Date de début de publication du BOI : 01/03/1995
Identifiant juridique : 4H1321
Références du document :  4H1321

SOUS-SECTION 1 SOCIÉTÉS IMMOBILIÈRES ET ASSIMILÉES

3. Règles particulières concernant les opérations de crédit-bail immobilier.

a. Amortissement des biens donnés en location.

75En principe, les règles d'amortissement de droit commun (régime linéaire ou régime dégressif) sont applicables aux immeubles des SICOMI. Il va de soi, cependant, qu'en raison de leur objet ces sociétés devraient pratiquer, en principe, l'amortissement linéaire.

Toutefois, pour tenir compte du fait que les opérations de crédit-bail sont avant tout un procédé de financement des investissements et que l'amortissement financier des fonds investis obéit à des règles quelque peu différentes, des mesures d'assouplissement ont été prises en faveur de ces sociétés.

Lorsque la durée d'utilisation des immeubles donnés en location dans le cadre d'une opération de crédit-bail excède vingt ans, elles peuvent effectuer l'amortissement fiscal de ces biens de manière que :

- la période de 40/50 ans soit ramenée à 30 ans ;

- la période de 30 ans soit ramenée à 25 ans ;

- la période de 25 ans soit ramenée à 20 ans.

Cependant si, dans de telles hypothèses, la durée de la location était en fait supérieure à respectivement 30 ans, 25 ans ou 20 ans, il conviendrait d'amortir les immeubles en cause sur la durée de la location.

De même, il a été décidé que ces sociétés ont la possibilité, au regard des biens faisant l'objet d'opérations de crédit-bail, d'opter pour le mode d'amortissement (linéaire, progressif ou dégressif) le mieux adapté à la nature de chaque opération.

Mais ces mesures d'assouplissement, qui sont rendues possibles par le fait que les sociétés de l'espèce bénéficient d'une exonération d'impôt sur les sociétés, sont limitatives et ne doivent pas avoir pour résultat de porter atteinte au régime général de l'amortissement. En particulier, le prix d'acquisition des terrains sur lesquels sont édifiés les immeubles ne peut faire l'objet d'un amortissement.

Il est rappelé que pour déterminer l'assiette de l'impôt sur les sociétés les SICOMI doivent pratiquer les amortissements des immeubles loués en location simple dans les conditions de droit commun.

En particulier, ces immeubles doivent, en principe, être amortis selon le mode linéaire. De plus, ils ne peuvent bénéficier de la réduction de la durée d'amortissement prévue exclusivement pour les immeubles loués en crédit-bail.

b. Régime institué par l'article 239 sexies du CGI.

76Les entreprises industrielles et commerciales qui ont recours au crédit-bail immobilier recherchent le plus souvent un contrat qui leur permette d'étaler entièrement sur la période de location la charge que représente leur investissement immobilier.

Pour répondre aux besoins de leurs clients, les SICOMI sont ainsi conduites à conclure des contrats qui prévoient, à l'issue de la période de location, un prix de cession de faible montant, inférieur à la valeur comptable du bien dans leurs écritures.

Dans cette hypothèse, les sommes versées périodiquement par le locataire correspondent, pour partie, au paiement du loyer proprement dit et, pour le reste, à des acomptes sur le prix de vente.

L'étalement du coût de l'investissement immobilier sur la durée de la location présente ainsi un inconvénient au regard de la réglementation des SICOMI. En effet, lorsque l'intégralité des sommes versées en cours de bail par le locataire est qualifiée de loyers, ces sociétés peuvent être amenées, pour satisfaire à l'obligation qui leur est faite de distribuer chaque année 85 % de leurs bénéfices, à répartir à leurs actionnaires une partie des loyers correspondant en réalité à des acomptes sur le prix de cession des immeubles donnés en location.

77Pour faciliter la réalisation des opérations de crédit-bail immobilier et améliorer le fonctionnement des SICOMI tout en protégeant leurs actionnaires, il a été décidé d'autoriser ces sociétés à constituer chaque année par prélèvement sur les recettes provenant de la location de chaque immeuble une provision destinée à couvrir la moins-value enregistrée en comptabilité à la fin du contrat lors de la cession éventuelle des immeubles.

78En contrepartie, la situation fiscale de l'entreprise locataire a fait l'objet d'aménagements pour éviter que la conclusion de tels contrats n'entraîne des conséquences critiquables.

