Date de début de publication du BOI : 07/06/1999
Identifiant juridique : 4B332
Références du document :  4B332

SECTION 2 REPORT DE TAXATION DE CERTAINES PLUS-VALUES

SECTION 2

Report de taxation de certaines plus-values

1Les articles 238 nonies à 238 undecies du CGI prévoient un report de la taxation des plus-values dégagées par l'aliénation ou l'apport en société de terrains non bâtis ou assimilés au sens de l'article 691 1 du même code dans les quatre cas suivants :

1° Cession à une collectivité publique (CGI, art. 238 nonies ) ;

2° Apport à une société civile de construction visée à l'article 239 ter (CGI, art. 238 decies-I ) ;

3° Apport à une société immobilière de copropriété visée à l'article 1655 ter (CGI, art. 238 decies-II ) ;

4° Cession rémunérée par la remise d'immeubles ou des fractions d'immeubles à construire sur le ou les terrains cédés (CGI, art. 238 undecies ).

2Ces dispositions ont pour but de différer la taxation pendant un certain délai, de telle sorte que l'entreprise cédante ou apporteuse, qui n'a pas la disposition immédiate des capitaux correspondant à la valeur du ou des éléments cédés ou apportés dans les conditions susvisées, ne se voit réclamer le paiement de l'impôt correspondant qu'à partir du moment où elle peut être réputée avoir les disponibilités nécessaires pour l'acquitter.

3On examinera l'économie de ces régimes en distinguant les conditions générales d'application des articles 238 nonies à 238 undecies du CGI, des dispositions qui sont spécifiques à chacun d'eux.

  A. CONDITIONS GÉNÉRALES D'APPLICATION DES ARTICLES 238 NONIES À 238 UNDECIES

  I. Régime applicable à compter du 1er janvier 1977

4En vertu de l'article 12-I de la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976 -codifié sous l'article 238 terdecies-applicable à compter du 1er janvier 1977, le report de taxation ne peut s'appliquer aux plus-values provenant d'opérations de cessions ou d'apport de terrains, non bâtis ou de biens assimilés, au sens de l'article 691 1 du CGI, intervenant :

- moins de deux ans après l'acquisition du bien ;

- ou qui, avant le 1er janvier 1982, relevaient du régime de l'ancien article 35 A du CGI 2 .

5En outre, lorsqu'il est applicable, le report de taxation ne peut, en aucun cas, excéder cinq ans. Ce délai de cinq ans se décompte à partir de la date de réalisation de la plus-value.

  II. Régime applicable jusqu'au 31 décembre 1976

6Ce régime est exposé dans la précédente édition de la DB 4 B 332 n° 7 à 9 , à jour au 15 juin 1991.

  B. DISPOSITIONS RÉSULTANT DES ARTICLES 238 NONIES À 238 UNDECIES

  I. Cessions de terrains à bâtir ou de biens assimilés consenties aux collectivités publiques (CGI, art. 238 nonies )

7Sous réserve de ce qui est dit ci-dessus aux numéros 5 et 6 en ce qui concerne les limitations apportées -à compter du 1er janvier 1977- au report de taxation, il résulte des dispositions de l'article 238 nonies du CGI que, lorsque l'acquéreur d'un terrain non bâti ou d'un bien assimilé, au sens de l'article 691 3 du même code, est une collectivité publique, la plus-value taxable réalisée à cette occasion par le cédant peut, pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, être rapportée, sur la demande expresse du redevable aux résultats de l'exercice au cours duquel l'indemnité a été effective-ment perçue.

8Cette disposition concerne toutes les mutations de biens réalisées au profit des collectivités expropriantes, sans distinguer selon que le transfert de propriété résulte d'une ordonnance du juge de l'expropriation ou d'un accord amiable. Elle consiste en un simple report de taxation ; par suite, la plus-value à retenir dans les bases de l'impôt doit être déterminée selon les règles applicables à l'exercice au cours duquel le droit à indemnité de l'ancien propriétaire est devenu certain dans tous ses éléments (cf. DB 4 A 242, n°s 32 et 33).

9Il est rappelé à cet égard qu'une entreprise expropriée devient titulaire d'une créance certaine dans son principe et dans son montant, soit à la date de la cession amiable, soit à la date du jugement qui a fixé l'indemnité d'expropriation.

10Le bénéfice de la mesure de report est subordonné à la production d'une demande expresse qui doit être jointe à la déclaration des résultats de l'exercice au cours duquel la plus-value serait normalement taxable et qui doit en indiquer les différents éléments de calcul.

11Lorsque l'indemnité est ultérieurement perçue, l'entreprise doit, bien entendu, porter le montant de la plus-value taxable sur la déclaration des résultats souscrite au titre de l'exercice correspondant en précisant, par une note jointe, l'origine de cette plus-value.

Cas particulier.- Consignation de l'indemnité d'expropriation .

12La consignation de l'indemnité d'expropriation peut intervenir dans différentes circonstances (art. R 13-65 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique), notamment :

- pour défaut de justification du droit à l'indemnité ;

- pour contestation par des tiers des droits de l'exproprié ;

- pour inscription sur le bien exproprié de privilèges ou hypothèques ;

- pour opposition à paiement ;

- pour défaut de constitution de caution, dans le cas de pourvoi en cassation émanant de l'exproprié ou de l'expropriant.

