Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E2225
Références du document :  13E2225

SOUS-SECTION 5 CONFISCATION

18 h. Le sursis n'est pas applicable à la confiscation

En raison du caractère principal de réparation civile attaché à la confiscation, le sursis ne peut être appliqué à cette peine. L'article 1801 du CGI limite l'application du sursis à la partie des amendes (amende proprement dite et pénalité proportionnelle) excédant la somme servant de base au calcul de la pénalité proportionnelle, à l'exclusion de la confiscation, des frais et des peines accessoires ; La jurisprudence a toujours considéré que le bénéfice du sursis est expressément réservé par la loi aux peines d'emprisonnement et d'amende, et qu'il ne peut s'étendre à la confiscation (Cass crim, 17 juillet 1908, BCI, 17, Bull, crim., 316 ; 31 mai 1919, BCI, 19, Bull. crim., 130 ; 28 novembre 1962, RJCI, 35, p. 114, Bull. crim., 343), ou à l'amende représentant le montant de la confiscation (Cass. crim. 28 juin 1938, BCI, 21, Bull. crim., 1651

19 i. Les circonstances atténuantes peuvent être étendues à la confiscation.

Ayant le caractère de réparation civile, la confiscation a néanmoins, en même temps, le caractère de peine. Les circonstances atténuantes peuvent, sous certaines conditions et limites prévues par l'article 1800 du CGI être étendues à la confiscation.

L'article 1800 dudit code dispose en effet : « En matière de contributions indirectes et par application de l'article 463 du Code pénal, si les circonstances paraissent atténuantes, les tribunaux sont autorisés... à libérer le contrevenant de la confiscation, sauf pour les objets prohibés, par le paiement d'une somme que le tribunal arbitre.

Le minimum des condamnations encourues est fixé au tiers de la somme servant de base au calcul de la pénalité proportionnelle. Les tribunaux ne peuvent dispenser le redevable du paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues ».

Ainsi, lorsque la bonne foi d'un contrevenant est dûment établie, les tribunaux sont autorisés à le libérer de la confiscation par le paiement d'une somme laissée à leur appréciation, mais qui ne peut, en aucun cas, être inférieure à la limite ci-dessus visée. Aussi a-t-il été jugé qu'encourt la cassation l'arrêt qui libère complètement le contrevenant de la confiscation, nonobstant l'existence de droits fraudés ou compromis (Cass. crim., 26 mars 1920, BCI, 17 ; 28 octobre 1926, BCI, 1927, 1 ; 26 mars 1927, BCI, 10 ; 17 juin 1942, BCI, 64 ; 11 mai 1945, BCI, 10 ; 21 février1946, BCI, 22, Bull. crim., 65 ; 22 avril 1959, RJCI, 47). De même, encourt la cassation l'arrêt qui, par application des circonstances atténuantes, dispense purement et simplement le prévenu de la confiscation des boissons ayant circulé sous le lien d'un acquit-à-caution inapplicable, sous prétexte qu'il n'y avait pas de droits fraudés. En effet, les droits fraudés en cas de transport de boissons sans titre de mouvement ou avec un titre inapplicable, sont ceux résultant de l'application du taux légal aux quantités trouvées en situation irrégulière (Cass. crim., 21 février1946, BCI, 22, Bull. crim., 65).

20Enfin, dans une autre espèce, la Cour de cassation a précisé qu' « en ordonnant la confiscation des boissons dont la vente était interdite en dehors des repas », au motif que le fait de pouvoir les détenir à cette occasion « n'est pas susceptible d'empêcher l'application obligatoire d'une sanction prévue par une infraction déterminée », une cour viole l'article 1800 du CGI. Ce texte autorise en effet les juges répressifs, lorsque les circonstances paraissent atténuantes, à limiter les effets de la confiscation, laquelle ne saurait dès lors être l'objet d'une application obligatoire (Cass. crim., 24 juillet 1969, cass. partielle, RJCI, p. 77, Bull. crim., 236, p. 568).

