Date de début de publication du BOI : 01/10/2001
Identifiant juridique : 7C1453
Références du document :  7C1453

SOUS-SECTION 3 ACQUISITIONS D'IMMEUBLES RURAUX PAR LES FERMIERS

2° Modes de preuve.

• Preuve de la location originaire et de son antériorité.

22La preuve de la location originaire et de son antériorité résultait obligatoirement de l'enregistrement du bail ou de la souscription d'une déclaration de location verbale depuis deux ans au moins.

La preuve de la location pouvait également être constituée par une cession de bail enregistrée ; le délai de deux ans commençait à courir à compter de la date de l'enregistrement de cette cession.

Les modalités de la preuve admise à l'égard de la continuité de l'exercice de jouissance (preuve par tous les moyens compatibles avec la procédure écrite, cf. ci-dessous n° 23 ) n'étaient pas applicables à la preuve de la qualité de fermier à défaut de bail initialement enregistré ou déclaré.

Des déclarations de locations verbales souscrites huit mois avant la date d'acquisition étaient donc inopérantes (Cass. com., arrêt du 13 décembre 1982, aff. époux X... , RJ. n° III, p. 69 ; dans le même sens, voir l'arrêt de la Cour de cassation du 23 avril 1985, aff. époux X... , RJ, p. 44).

Enfin, un tribunal, qui avait relevé que la déclaration de la location antérieurement consentie à l'acquéreur d'immeubles ruraux avait été souscrite moins de deux ans avant l'achat, ne pouvait, au motif que le paiement du droit de bail, effectué lors du dépôt de la déclaration, couvrait trois périodes annuelles d'imposition, accorder au fermier le bénéfice du régime de l'article 705 1 du CGI (Cass. com., arrêt n° 4 P du 3 janvier 1985, aff. consorts X... , RJ, p. 21).

• Preuve de la continuité de l'exercice du droit de jouissance.

23La preuve de l'absence de solution de continuité dans l'exercice du droit de jouissance peut être apportée par tous moyens compatibles avec les règles de la procédure écrite.

À cet égard, ne constituent des moyens de preuve compatibles avec la procédure écrite que les preuves tirées d'actes ou écrits ou encore les présomptions suffisamment graves, précises et concordantes. Sous réserve de l'examen de chaque cas particulier, il est admis de considérer comme probants les documents dont il n'existe aucune raison particulière de mettre en doute la sincérité, notamment en raison de leur origine ou de leur ancienneté et qui, d'autre part, sont suffisamment explicites quant à la nature du contrat et à l'identification des parcelles louées.

Les certificats délivrés par les caisses de mutualité sociale agricole peuvent, en règle générale, remplir ces deux conditions et, lorsqu'il en est ainsi, l'administration a pris pour règle de ne pas demander de justifications supplémentaires.

La valeur des autres documents doit être appréciée en fonction des circonstances de chaque affaire,

En particulier, les règlements par chèques, virements bancaires ou postaux ne pourraient justifier l'existence de la location que dans l'hypothèse, vraisemblablement exceptionnelle, où ils feraient référence à la nature du contrat et à l'identification des parcelles louées ; à défaut, ils devraient être corroborés par d'autres documents.

D'autre part, les quittances et attestations émanant du propriétaire, qui en sa qualité de vendeur est débiteur solidaire de l'impôt, ne peuvent bien entendu être considérées comme suffisantes à elles seules ; elles doivent être corroborées par d'autres pièces, telles que les déclarations souscrites en vue de l'assiette de l'impôt sur le revenu ou des relevés de comptes bancaires ou postaux constatant le versement des loyers et, le cas échéant, des cotisations agricoles, étant observé que l'absence d'adhésion du locataire à la caisse de mutualité sociale agricole laisse présumer une exploitation directe par le propriétaire. De même, les attestations de voisins n'ont, en matière de procédure écrite, que la valeur de présomptions simples et doivent, en principe, être confirmées par d'autres moyens de preuve.

S'agissant des bâtiments servant à l'habitation de l'exploitant, la preuve de la continuité de la location peut résulter du paiement de la taxe d'habitation ou de l'assurance incendie. Toutefois, le service serait en droit de refuser ou de revenir sur l'application du régime de faveur s'il était établi que les immeubles bâtis faisant l'objet de l'acquisition étaient précédemment occupés par l'acquéreur à un titre autre que celui de fermier et sans qu'aucun lien n'existe avec l'exploitation agricole correspondante.

b. Dispositions applicables postérieurement à l'intervention de l'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998.