En effet, si, après avoir compris le montant total des loyers dans ses charges déductibles pour la détermination de son bénéfice imposable, cette entreprise lève l'option d'achat prévue en sa faveur par le contrat de crédit-bail, tout se passe en fait comme si elle avait eu la possibilité d'amortir les biens achetés sur une période inférieure à leur durée normale d'utilisation et même tout ou partie du terrain qui, par nature, n'est pas amortissable.

En conséquence, les dispositions de l'article 239 sexies du CGI prévoient que le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les bénéfices de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés correspondant à la différence entre la valeur résiduelle de l'immeuble dans les écritures de la SICOMI et le prix auquel ledit locataire acquiert cet immeuble en vertu du contrat de crédit-bail. Cette imposition est la contrepartie des déductions excessives pratiquées en cours de bail au titre des loyers.

79Un régime plus libéral est, toutefois, prévu pour les contrats de crédit-bail d'une durée au moins égale à quinze ans. Dans cette hypothèse, seule la différence entre le prix de revient dans les écritures de la société bailleresse du terrain sur lequel l'immeuble a été édifié et le prix de cession de l'ensemble est rapportée aux bénéfices de l'acquéreur.

Les conséquences fiscales de ce régime sont les suivantes :

1° Situation des parties contractantes pendant la durée du bail.

- SICOMI.

80Les dispositions de l'article 239 sexies du CGI n'ont, en aucun cas, pour effet de porter atteinte aux règles générales de l'amortissement.

Les SICOMI restent donc tenues d'amortir leurs immeubles loués suivant le régime du droit commun, sauf à tenir compte des mesures d'assouplissement exposées ci-dessus (n° 75 ), étant observé qu'en ce qui concerne le prix d'acquisition des terrains aucun amortissement ne peut, bien entendu, être pratiqué.

En revanche, l'économie des nouvelles dispositions permet aux SICOMI qui récupèrent pendant la durée du bail sinon la totalité de leur investissement, du moins une fraction de cet investissement supérieure au montant comptabilisé de l'amortissement de l'immeuble, de constituer chaque année, par prélèvement sur les recettes provenant de la location dudit immeuble, une provision destinée à couvrir la moins-value que fera apparaître la cession de ce bien à l'issue du contrat de crédit-bail.

Le montant annuel de cette provision ne doit, à aucun moment, excéder la différence existant entre l'amortissement financier de l'investissement inclus dans le loyer fixé pour l'année en cause et l'annuité d'amortissement de l'immeuble calculée suivant les règles fiscales propres aux SICOMI.

Par dérogation aux règles du droit commun qui exigent que la perte correspondante soit probable et non simplement éventuelle, cette provision est admise en diminution du bénéfice fiscal servant de base au calcul du pourcentage minimum que les SICOMI sont tenues de distribuer chaque année à leurs actionnaires.

Mais, pour que la provision ainsi constituée soit déductible, il importe qu'elle soit effectivement constatée dans les écritures de l'exercice et qu'elle figure sur le relevé des provisions prévu à l'article 54 quinquies du CGI et compris dans l'ensemble des documents que les SICOMI sont tenues de produire chaque année à l'appui de la déclaration de leurs résultats.

- Entreprise locataire.

81Pour sa part, l'entreprise locataire est autorisée, pendant toute la durée du bail, à comprendre l'intégralité de ses versements périodiques de loyer dans ses charges déductibles pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés -ou de l'impôt sur le revenu (catégorie des bénéfices industriels ou commerciaux)- dont elle est redevable, sous réserve, bien entendu, que le montant du loyer proprement dit ne déguise aucun transfert de bénéfices au profit de la SICOMI.

2° Situation des parties contractantes lors du transfert de propriété.

- SICOMI.

82Lorsqu'au terme du bail -ou même en cours de bail- l'entreprise locataire lève l'option d'achat dans les conditions fixées par le contrat de crédit-bail, la moins-value éventuellement constatée dans les écritures de la SICOMI sur la cession de l'immeuble est normalement compensée par le montant de la provision constituée à cet effet.

D'autre part, ainsi qu'il résulte du second paragraphe de l'article 239 sexies du CGI, la SICOMI est tenue de fournir au locataire acquéreur ainsi qu'à l'administration, en fin de bail, les renseignements nécessaires permettant de déterminer le montant de la somme à réintégrer dans les bénéfices de l'acquéreur.

