Date de début de publication du BOI : 23/02/2006
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 34 du 23 FÉVRIER 2006


Section 5 :

Articulation de la procédure amiable avec les autres procédures et recours


  1. Articulation de la procédure amiable avec la procédure de vérification

195.La procédure amiable est totalement indépendante des procédures internes de contrôle et de vérification. Dès lors, quand une procédure amiable est ouverte, ces procédures doivent suivre leur cours normal. Toutefois, s'agissant de la mise en recouvrement de ces redressements, une procédure particulière est prévue par l'article L189 A du livre des procédures fiscales pour les procédures amiables ouvertes depuis le 1 er janvier 2005 (cf. paragraphes 95 et suivants ).

  2. Articulation avec les recours administratifs ou juridictionnels tendant à contester les impositions

a) Dans le cadre des conventions fiscales bilatérales

196.En principe, les conventions fiscales bilatérales stipulent, sur le modèle de convention de l'OCDE (article 25, paragraphe 1) qu'une procédure amiable peut être demandée « indépendamment des recours prévus par le droit interne » des Etats. Il en résulte qu'un contribuable peut exercer en même temps les recours administratifs et juridictionnels prévus par la loi interne et solliciter l'ouverture de la procédure amiable prévue par la convention fiscale. Seul l'exercice des recours administratifs et juridictionnels permet au contribuable d'éviter la forclusion éventuelle de ses droits en la matière.

197.Si la procédure amiable permet de trouver une solution éliminant la double imposition avant qu'une juridiction ne se soit prononcée sur le recours, l'exécution de l'accord est subordonné au désistement de toute instance contentieuse interne, de façon à éviter tout conflit.

198.Lorsque l'affaire a donné lieu à une décision juridictionnelle définitive, l'ouverture de la procédure amiable reste possible. Toutefois, du côté français, il va de soi qu'elle ne saurait avoir pour résultat d'aggraver la situation du contribuable par rapport à la décision intervenue. En outre, dans leur traitement de la procédure, les deux autorités compétentes prendront nécessairement en compte le fait qu'une décision juridictionnelle définitive est intervenue.

199.Si une juridiction se prononce sur le recours après qu'une solution amiable a été trouvé entre les Etats, l'exécution de l'accord amiable ne sera possible que si le contribuable renonce au bénéfice de la chose jugée.

b) Dans le cadre de la convention européenne d'arbitrage

200.Comme en matière de conventions fiscales bilatérales, la convention européenne d'arbitrage stipule que les entreprises qui demandent l'ouverture de la procédure amiable peuvent utiliser les possibilités de recours prévues par le droit interne des Etats contractants concernés (article 7, paragraphe 1, 2 ème alinéa). Le contribuable est donc habilité à demander l'ouverture de la procédure amiable prévue par la convention, parallèlement aux recours administratifs ou juridictionnels prévus par la réglementation ou la législation interne, qu'il peut engager par ailleurs.

201.La convention européenne d'arbitrage précise dans son article 13 que l'existence de décisions prises à titre définitif par les Etats concernés au sujet de l'imposition des bénéfices ne fait pas obstacle au recours aux procédures amiables.

202.En revanche, si la procédure amiable permet de trouver une solution satisfaisante pour le contribuable avant que le juge ait statué sur un recours qui lui a été soumis, l'exécution de l'accord est subordonné au désistement de toute instance contentieuse interne, de façon à éviter tout conflit.

203.Le délai de deux ans prévu pour la procédure amiable (cf. infra) ne court qu'à compter du désistement de tout recours de droit interne.

204.Lorsque l'affaire a donné lieu à une décision juridictionnelle définitive, l'ouverture de la procédure amiable reste possible. Toutefois, du côté français, il va de soi qu'elle ne saurait avoir pour résultat d'aggraver la situation du contribuable par rapport à la décision intervenue. En outre, dans leur traitement de la procédure, les deux autorités compétentes prendront nécessairement en compte le fait qu'une décision juridictionnelle définitive est intervenue.

205.Si une juridiction se prononce sur le recours après qu'une solution amiable a été trouvée entre les Etats, l'exécution de l'accord amiable ne sera possible que si le contribuable renonce au bénéfice de la chose jugée.

206.Par ailleurs, un report du point de départ du délai de deux ans prévu en principe pour la procédure amiable s'applique dès lors qu'un recours de droit interne est exercé.