13Il y a lieu de considérer que l'exproprié a effectivement perçu l'indemnité d'expropriation lorsque la consignation est motivée par son refus de la recevoir (CE, arrêt du 14 novembre 1938, req. n° 58476, RO, p. 493, pris en matière d'encaissement de loyers).

14En revanche, dans les autres situations, l'indemnité n'est réellement perçue qu'au moment où son bénéficiaire en à l'entière disposition.

  II. Apport de terrains à bâtir ou de biens assimilés à une société civile de construction répondant aux conditions définies à l'article 239 ter du CGI

(CGI, art. 238 decies I )

1. Report de taxation des plus-values d'apport.

a. Économie du régime.

15Sous réserve de ce qui est dit ci-dessus aux n°s 5 et 6 , il résulte des dispositions particulières de l'article 238 decies-I du CGI que, dans le cas d'apport de terrains non bâtis ou de biens assimilés au sens de l'article 691 3 (faisant partie de l'actif immobilisé d'une entreprise industrielle et commerciale) à une société civile ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente et remplissant les conditions définies à l'article 239 ter du code précité, la plus-value correspondante n'est pas comprise immédiatement dans les résultats imposables de l'entreprise apporteuse.

16Sauf option de l'entreprise apporteuse pour la taxation immédiate (cf. ci-dessous, n°s 23 et 24 ) cette plus-value est rattachée aux résultats de l'exercice en cours à la date de la dernière cession, par la société de construction, des immeubles ou fractions d'immeubles construits par elle sur le terrain faisant l'objet de l'apport.

Toutefois, il est rappelé que, à compter du 1er janvier 1977, le différé d'imposition doit en tout état de cause être limité à cinq ans (CGI, art. 238 terdecies al. 2 ; cf. ci-dessus n° 6 ) ;

b. Evénements entraînant l'imposition des plus-values avant l'échéance du terme prévu à l'article 238 decies-I.

17Il y a lieu à imposition des plus-values avant l'échéance du terme prévu à l'article 238 decies-I du CGI :

- lorsque le contribuable n'entend pas bénéficier de cette disposition ;

- en cas de décès de l'apporteur ;

- en cas de cession par le redevable des droits reçus en rémunération de son apport ou des immeubles ou fractions d'immeubles reçus en représentation de ses droits.

1° Imposition immédiate de la plus-value d'apport.

18Les dispositions de l'article 238 decies-I du CGI n'ouvrent pas aux bénéficiaires la possibilité de choisir l'exercice de taxation des plus-values d'apport. Il est rappelé, toutefois, que ces mesures ont été prises en faveur des contribuables. Par suite, dans l'hypothèse où certaines entreprises estimeraient que le report de taxation leur est préjudiciable, elles peuvent y renoncer et demander à être imposées au titre de l'exercice de transfert de propriété.

19Dans ce cas, elles doivent joindre à la déclaration des résultats de l'exercice en cours à la date de l'apport une note exprimant sans équivoque leur désir qu'il soit tenu compte de la plus-value résultant dudit apport pour la détermination des résultats fiscaux de l'exercice considéré.

2° Imposition de la plus-value d'apport avant l'échéance du terme.

20Dans certaines situations, l'imposition de la plus-value est assurée sans attendre la dernière cession d'immeuble effectuée par la société de construction ou la date limite à laquelle le différé d'imposition est, en tout état de cause, soumis. Il en est ainsi :

- lorsqu'il s'agit d'une entreprise individuelle, en cas de décès de l'apporteur avant que la plus-value n'ait été rattachée aux bénéfices imposables ; celle-ci doit alors être comprise dans les bases de l'imposition immédiate à établir au titre de l'année du décès (CGI, art. 238 decies-I , 1 , al. 2) ;

- en cas de cession, par l'entreprise apporteuse, des droits sociaux reçus en rémunération de son apport ou des immeubles ou fractions d'immeubles reçus en représentation de ses droits ; dans ces hypothèses, la plus-value dégagée par l'apport du terrain est comprise dans les résultats de l'exercice en cours à la date des dernières cessions de droits sociaux ou d'immeubles effectuées par l'entreprise (CGI, art. 238 decies-I-2 ).

21Pour l'application de cette règle, il y a lieu de considérer que, lorsque le terrain apporté faisait partie de l'actif d'une entreprise individuelle qui vient à être cédée ou à cesser son exploitation avant que la plus-value d'apport n'ait été rapportée aux bénéfices imposables dans les conditions indiquées ci-dessus, l'apporteur doit être considéré comme ayant, du fait de cette cession ou cessation totale d'entreprise, cédé l'ensemble de ses droits sociaux ou des immeubles reçus en représentation de ses droits La plus-value précédemment dégagée par l'apport du terrain doit, par suite, être comprise dans les bases de l'imposition immédiate à établir en vertu des dispositions de l'article 201 du CGI.