À cet effet, elle établit, en trois exemplaires, un état précisant :

a. L'identité de l'acquéreur (nom et adresse ou dénomination et siège social) ;

b. Le point de départ du contrat et la date effective de la cession ;

c. Le prix de revient de l'immeuble cédé en distinguant les éléments amortissables des éléments non amortissables ;

d. Le plan de l'amortissement financier de l'investissement et le prix de cession ;

e. Le tableau d'amortissement.

L'un des exemplaires est adressé au locataire acquéreur dans le délai d'un mois à compter de la date de la cession ; les deux autres sont transmis, dans le même délai, à l'inspecteur des impôts auprès duquel la SICOMI souscrit la déclaration de ses résultats. Ce dernier classe l'un des exemplaires dans le dossier de la SICOMI et transmet l'autre à son collègue qui détient le dossier de l'entreprise locataire et qui est chargé de s'assurer de la réintégration prévue par l'article 239 sexies du CGI.

- Entreprise locataire.

83• Réintégration à opérer par l'entreprise locataire.

En application des dispositions de l'article 239 sexies du CGI, lorsque le prix de cession de l'immeuble loué en crédit-bail est inférieur à la valeur résiduelle de cet immeuble dans les écritures de la SICOMI, l'entreprise locataire est tenue de réintégrer, dans ses bénéfices de l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés correspondant à la différence entre ladite valeur résiduelle et le prix de cession de l'immeuble.

La valeur résiduelle dont il s'agit s'entend de la différence entre le prix de revient de l'immeuble et le montant des amortissements pratiqués par les SICOMI, compte tenu des mesures d'assouplissement prises en faveur des sociétés de l'espèce quant à la durée d'utilisation du bien loué et au choix du mode de comptabilisation de l'amortissement (progressif, linéaire ou dégressif), c'est-à-dire, en fait, le montant des amortissements qui auraient été normalement admis en déduction pour la détermination du bénéfice fiscal de la SICOMI si cette dernière ne bénéficiait pas d'une exonération de l'impôt sur les sociétés.

Toutefois, lorsque la durée effective du crédit-bail est d'au moins quinze années, la réintégration à effectuer par le locataire est limitée à la différence entre le prix de revient du terrain sur lequel la construction a été édifiée et le prix de cession de l'immeuble.

Dans le cas où le locataire acquéreur est une entreprise relevant de l'impôt sur le revenu, le montant de la réintégration ainsi opérée dans le revenu imposable de l'année de la cession peut être assimilé à un revenu exceptionnel pour l'imposition duquel le contribuable peut demander l'application des modalités particulières d'étalement prévu à l'article 163 du CGI, à la condition, bien entendu, que le montant de ce profit dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels le contribuable intéressé a été soumis audit impôt au titre des trois dernières années.

84• Amortissement ultérieur de l'immeuble.

Lorsque le contrat de crédit-bail a été conclu pour une durée d'au moins quinze ans et que le locataire n'a pas levé, avant l'expiration de la quinzième année, l'option d'achat prévue en sa faveur, la réintégration éventuellement opérée ne représente, en réalité, qu'une fraction du prix du terrain.

Dans ce cas, le prix de cession augmenté du montant de la réintégration opérée correspond intégralement au prix de revient du terrain sur lequel les constructions ont été édifiées et l'acquéreur ne peut évidemment pratiquer aucun amortissement à raison de l'immeuble en cause.

En revanche, si la durée du bail est inférieure à quinze ans, le montant de la réintégration éventuelle correspond pour partie aux constructions ; dans cette hypothèse, l'acquéreur est autorisé à amortir ces constructions sur leur durée probable d'utilisation et pour la valeur comptable résiduelle qu'elles avaient dans les écritures de la SICOMI.

85• Cession ultérieure de l'immeuble.

La plus-value réalisée ultérieurement par l'acquéreur à l'occasion de la cession de l'immeuble doit être calculée d'après sa valeur fiscale dans les écritures de l'entreprise. La valeur fiscale dont il s'agit s'entend du prix de cession résultant du contrat de crédit bail, augmenté du montant de la réintégration opérée dans les bénéfices du locataire acquéreur, mais diminué des amortissements que ce dernier a été, le cas échéant, en mesure de pratiquer depuis l'acquisition.

Pour apprécier le caractère -à long terme ou à court terme- de cette plus-value, il convient de ne tenir compte que du temps écoulé depuis l'acquisition de l'immeuble par le titulaire du contrat de crédit-bail.

