B.O.I. N° 210 DU 17 NOVEMBRE 1999
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
4 F-2-99
N° 210 DU 17 NOVEMBRE 1999
4 F.E./32
INSTRUCTION DU 8 NOVEMBRE 1999
DISPOSITIONS PARTICULIERES - SOCIETES DE PERSONNES ET ASSIMILEES - REGLES GENERALES
D'IMPOSITION - DEMEMBREMENT DE LA PROPRIETE DES PARTS OU DROITS SOCIAUX (ARTICLE 78 DE LA
LOI N° 98-546 DU 2 JUILLET 1998 PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ORDRE ECONOMIQUE ET FINANCIER).
(C.G.I., art. 8)
NOR : ECO F 9910096J
[Bureau B 1]
ECONOMIE GENERALE DE LA MESURE
En application de l'article 8 du code général des impôts, les associés ou membres de sociétés de personnes et assimilées sont soumis à l'impôt pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété des parts détenues par les associés ou membres de ces sociétés ou groupements assimilés, cet article, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998, conduisait à imposer le nu-propriétaire des droits sociaux sur la totalité de la quote-part de résultat afférent à ses parts (RM à M. VALLEIX, JO, Débats AN, du 23/12/1996, p. 6735). L'article 78 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a modifié l'article 8 déjà cité en prévoyant une répartition de la charge fiscale entre l'usufruitier et le nu-propriétaire des droits sociaux dont la propriété est démembrée. L'impôt est désormais établi au nom de l'usufruitier des parts en cause à hauteur des droits que lui confère sa qualité d'usufruitier. Cette fraction des bénéfices n'est pas imposée entre les mains du nu-propriétaire des parts sociales en cause. En pratique, l'usufruitier des parts est imposable à hauteur des bénéfices courants de l'exploitation et le nu-propriétaire à hauteur des profits exceptionnels. Ce dernier peut également déduire la quote-part des déficits réalisés par la société correspondant à ses droits. Toutefois, l'usufruitier et le nu-propriétaire de droits sociaux démembrés peuvent décider d'une répartition conventionnelle des résultats sociaux. Cette répartition est opposable à l'administration fiscale dès lors qu'elle procède d'une convention licite et a été conclue ou insérée dans les statuts avant la clôture de l'exercice aux termes d'un acte régulièrement enregistré. Les dispositions de l'article 78 déjà cité ont un caractère interprétatif. • |
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INTRODUCTION
1.En application des dispositions de l'article 8 du code général des impôts, le résultat réalisé par une société de personnes est immédiatement imposé au nom des associés présents à la clôture de l'exercice, au prorata de leurs droits sociaux, indépendamment des flux financiers existant entre la société et les détenteurs des parts sociales.
2.Ainsi, en cas de démembrement des parts d'une société relevant du régime fiscal des sociétés de personnes entre un usufruitier et un nu-propriétaire, celui-ci, qui est le seul à posséder la qualité d'associé, devait, en principe, être soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des résultats sociaux correspondant à ses droits dans la société. L'usufruitier n'était pas imposable sur les résultats réalisés par la société de personnes, bien qu'il bénéficie en pratique d'un flux régulier de revenu correspondant à tout ou partie des bénéfices sociaux (Réponse ministérielle à M. VALLEIX, JO, Débats AN, du 23 décembre 1996, p. 6735).
3.L'article 78 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier aménage les conditions d'application du régime fiscal des sociétés de personnes prévu à l'article 8 déjà cité, en cas de démembrement de la propriété des parts d'une société de personnes.
4.Dans sa nouvelle rédaction, l'article 8 précité institue un partage de l'imposition entre l'usufruitier et le nu-propriétaire. L'usufruitier est imposable pour la quote-part dans les bénéfices sociaux correspondant à ses droits. Corrélativement, le nu-propriétaire n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l'usufruitier. Ainsi, l'usufruitier est, en pratique, imposable à hauteur des bénéfices courants de l'exploitation et le nu-propriétaire à hauteur des profits exceptionnels. Celui-ci peut également prendre en compte la quote-part des déficits de la société correspondant à ses droits.