24L'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998 a supprimé l'obligation, d'une part, d'enregistrer les baux écrits d'immeubles ruraux conclu à compter du 1 er janvier 1999, et d'autre part de déclarer les locations verbales pour la période d'imposition s'ouvrant à compter du 1 er janvier 1998. Dès lors, il y a lieu de considérer que l'exigence d'un enregistrement ou d'une déclaration de la mutation de jouissance cesse pour les baux écrits d'immeubles ruraux conclus à compter du 1 er janvier 1999 et pour les locations verbales conclues à compter du 1 er octobre 1998. Dans ces cas, la condition prévue au I du D de l'article 1594 F quinquies du CGI est satisfaite lorsque l'acquéreur apporte la preuve que l'immeuble est exploité en vertu d'un bail conclu depuis au moins deux ans au moment de l'acquisition.

Cette preuve est apportée par tous les moyens compatibles avec les règles de la procédure écrite, dans les conditions prévues par l'instruction du 30 décembre 1971 (BODGI 7 C-11-71, cf. annexe). En particulier, la production du bail enregistré dans les conditions prévues à l'article 739 du CGI établit l'antériorité de la conclusion du bail. Par ailleurs, en cas de location verbale conclue à compter du 1 er octobre 1998, le bailleur ou le preneur peuvent souscrire sur papier libre à la recette des impôts une déclaration qui identifie l'immeuble loué et les parties en cause. La date d'enregistrement de cette déclaration, qui revêt le caractère d'un acte innomé, sera admise comme constituant le point de départ du délai de deus ans.

En ce qui concerne les baux et locations conclus avant ces dates, les règles antérieures demeurent applicables. En particulier, les déclarations souscrites auprès de la recette des impôts en franchise de droit avant le 1 er octobre 1998 seront regardées comme constituant le point de départ du délai de deux ans des locations verbales. Néanmoins, la preuve de l'absence de solution de continuité des locations verbales pour la période postérieure au 1 er octobre 1998, et des baux écrits d'immeubles ruraux pour la période s'ouvrant postérieurement au 1 er janvier 1999 sera apportée par tous moyens compatibles avec les règles de procédure écrite (réponse à la question écrite n° 47410 posée le 12 juin 2000 par M. Jacques Le Nay, député).

3. Mesures d'application.

a. Mode de preuve des baux.

25Les différents modes de preuve admis pour établir que les conditions prévues au I du D de l'article 1594 F quinquies du CGI sont satisfaites sont récapitulées dans le tableau figurant ci-après.

b. autres mesures.

1° Autorisations de mise en culture.

26Pour permettre la mise en valeur des terres incultes récupérables ou manifestement sous-exploitées, l'article L 125-1 du code rural donne à toute personne physique ou morale la possibilité de demander au préfet l'autorisation d'exploiter une parcelle susceptible d'une mise en valeur agricole ou pastorale et inculte ou manifestement sous-exploitée depuis au moins trois ans (deux ans dans les zones de montagne) par comparaison avec les conditions d'exploitation des parcelles de valeur culturale similaire des exploitations agricoles à caractère familial situées à proximité, lorsque, dans l'un et l'autre cas, aucune raison de force majeure ne peut justifier cette situation. Une procédure est organisée pour constater l'état d'inculture ou de sous-exploitation manifeste. Le droit d'exploitation est accordé par le préfet après avis de la commission départementale des structures agricoles et de la commission départementale d'aménagement foncier.

Aux termes de l'article L 125-13 du code rural, l'autorisation d'exploiter peut être également accordée pour des parcelles dont le propriétaire actuel est inconnu et qui sont appréhendées par l'État comme biens présumés sans maître, conformément aux dispositions des articles L 27 bis et L 27 ter du code du domaine de l'État. En application de l'article 1er-II de la loi du 8 août 1962, l'aliénation de ces immeubles a lieu dans la majorité des cas sous forme de cession amiable au profit de l'exploitant du bien appréhendé (cf. BOED 1968 - 10313 - annexe IV).

Il a paru possible d'assimiler les autorisations de mise en culture accordées par le préfet à des baux, pour l'application des dispositions de l'article 1594 F quinquies D (ancien art. 705) du CGI. Les titulaires de ces autorisations peuvent, en conséquence, bénéficier, pour les acquisitions de ces immeubles, du régime de faveur édicté par ce texte si les autres conditions qu'il prévoit sont remplies.

2° Usufruit et droit d'usage.

27Pour ne pas soumettre l'usufruitier qui se rend acquéreur de la nue-propriété de l'immeuble rural, qu'il exploite à un régime fiscal plus rigoureux que celui du fermier et sous réserve de l'examen des situations particulières, il a paru possible d'admettre l'application dans ce cas des dispositions de l'article 1594 F quinquies D (ancien art. 705) du CGI. L'acquéreur devra justifier par tous moyens de preuve compatibles avec la procédure écrite qu'il exploite effectivement depuis deux ans au moins les biens dont il acquiert la nue-propriété et prendre l'engagement prévu au I-2° de l'article susvisé.