  3. Articulation des procédures amiables bilatérales avec la procédure amiable prévue par la convention européenne d'arbitrage

207.Une entreprise peut demander simultanément l'ouverture d'une procédure amiable dans le cadre d'une convention fiscale bilatérale et de la convention européenne d'arbitrage Dans cette hypothèse, chaque procédure est menée selon les règles qui lui sont propres.

208.Cela étant, en pratique, lorsqu'une demande d'ouverture de procédure amiable est formulée et recevable dans le cadre des deux conventions, la phase d'instruction et de discussion avec l'autre autorité compétente sera menée de façon globale avec celle-ci.


CHAPITRE DEUXIEME :

LA PROCEDURE D'ARBITRAGE



Section 1 :

La procédure d'arbitrage prévue par la convention européenne d'arbitrage


  1. Mise en oeuvre de la procédure d'arbitrage

a) Champ d'application de la procédure d'arbitrage

209.La procédure d'arbitrage étant le prolongement d'une procédure amiable, les personnes et les impôts visés sont bien entendu identiques à ceux concernés par la procédure amiable (cf. supra chapitre premier).

b) Délais d'intervention de la commission consultative

210.Une commission consultative est constituée par les autorités compétentes si celles-ci ne parviennent pas à un accord amiable dans le délai de 2 ans à compter de la date à laquelle le cas a été soumis valablement à l'une d'elles accompagnée des informations nécessaires (cf. supra n° 72 ) et, le cas échéant, du désistement de tout recours en cas de procédure contentieuse. A l'expiration de ce délai, l'autorité compétente française demandera aux entreprises concernées si elles entendent demander la mise en oeuvre de la procédure d'arbitrage.

211.Toutefois, avec l'accord des entreprises associées intéressées, les autorités compétentes peuvent convenir de déroger à ce délai de deux ans (article 7, paragraphe 4 de la convention) notamment dans l'hypothèse où les autorités compétentes sont sur le point de parvenir à un accord et qu'il est jugé préférable de mener la procédure amiable à son terme en prolongeant le délai plutôt que de l'interrompre pour engager une procédure d'arbitrage dont l'issue est plus lointaine.

c) Constitution de la commission consultative

212.A moins que les Etats concernés n'en décident autrement, l'Etat contractant dont émane l'événement entraînant ou susceptible d'entraîner la double imposition au sens de l'article 1 er de la convention européenne d'arbitrage prend l'initiative de constituer la commission consultative et organise ses réunions, en accord avec l'autre Etat contractant.

213.Une commission consultative est constituée pour chaque affaire particulière.

d) Composition de la commission consultative

214.Conformément à l'article 9 de la convention, la commission consultative comprend un Président, des personnalités indépendantes et des représentants de chaque autorité compétente.

215.Elle est constituée de deux représentants de chaque autorité compétente concernée qui désignent sur une liste commune, d'un commun accord ou éventuellement par tirage au sort, quatre personnalités indépendantes ainsi que leurs suppléants. Il est précisé que le nombre de représentants de chaque Etat peut être réduit à un par voie d'accord entre autorités compétentes, auquel cas deux personnalités indépendantes seulement sont désignées.

216.En cas de tirage au sort, les personnes sélectionnées peuvent être récusées, soit dans des situations convenues à l'avance par les autorités compétentes concernées, soit dans l'une des trois situations suivantes prévues par la convention :

- la personnalité désignée par le sort appartient désormais à l'une des administrations fiscales ou exerce des fonctions pour le compte de l'une de ces administrations ;

- la personnalité a ou a eu des liens professionnels ou patrimoniaux avec l'une ou l'autre des entreprises associées en cause ;

- elle ne présente pas suffisamment de garanties d'objectivité pour le règlement du ou des cas à trancher.

217.Les personnalités indépendantes sont choisies par les autorités compétentes sur une liste déposée par chaque Etat auprès du Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne. A cette fin, chaque Etat contractant est tenu de communiquer au Secrétaire général du Conseil de l'Union européenne une liste de 5 personnalités compétentes et indépendantes ressortissantes et résidentes d'un Etat contractant à la convention. Les Etats contractants s'engagent dans les mêmes conditions à faire part au Secrétaire Général de toute modification apportée à la liste.