  B. CONDITIONS ET ÉTENDUE DE LA CONFISCATION

  I. Nécessité d'une saisie préalable

21La confiscation ne peut être prononcée par le tribunal que si les verbalisants, lors de la constatation de l'infraction punie de cette peine, ont déclaré saisie des objets ou des produits sur lesquels porte la confiscation. Il est nécessaire, en outre, que le procès-verbal qui est établi par la suite mentionne cette déclaration de saisie.

Il est de jurisprudence constante qu'en matière de contributions indirectes, la saisie préalable - réelle ou fictive - des marchandises est la condition nécessaire de leur confiscation. Encourt, par exemple, la cassation, l'arrêt qui ordonne la confiscation des produits sucrants alors qu'il ne résulte d'aucune des énonciations du procès-verbal, base de la poursuite, que ces marchandises aient fait l'objet d'une saisie (Cass. crim., 4 juin 1958 RJCI, 66). Dans le même sens : Cass. crim., 30 avril 1909 BCI, 1911, 7, Bull. crim., 236 ; 25 novembre 1959, RJCI, 91, Bull. crim., 508. p. 985.

22 Exceptions. - Cependant, la confiscation peut être prononcée, même à défaut de saisie par procès-verbal aux fins fiscales, lorsque l'Administration poursuit, comme partie jointe à l'action du Ministère public, pour un fait constituant tout à la fois un délit de droit commun et une infraction fiscale passible de la confiscation ICass. crim., 15 novembre 1912, BCI, 1913 3, p. 12 ; 30 novembre 1934, BCI, 1935, 12 p. 143 ; 14 décembre 1955, BCI, 42, p. 235 ; 11 mai 1956, RJCI, 34, p. 336 ; 21 octobre 1965, RJCI, 25 p. 81, Bull. crim., 205, p 453).

La Cour de cassation a précisé que, « si en matière de contributions, un procès-verbal constitue le titre initial et nécessaire des poursuites et si, en pareil cas, la saisie est la condition indispensable de la confiscation, il n'en est pas ainsi lorsque le Tribunal correctionnel est appelé à statuer sur des faits qui, par cela même qu'ils réunissent les caractères d'infractions de droit commun donnant lieu à l'action du Ministère public, constituent en même temps des condamnations fiscales se confondant avec ces délits (Cass. crim. 4 avril 1973, RJCI, p. 38).

La preuve de ces contraventions et la détermination des objets sur lesquels doit porter la confiscation découlent dans ce cas des preuves offertes par le Ministere public, et l'Administration est alors dispensée de produire un procès-verbal constatant les contraventions et contenant les déclarations de saisie des objets sujets à confiscation ».

Cette jurisprudence semble devoir s'appliquer, alors même que l'action fiscale ne serait pas exercee par voie d'intervention au moyen de simples conclusions. Elle pourrait donc être invoquée lorsque l'Administration, joignant son action à celle du Ministère public, mais exerçant des poursuites sur la base d'un procès-verbal (ce qui était le cas de l'espèce), ce demier ne relate aucune déclaration de saisie (au cas particulier, le procès-verbal faisait mention d'une saisie régulièrement prononcée, mais la Cour de cassation a tenu à rappeler le principe en vertu duquel la confiscation peut, sous certaines conditions que précise l'arrêt, être ordonnée en l'absence même d'une saisie préalable).

23La saisie préalable des objets ou produits sur lesquels portera la confiscation, est constituée, normalement, par une saisie réelle des objets de fraude ; elle devient effective si la dépossession est matériellement réalisée. Elle peut être suivie de mainlevée, auquel cas le saisi conserve, sous certaines conditions, la possession des objets en cause. Enfin, la saisie peut être fictive, par exemple si les objets saisissables ont disparu.

1. Saisie réelle

24L'article R* 226-2 du LPF prévoit implicitement la saisie réelle des objets de fraude et des moyens de transport.