5.Toutefois, l'usufruitier et le nu-propriétaire de droits sociaux démembrés peuvent décider d'une répartition conventionnelle des résultats sociaux opposable à l'administration fiscale à condition qu'elle ait été conclue ou insérée dans les statuts avant la clôture de l'exercice aux termes d'un acte régulièrement enregistré, ayant date certaine (cf. n os18 et 19 ).
6.Sauf mention contraire, les articles cités sont ceux du code général des impôts et de ses annexes.
SECTION 1
Champ d'application
7.Les dispositions de l'article 78 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier s'appliquent à l'ensemble des sociétés ou groupements qui relèvent du régime fiscal des sociétés de personnes et dont le capital est divisé en parts ou droits sociaux ayant fait l'objet d'un démembrement de propriété, sans qu'il soit nécessaire de distinguer selon l'origine de ce démembrement (convention, dévolution successorale...).
8.Il s'agit, lorsqu'elles n'ont pas opté pour l'impôt sur les sociétés :
• des sociétés en nom collectif ;
• des sociétés en commandite simple pour la part des résultats revenant aux commandités ;
• des sociétés en participation, à raison des droits des associés indéfiniment responsables et dont les noms et adresses ont été communiqués à l'administration ;
• des sociétés à responsabilité limitée dont l'associé unique est une personne physique (EURL) ;
• des exploitations agricoles à responsabilité limitée mentionnées au 5° de l'article 8 ;
• des sociétés civiles mentionnées au 1° de l'article 8 (y compris les sociétés civiles professionnelles).
9.Il s'agit également :
• des sociétés à responsabilité limitée (SARL) et des sociétés en commandite simple de caractère familial ayant opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes en application du décret du 20 mai 1955 ;
• des SARL de famille soumises au régime fiscal des sociétés de personnes en vertu de l'article 239 bis AA ;
• des sociétés civiles ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente (art. 239 ter) ;
• des groupements d'intérêt économique (CGI, art. 239 quater) ;
• des groupements européens d'intérêt économique (CGI art. 239 quater C) ;
• des groupements d'intérêt public (CGI, art. 239 quater B) ;
• des sociétés civiles de moyens (CGI, art. 239 quater A) ;
• des sociétés de copropriétaires de navires, de chevaux de course ou d'étalons ;
• des sociétés de fait ;
• des indivisions.
SECTION 2
Modalités de répartition de l'imposition entre le nu-propriétaire et l'usufruitier de droits sociaux
10.Le nouveau dispositif ne remet pas en cause le principe selon lequel, dans les sociétés de personnes et assimilées, la part des bénéfices sociaux qui revient à chacun des associés doit être regardée comme étant acquise dès la clôture de chaque exercice même si, à cette date, elle n'a pas été effectivement attribuée.
11.La répartition de l'imposition des résultats entre l'usufruitier et le nu-propriétaire ne modifie pas ce principe et les décisions d'affectation du résultat n'ont aucune incidence sur l'imposition établie à la clôture de l'exercice au nom du nu-propriétaire comme de l'usufruitier.
A. SITUATION DE L'USUFRUITIER
12.Les dispositions de l'article 8 modifié permettent désormais de prendre en compte les droits financiers détenus par l'usufruitier pour l'assujettir à l'impôt sur le revenu.
Compte tenu de la nature juridique de l'usufruit qui correspond à ce qui naît de la chose sans en altérer la substance (code civil, art. 578), les droits dans les bénéfices conférés par la qualité d'usufruitier correspondent, en l'absence de convention régulière prévoyant une répartition particulière des résultats entre usufruitier et nu-propriétaire, au bénéfice courant de l'exercice. Cette notion exclut donc les éléments exceptionnels et, notamment, les plus ou moins-values de cession d'éléments de l'actif immobilisé.