218.Lorsqu'ils communiquent le nom de leurs personnalités indépendantes au Secrétaire général, les Etats contractants joignent un curriculum vitae de ces personnalités, décrivant notamment leur niveau d'expérience dans le domaine juridique, fiscal et des prix de transfert.

219.Les Etats contractants peuvent aussi indiquer sur leur liste les personnalités qui satisfont aux exigences pour être élues en qualité de président.

220.Chaque année, le Secrétaire général du Conseil adresse aux Etats contractants une requête afin qu'ils précisent le nom des personnalités indépendantes qu'ils entendent désigner.

221.La liste globale de toutes les personnalités indépendantes est publiée sur le site Internet du Conseil de l'Union européenne.

222.Les membres de la commission consultative, représentants des autorités compétentes et personnalités indépendantes, choisissent un président dans la liste tenue par le Secrétariat général du Conseil, sans préjudice du droit de chaque autorité compétente de récuser celui-ci dans les mêmes conditions que les personnalités indépendantes en cas de tirage au sort. Le président de chaque commission consultative doit réunir les conditions requises pour l'exercice dans son pays, des plus hautes fonctions juridictionnelles ou être un jurisconsulte possédant des qualités notoires.

e) Déroulement de la procédure

223.En application de l'article 10 de la convention, les contribuables et les autorités compétentes concernées sont tenus de donner suite à toute demande de la commission visant à obtenir des renseignements, moyens de preuves ou documents.

224.Toutefois, les administrations fiscales n'ont pas l'obligation de :

- prendre des mesures administratives dérogeant à leur législation nationale ou à leur pratique administrative normalement suivie ;

- fournir des renseignements qui ne pourraient être obtenus en vertu de leur législation nationale ou dans le cadre de leur pratique administrative normalement suivie ;

- fournir des renseignements qui révèleraient un secret commercial, industriel ou professionnel, un procédé commercial ou des renseignements dont la communication serait contraire à l'ordre public.

225.Ces conditions de fourniture d'informations sont similaires à celles qui résultent, en matière d'échange de renseignements, de la directive modifiée du Conseil du 19 décembre 1977 concernant l'assistance mutuelle ainsi que des dispositions des conventions fiscales bilatérales relatives à l'assistance administrative.

226.Les contribuables peuvent fournir à la commission consultative tous renseignements, moyens de preuve ou documents qui leur semblent utiles à la prise de décision. A leur demande, les contribuables peuvent se faire entendre ou se faire représenter devant cette commission consultative. Si celle-ci le requiert, chacune des entreprises associées doit se présenter devant elle ou s'y faire représenter (article 10, paragraphe 2).

227.La commission consultative est assistée par un secrétariat dont les locaux sont mis à disposition par l'Etat contractant ayant pris l'initiative de sa constitution, sauf si les Etats contractants concernés en décident autrement. Pour des raisons d'indépendance, ce secrétariat sera placé sous le contrôle du président de la commission consultative. Les membres du secrétariat sont soumis à l'obligation de secret imposée par l'article 9, paragraphe 6 de la convention européenne d'arbitrage.

228.Le lieu où la commission consultative se réunit et le lieu où son avis doit être émis peuvent être fixés à l'avance par les autorités compétentes des Etats contractants concernés.

229.Les Etats concernés fournissent à la commission consultative, avant sa première réunion, tous les documents et informations pertinents, et notamment tous les documents, rapports, correspondances et conclusions utilisés lors de la procédure amiable.

230.La commission consultative est considérée comme ayant été saisie dès que le Président confirme que ses membres ont reçu tous les documents visés au paragraphe précédent.

231.Les travaux de la commission consultative sont menés dans la langue ou les langues officielles des Etats contractants concernés, à moins que les autorités compétentes n'en décident autrement d'un commun accord, compte tenu des souhaits de la commission consultative.

232.La commission consultative peut ordonner que la partie dont émane une déclaration ou un document prenne des dispositions en vue de produire une traduction dans la langue ou les langues dans laquelle ou lesquelles les travaux sont menés.

233.Tout en respectant les dispositions de l'article 10 de la convention européenne d'arbitrage, la commission consultative peut demander que les Etats contractants, et notamment l'Etat à l'origine du rehaussement ayant entraîné ou étant susceptible d'entraîner une double imposition au sens de l'article 1, se présentent devant la commission consultative.

