précédemment introduite par lui devant le même tribunal pour obtenir décharge de contributions directes, en invoquant la circonstance que les taxes sur le chiffre d'affaires litigieuses ont été établies par référence au redressement antérieurement opéré à son encontre en matière d'impôts directs (CE, arrêt du 20 décembre 1967, n° 70224, SARL des Établissements A. Labbé, RJ, 2ème partie, p. 253).

1   Taxe supprimée par la loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959.

2   Taxe supprimée par la loi n° 66-10 du 6 janvier 1966.

3   Article abrogé par l'article 5-VII de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987.

4   L'article R 113 a été modifié par le décret n° 97-563 du 29 mai 1997 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er septembre 1997. Antérieurement, il était ainsi rédigé :

« Lorsque le litige est porté devant un tribunal administratif de la métropole, les parties non représentées qui ont leur résidence hors du territoire de la République française doivent faire élection de domicile dans le ressort de ce tribunal. Lorsque le litige est porté devant un tribunal administratif d'un département ou d'un territoire d'outre-mer, les parties non représentées et qui ont leur résidence hors du ressort de ce tribunal doivent faire élection de domicile dans ce ressort. »

5   Cet article précisait : « le redevable qui conteste le bien-fondé de la réclamation ou la quotité des sommes réclamées peut former opposition... L'opposition est motivée... ».