22La plus-value d'apport dont la taxation a été précédemment différée doit également faire l'objet d'une imposition immédiate lorsque, l'entreprise apporteuse étant une personne morale, il y a lieu de lui appliquer les dispositions, soit de l'article 201, soit de l'article 221 (§ 2 , 2 ter ou 3) du CGI.

2. Régime fiscal applicable.

23Conformément aux dispositions du III de l'article 238 decies du CGI, lorsqu'une plus-value dégagée lors de l'apport d'un terrain a bénéficié du report de taxation prévu au I dudit article, elle doit être ultérieurement soumise au régime fiscal qui lui aurait été applicable, si elle avait été normalement imposée au titre de l'exercice de la réalisation de l'apport.

24En particulier, dans le cas où un exploitant individuel ou une société de personnes vient à passer d'un régime de bénéfice réel au régime du forfait (régime existant jusqu'en 1998) postérieurement à la réalisation d'un apport entrant dans les prévisions de l'article 238 decies-I du CGI, la plus-value correspondante doit, dans tous les cas, être assujettie à l'impôt selon les règles qui lui auraient été applicables si la taxation avait été assurée suivant les règles du bénéfice réel au titre de l'exercice de réalisation de l'apport.

  III. Apport de terrains à bâtir ou de biens assimilés à une société immobilière de copropriété visée à l'article 1655 ter du CGI (CGI, art. 238 decies-II )

25Par analogie avec les dispositions précédentes (cf. ci-dessus n°s 18 à 29 ) et sous réserve des mêmes conditions et limitations, communes aux différents cas de report de taxation (cf. ci-dessus n°s 5 et 6 ), l'article 238 decies-II du CGI accorde le bénéfice du report de taxation aux plus-values dégagées à l'occasion d'apports de terrains non bâtis ou de biens assimilés au sens de l'article 691 dudit code (transféré au A de l'article 1594-0 G par la foi de finances pour 1999) consentis à une société immobilière de copropriété dotée de la « transparence fiscale » et répondant à la définition de l'article 1655 ter du même code.

26La plus-value dont l'imposition a été différée en vertu des dispositions précitées doit, sous réserve d'une option expresse de l'entreprise pour une imposition immédiate, être rattachée aux résultats imposables de l'exercice en cours à la date de la dernière cession par l'entreprise des droits reçus en rémunération de son apport ou des immeubles ou fractions d'immeubles reçus en représentation de ces droits.

Toutefois, il est rappelé que, à compter du 1er janvier 1977, le différé d'imposition doit, en tout état de cause être limité à cinq ans (CGI, art. 238 terdecies , al. 2 ; cf. ci-dessus n° 6 ).

27Il est précisé, d'autre part, qu'aux termes mêmes de l'article 238 decies-II précité la cession est réputée porter sur la totalité du terrain ou du bien pour la détermination de la plus-value correspondante.

Il s'ensuit que la plus-value d'apport imposable doit être déterminée par différence entre, d'une part, la valeur totale pour laquelle le terrain ou le bien assimilé a été apporté à la société transparente et, d'autre part, la valeur comptable totale que ce terrain ou bien comportait dans les écritures de l'entreprise apporteuse 4 .

28Enfin, comme en matière d'apport à une société civile de construction, une imposition immédiate doit être établie, sans attendre l'une ou l'autre des deux échéances précitées, en cas de cession de l'entreprise apporteuse ou de cessation de l'exploitation. Il en est de même, lorsqu'il s'agit d'une entreprise individuelle, dans le cas de décès de l'exploitant.

29La même solution est applicable lorsque, l'apporteur étant une personne morale, il y a lieu de lui appliquer les dispositions, soit de l'article 201, soit de l'article 221, paragraphes 2, 2 ter ou 3 du même code.

Les modalités de déclaration et d'imposition ainsi que l'option pour l'imposition immédiate des plus-values en cause suivent les mêmes règles qu'en matière d'apport fait à une société civile de construction. Il en est de même dans le cas particulier du passage ultérieur de l'entreprise apporteuse sous le régime du forfait.

Pour ces diverses questions, il convient donc de se reporter aux commentaires correspondants (cf. ci-dessus n°s 20 à 24 ).

1   L'article 691 du CGI est transféré au A de l'article 1594-0 G du CGI (article 39 de la loi de finances pour 1999).

2   Article abrogé depuis le 1er janvier 1982 (loi n° 82-1126 du 29 décembre 1982, art. 7-II-A).

3   L'article 691 du CGI est transféré au A de l'article 1594-0 G du CGI par l'article 39 de la loi de finances pour 1999.

4   On rappelle, toutefois, que l'entreprise apporteuse peut, sur sa demande expresse, ne constater aucune plus-value imposable lors de l'apport, à la condition d'inscrire à son bilan les titres rémunérant l'apport pour la valeur comptable du ou des éléments apportés. Dans cette hypothèse, les locaux construits par la société immobilière et à la propriété ou à la jouissance desquels l'entreprise apporteuse a vocation doivent, en outre, être obligatoirement destinés -et ultérieurement affectés- par cette dernière à l'usage d'éléments de l'actif immobilisé (cf. ci-avant B 123, n° 24 )