13.A cet égard, certains produits doivent être considérés comme des éléments du résultat courant de l'exercice même s'ils bénéficient du régime des plus-values à long terme. Il en est ainsi du résultat net de la concession de licence d'exploitation de brevets, d'inventions brevetables et de procédés de fabrication industriels (art. 39 terdecies 1). De même, les plus-values de cession de valeurs mobilières de placement, qui ne constituent pas des éléments de l'actif immobilisé, sont imposables au nom de l'usufruitier.
A l'inverse, les plus-values taxées au taux normal ne sont pas imposables au nom de l'usufruitier si elles procèdent de la cession d'éléments de l'actif immobilisé (cas des biens amortissables).
B. SITUATION DU NU-PROPRIETAIRE
14.Sauf convention contraire régulièrement conclue avec l'usufruitier, le nu-propriétaire supporte l'impôt à raison des résultats qui ne sont pas imposés au nom de l'usufruitier, c'est-à-dire, en pratique, à raison des résultats exceptionnels. Il est également fondé à prendre en compte une quote-part des déficits réalisés par la société correspondant à ses droits dès lors qu'en sa qualité d'associé, il est le seul à répondre des dettes de la société.
I. Eléments exceptionnels
15.Le nu-propriétaire est imposable sur le résultat net des cessions des éléments composant l'actif immobilisé (plus ou moins-values nettes à long terme ou à court terme), à l'exclusion par conséquent des profits sur cession d'éléments de l'actif circulant (stocks, valeurs mobilières de placement).
II. Imputation du déficit d'exploitation
16.La prise en compte des déficits fiscaux réalisés par la société revient de droit au nu-propriétaire qui, en tant qu'associé, doit répondre des dettes sociales.
17.Toutefois, la fraction des amortissements que la société a comptabilisés en période déficitaire et qui ont été réputés différés sur le plan fiscal, ne peut pas être imputée sur les résultats propres de chaque associé mais entre en compte sans limitation de durée pour la détermination des bénéfices réalisés par la société au titre du ou des premiers exercices bénéficiaires.
Dans l'hypothèse où la société constitue au titre d'un exercice des amortissements réputés différés (ARD), ceux-ci sont susceptibles de bénéficier à l'usufruitier ou au nu-propriétaire selon que les bénéfices sur lesquels ils sont imputés (bénéfice fiscal ou plus-value nette à long terme) ont vocation à revenir à l'un ou à l'autre.
C. CAS PARTICULIER DES CONVENTIONS REGULIERES CONCLUES AVANT LA CLOTURE DE L'EXERCICE
18.Dans une société de personnes, la répartition des résultats est déterminée par le pacte social, à défaut de convention, actes ou libéralités contraires passés avant la date de clôture de l'exercice, entre les seuls associés (cf. RM PERICARD, député, JO, Débats AN du 30 août 1993, p. 2707).
19.En cas de démembrement de la propriété des droits ou parts sociales, la répartition du résultat est établie en prenant en compte les droits financiers de l'usufruitier, qui correspondent en pratique au bénéfice courant de l'exploitation (cf n°s 12 et s. ). Cette répartition peut également résulter d'une convention conclue avant la clôture de l'exercice entre le nu-propriétaire et l'usufruitier ou d'un acte modifiant avant cette date les statuts. De même, une convention peut déterminer une répartition entre le nu-propriétaire et l'usufruitier de la charge correspondant à la mise en oeuvre de l'obligation de comblement des pertes.
20.Pour être opposables à l'administration, de tels actes ou conventions doivent être régulièrement conclus et enregistrés avant la clôture de l'exercice. Ils doivent être conformes aux dispositions du code civil et notamment à ses dispositions relatives aux droits de l'usufruitier (articles 582 à 599 du code civil).
21.Dans l'hypothèse où de tels actes ou conventions entraînent une mutation de propriété, l'administration serait fondée à en tirer les conséquences en matière de droits de mutation à titre gratuit. En outre, s'il apparaissait que de telles conventions n'ont été conclues que dans le but d'éluder l'impôt, le service serait en droit d'appliquer la procédure de répression des abus de droit prévue par les dispositions de l'article L 64 du livre des procédures fiscales.