La saisie réelle est celle qui a été déclarée par les verbalisants alors qu'ils se trouvaient en présence des objets ou marchandises saisissables et qu'ils avaient la possibilité de s'en emparer.

Mais suivant que les saisissants décident soit d'appréhender ces objets ou ces marchandises, soit de les laisser à la disposition du prévenu sous certaines conditions, la saisie réelle est transformée en saisie effective ou en saisie réelle suivie de mainlevée.

a. Saisie effective

25La saisie réelle est effective lorsqu'elle comporte la mainmise des verbalisants sur les objets saisis et corrélativement la dépossession du contrevenant.

La saisie effective est obligatoire lorsqu'elle concerne :

- des objets prohibés ; sont notamment considérés comme des objets prohibés les appareils ou portions d'appareils propres à la distillation, à la fabrication ou au repassage d'eaux-de-vie ou d'esprits qui n'ont été ni déclarés, ni poinçonnés dans les conditions réglementaires. Ils doivent être détruits par les soins de l'Administration (CGI, art. 1825 B) ;

- des marchandises dont le commerce est réservé à l'Etat ;

- des objets dont l'utilisation par le prévenu est interdite (engins spéciaux pour dissimuler ou faciliter la fraude) ;

- des objets saisis sur inconnu.

Dans tous les autres cas, la saisie effective est facultative.

La saisie effective entraîne la constitution de gardiennage, le gardien pouvant être un agent des Impôts ou toute autre personne solvable qui accepte cette responsabilité. Il est cependant recommandé de déposer, si possible, les objets saisis dans un lieu sûr et sous la garde d'un dépositaire ayant l'agrément du saisi, afin d'éviter que l'Administration ne puisse être rendue responsable de leur dépérissement et condamnée, en application de l'article L 242 du LPF, à en payer leur valeur ou l'indemnité de leur dépérissement dans l'hypothèse ou lesdits objets devraient être remis au prévenu.

b. Saisie suivie de mainlevée.

26La saisie effective constitue, dans certains cas, une mesure rigoureuse susceptible de porter préjudice au prévenu. Elle peut avoir, en outre, des conséquences onéreuses pour le Trésor : en effet, indépendamment du cas de dépérissement prévu par l'article L 242 déjà cité (cf. n° 25 ), l'Administration peut, lorsque la saisie est déclarée mal fondée par le juge, être condamnée à des dommages intérêts (L 241 du LPF).

27Aussi est-il recommandé aux saisissants, pour ne pas entraver les opérations commerciales et ne pas exposer l'Administration aux revendications prévues par les articles L 241 et L 242, d'accorder la mainlevée de la saisie réelle toutes les fois que des garanties suffisantes sont fournies par le contrevenant dans les conditions exposées ci-après.

1° Conditions de la mainlevée

28L'offre de mainlevée n'est pas prévue par la loi. C'est une mesure de caractère administratif dont bénéficient les contrevenants considérés comme solvables ou offrant des garanties suffisantes.

Elle est subordonnée aux deux conditions suivantes :

- la saisie ne doit pas porter sur des objets prohibés ou ceux qui leur sont assimilés (cf. n° 25 , saisie effective obligatoire) ;

29- le contrevenant doit offrir l'une des garanties suivantes :

• soit la présentation d'une caution personnelle ou réelle suffisante ;

• soit le versement d'une consignation d'un montant égal à la valeur estimative des objets, appareils ou moyens de transport saisis ; toutefois, si les moyens de transport ont été saisis simplement en garantie de l'amende, le montant de la consignation doit être égal au maximum des pénalités encourues et non à la valeur du véhicule saisi ;

• soit la simple promesse enregistrée dans le procès-verbal, faite par le saisi, de représenter les objets saisis à toute réquisition ou à défaut, d'en payer la valeur telle qu'elle a été fixée, de gré à gré, dans cet acte, entre les deux parties.