28Il en est de même lorsque l'acquisition porte sur un bien sur lequel l'acquéreur bénéficiait d'un droit d'usage.

  II. Engagement d'exploiter

29L'acquéreur ou, le cas échéant, l'enfant installé, doit s'engager dans l'acte d'acquisition, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, à exploiter personnellement les immeubles objets de la mutation pendant un délai minimal de cinq ans à compter de la date du transfert de propriété.

30L'acquisition par le fermier du bâtiment d'habitation et par son fils du surplus des biens affermés, c'est-à-dire la scission des terres et du bâtiment d'habitation ne permet pas à l'acquéreur du bâtiment de respecter cette condition et, par suite, de bénéficier du taux réduit de la taxe de publicité foncière (R.M. Raynal, JO. déb., AN, 5 mars 1990, p. 998, n° 20234).

31Il convient d'observer que l'acquéreur s'engage non seulement pour lui et ses héritiers mais aussi pour les légataires ou donataires entre vifs ou à cause de mort qu'il a institués. Il s'ensuit, notamment, que la donation des immeubles acquis intervenant moins de cinq ans après leur acquisition n'est pas susceptible d'entraîner la déchéance du régime de faveur, si le gratifié continue à mettre personnellement en valeur les biens considérés.

32L'acquisition d'immeubles ruraux par une société est susceptible de bénéficier du régime de faveur lorsque les conditions édictées par l'article 1594 F quinquies D (ancien art. 705) du CGI sont réunies. Dans ce cas, la société se borne à prendre l'engagement de mettre personnellement en valeur les biens acquis pendant un délai minimal de cinq ans à compter de la date du transfert de propriété, dès lors qu'elle ne peut prendre cet engagement pour ses ayants cause à titre gratuit.

  E. DÉCHÉANCE DU RÉGIME DE FAVEUR

  I. Principes

33Deux causes de déchéance sont prévues :

- la cessation par l'acquéreur ou ses ayants cause à titre gratuit -ou le cas échéant par le descendant installé- de l'exploitation personnelle du fonds, dans le délai de cinq ans à compter de la date de son acquisition ;

- l'aliénation à titre onéreux, dans le même délai, de la totalité ou d'une partie du fonds.

  II. Cas particuliers d'application

1. Cession de parts de GFA, GAEC, EARL ou SCEA remises en contrepartie de l'apport du bien.

34La déchéance du régime de faveur, non remis en cause lors d'apports à des GFA, GAEC, EARL ou SCEA (cf. ci-dessous n os40 et suiv. ) est encourue lorsque les parts reçues en rémunération de l'apport font l'objet d'une vente ou d'un échange dans le délai restant à courir entre la date de l'apport et l'expiration du délai de cinq ans suivant la date du transfert de propriété initial.

2. Location du bien.

35La location du bien mettant fin à l'exploitation personnelle du fonds par l'acquéreur entraîne, en principe, la déchéance du régime de faveur (cf. toutefois ci-dessous, n os46 à 49 ).

3. Apport en jouissance à une société créée de fait.

36L'apport en jouissance de biens acquis avec le bénéfice de la taxation réduite prévue à l'article 1594 F quinquies D (ancien art. 705) du CGI à une société créée de fait met fin à l'engagement d'exploiter personnellement pris par l'acquéreur. Le régime de faveur cesse de s'appliquer de plein droit puisqu'en droit fiscal cette société est traitée comme une société dotée de la personnalité morale.

  III. Exceptions

1. Force majeure.

37Tout d'abord, aucun des deux motifs de déchéance ne produit d'effet lorsqu'il procède d'un cas de force majeure, c'est-à-dire, d'après la jurisprudence de la cour de cassation, d'un événement imprévisible, insurmontable et totalement étranger au fermier acquéreur à la condition qu'il ait un lien de causalité directe avec le non-respect de l'engagement.

La question de savoir si l'on se trouve ou non en présence d'un cas de force majeure est une question de fait qui ne peut être résolue qu'après examen de l'ensemble des circonstances propres à chaque affaire.

2. Aliénation à un descendant ou au conjoint d'un descendant de l'acquéreur.

38L'aliénation à titre onéreux ou la location du fonds, même non motivée par un cas de force majeure, n'entraîne pas la déchéance du régime de faveur :

- lorsqu'elle est consentie à un descendant ou au conjoint d'un descendant de l'acquéreur, qui s'engage lui-même à continuer l'exploitation personnelle du fonds jusqu'à l'expiration du délai de cinq ans à compter de la date de l'acquisition initiale ;

- lorsqu'elle est consentie au descendant pour l'installation duquel l'acquisition a été réalisée.

1   Actuellement, art. 1594 F quinquies D du CGI.