86• Exemple d'application.

Le mécanisme du régime particulier institué par l'article 239 sexies du CGI peut être illustré par l'exemple chiffré suivant.

Soit un contrat de crédit bail conclu entre une SICOMI et une sociéte anonyme. Ce contrat porte sur un bien immobilier d'une valeur totale d'un million de francs se répartissant à concurrence de 300 000 F pour le terrain et de 700 000 F pour les bâtiments, dont la durée normale d'utilisation est de vingt ans.

Première hypothèse. - On suppose que le contrat conclu pour quatorze ans prévoit le versement d'un loyer annuel de 120 000 F avec faculté pour le locataire d'acheter le bien loué pour 120 000 F à l'issue du contrat.

Pendant la durée de la location, le preneur comprend la totalité du loyer dans ses charges déductibles pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

Pour sa part, la SICOMI est autorisée à constituer une provision pour compenser la moins-value qu'elle enregistrera éventuellement à la levée de l'option, soit 390 000 F [investissement : 1 000 000 F - (amortissement : 14/20 de 700 000 F, soit 490 000 F + prix de cession : 120 000 F)]. Le montant de cette provision est déterminé chaque année par la différence entre l'annuité de l'amortissement du capital investi et l'annuité de l'amortissement fiscal des constructions.

Si, en fin de bail, le locataire lève l'option, il est imposé au titre de l'année d'acquisition sur la somme de 390 000 F correspondant à la différence entre la valeur comptable du bien dans les écritures de la SICOMI (1 000 000 F - 490 000 F d'amortissement = 510 000 F) et le prix de cession (120 000 F). Cette somme représente la part des loyers payés par le locataire qui correspond, en fait à tout ou partie du prix d'acquisition du bien et a été déduite des bénéfices imposables de l'intéressé pendant la durée du bail.

L'acquéreur est ensuite admis à amortir les constructions dans les conditions de droit commun, pour leur valeur résiduelle dans les écritures de la SICOMI, soit 210 000 F.

Deuxième hypothèse. - Le contrat est conclu pour seize ans, moyennant le versement d'un loyer annuel de 110 000 F. Au terme du bail, le locataire peut acquérir le bien pour le prix de 110 000 F. Comme dans la première hypothèse, le locataire déduit au cours du bail l'intégralité des loyers et la SICOMI provisionne la perte qu'elle subira éventuellement à la levée de l'option, soit 330 000 F (investissement :1 000 000 F - [amortissement : 16/20 de 700 000 F, soit 560 000 F + prix de cession : 110 000 F]).

Mais lorsqu'en fin de bail le locataire acquiert l'immeuble, il n'est imposé que sur la somme de 190 000 F correspondant à la différence entre le prix de revient du terrain (300 000 F) et le prix de cession (110 000 F). Il perd ainsi l'avantage que lui a procuré l'amortissement partiel du terrain (300 000 F - 110 000 F), mais, en revanche, l'acquéreur conserve, pour les bâtiments, le bénéfice de l'amortissement accéléré résultant du fait que cet amortissement a été calculé sur la durée du bail (seize ans) et non sur la durée d'utilisation des biens (vingt ans).

Dans cette hypothèse, la valeur fiscale de l'immobilisation pour l'acquéreur, soit 300 000 F (prix de cession : 110 000 F + réintégration : 190 000 F), correspond exclusivement au terrain et n'est pas susceptible d'amortissement.

87• Cas particulier des sociétés civiles immobilières.

Dans le cadre de l'objet qui leur est assigné, les SICOMI sont notamment autorisées à réaliser des opérations de crédit-bail par l'intermédiaire de sociétés civiles immobilières constituées exclusivement entre elles ou entre elles et les entreprises utilisatrices (cf. ci-dessus n°s 57 et suiv. ).

En principe, les contrats de crédit-bail conclus sous le couvert de ces sociétés civiles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 239 sexies du CGI. Dans ces conditions, il est précisé que ces contrats doivent toujours prévoir un prix de cession de l'immeuble ou des parts sociales au moins égal à la valeur résiduelle de l'immeuble, compte tenu des amortissements déductibles.

Toutefois, par analogie avec le régime résultant de l'article précité, il est admis que lorsque la durée du bail est d'au moins quinze ans ledit prix de cession peut être limité à la valeur d'origine du terrain dans les écritures de la société civile.