30Dans ce cas, c'est une véritable convention qui intervient entre l'Administration et le délinquant, aux termes de laquelle les verbalisants, représentant l'Administration, laissent la libre disposition des objets saisis au contrevenant, lequel, en contrepartie, s'engage à les restituer à toute réquisition, ou bien à en verser la valeur fixée de gré à gré. Il va de soi que cette mainlevée qui ne repose sur aucune garantie réelle, ne doit profiter qu'au délinquant dont la solvabilité est certaine.

2° Estimation des objets saisis

Estimation de gré à gré,

31Au moment où ils donnent mainlevée, les saisissants doivent, de gré à gré avec le contrevenant, procéder à l'estimation de la valeur des objets saisis et mentionner cette valeur au procès-verbal.

L'estimation faite de gré à gré s'impose aux tribunaux qui ne peuvent, notamment, porter la valeur des objets confisqués à un chiffre supérieur à celui qui a été fixé d'accord avec le prévenu. Il est de jurisprudence constante que « lorsque les objets saisis ont été fixés de gré à gré entre les agents verbalisants et le prévenu, les juges ne peuvent modifier cette estimation, ainsi fixée par la convention des parties, que si, de ce chef, un incident contentieux s'est élevé devant eux et que s'ils justifient la modification par des motifs propres » (Cass. crim., 16 mars 1950, BCI, 16, p. 42, Bull. crim., 98). Dans le même sens : Cass. crim., 9 mai 1925, BCI, 1926, 1, p. 9, Bull. crim., 150 ; 18 novembre 1937, BCI, 1938, 1, p. 13, Bull, crim., 209 ; 7 janvier 1944, BCI, 6, p, 14 ; 28 novembre 1962, RJCI, 35, p. 114, Bull. crim., 343, p. 704 ; 17 janvier 1968, RJCI, p. 7, Bull. crim., 13, p. 27 ; 20 janvier 1971, RJCI, 1, p. 3.

32Cependant les juges ont la possibilité de modifier l'évaluation fixée de gré à gré dans le cas où, constatant que la bonne foi du prévenu est établie, ils décident de lui faire application des circonstances atténuantes (Cass. crim., 7 juillet 1943, BCI. 50).

33Mais, ils ne font qu'user du droit d'appréciation qui leur appartient lorsqu'ils rejettent la demande d'expertise sollicitée par un prévenu pour déterminer la valeur marchande d'un alambic saisi estimé de gré à gré avec les verbalisants (Cass. crim. 17 juin 1959, RJCI, 64).

34L'évaluation faite de gré à gré avec le préposé du propriétaire de la marchandise saisie en contravention s'impose au juge comme si elle avait été faite avec le propriétaire lui-même ; il a été jugé en effet qu'en rendant les propriétaires des marchandises responsables du fait de leurs facteurs, agents ou domestiques en ce qui concerne les droits, confiscations, amendes et dépens, l'article 1780 du CGI (devenu l'article 1805 du même code) a donné à ces préposés qualités nécessaire pour représenter leurs maîtres en tout ce qui tient à l'exécution des formalités prescrites par la loi en cas de saisie (Cass. crim., 28 novembre 1962, RJCI, 35, p. 114, Bull. crim., 343, p. 704 ; 17 janvier1968, RJCI, p. 7, Bull. crim., 13, p. 27 ; 20 janvier1971, RJCI, 1, p. 3).

Estimation d'office

35A défaut d'estimation de gré à gré avec les contrevenants, les verbalisants procèdent à une estimation d'office, mais cette estimation ne lie pas le tribunal qui conserve son pouvoir souverain d'appréciation (Cass. crim., 11 novembre 1943, BCI, 61, Bull. crim., 118).

L'appréciation par les juges du fond de la valeur des objets saisis, en vue de l'application de la confiscation, échappe au contrôle de la Cour de cassation. Ils n'ont pas à justifier cette appréciation par des motifs spéciaux. (Cass. crim., 15 février 1977, RJCI, p. 62).