234.Les frais de procédure de la commission consultative, qui sont répartis de façon égale entre les Etats concernés, sont les frais de fonctionnement administratifs ainsi que la rémunération et les frais des personnalités indépendantes, y compris le président.

235.A moins que les autorités compétentes des Etats concernés n'en décident autrement :

- le remboursement des frais exposés par les personnalités indépendantes sera limité à celui qui est normalement prévu pour les hauts fonctionnaires de l'Etat qui a pris l'initiative de constituer la commission consultative ;

- la rémunération des personnalités indépendantes est fixée à 1000 euros par personne et par jour de réunion de la commission consultative, et le président percevra une rémunération supérieure de 10 % à celle des autres personnalités indépendantes.

236.Le paiement effectif des frais de procédure de la commission consultative est effectué par l'Etat qui a pris l'initiative de la constituer, à moins que les autorités compétentes des Etats contractants concernés n'en décident autrement.

237.Enfin, les frais exposés par les entreprises associées dans le cadre de la procédure d'arbitrage auprès de la commission consultative (article 11, paragraphe 3) demeurent à leur charge.

238.L'article 11, paragraphe 2 de la convention stipule que les autorités compétentes concernées peuvent convenir de règles complémentaires de procédure. Les autorités compétentes décideront, préalablement à la constitution d'une commission consultative, de tous les autres sujets non traités aux paragraphes précédents.

f) Décision prise à l'issue de la procédure

239.En vertu de l'article 12 de la convention européenne d'arbitrage, la commission consultative rend un avis dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle elle a été saisie en se prononçant à la majorité simple de ses membres. L'avis doit être fondé sur l'article 4 de la convention européenne d'arbitrage qui pose le principe du prix de pleine de concurrence.

240.L'avis de la commission doit contenir les éléments suivants :

- les noms des membres de la commission consultative ;

- la demande d'élimination de la double imposition faite à la commission intégrant les noms et adresses des entreprises concernées, les autorités compétentes concernées, une description des faits et circonstances du différend et une déclaration claire concernant ce qui est demandé ;

- un résumé succinct de la procédure ;

- les arguments et méthodes sur lesquels est fondée la décision figurant dans l'avis ;

- l'avis ;

- le lieu où l'avis est émis ;

- la date à laquelle l'avis est émis ;

- les signatures des membres de la commission consultative.

241.L'avis de la commission est rédigé en trois originaux, dont deux sont transmis aux autorités compétentes des Etats concernés et un est transmis pour archivage au Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne.

242.Par la suite, les autorités compétentes prennent d'un commun accord une décision assurant l'élimination de la double imposition dans un délai de 6 mois à compter de la date à laquelle la commission a rendu son avis. Au total, la procédure ne doit donc pas excéder un an.

243.Les autorités compétentes ne sont pas liées par l'avis de la commission consultative. La décision prise en définitive par les autorités compétentes peut s'écarter de l'avis de la commission dès lors qu'elle permet, en tout état de cause, l'élimination de la double imposition.

244.En revanche, les autorités compétentes doivent se conformer à l'avis de la commission si elles ne parviennent pas à s'accorder sur une décision autre permettant d'éliminer la double imposition (article 12, paragraphe 1).

245.La double imposition est considérée comme éliminée dans les deux situations suivantes :

- les bénéfices en cause dans la procédure d'arbitrage ne sont soumis qu'une fois à l'impôt dans un seul Etat, soit que l'administration qui envisageait un rehaussement y renonce finalement, soit que cette dernière administration le maintienne en totalité ou partiellement, l'administration de l'autre Etat acceptant de réduire, à due concurrence, la base de l'impôt spontanément déclarée par l'entreprise associée ;

- le montant de l'impôt correspondant aux résultats redressés et maintenus en totalité ou en partie dans un Etat fait l'objet, pour l'entreprise associée, d'un ajustement corrélatif dans l'autre Etat (par exemple sous la forme d'un crédit d'impôt).

246.Lorsque les modalités d'élimination de la double imposition ont été arrêtées, l'autorité qui a été saisie du cas transmet une copie de la décision des autorités compétentes et de l'avis de la commission consultative à chacune des entreprises concernées.

g) Publicité de la décision des autorités compétentes et de l'avis de la commission

247.Les autorités compétentes peuvent convenir de la publication de la décision qu'elles ont prises, sous réserve de l'assentiment des entreprises concernées (article 12, paragraphe 2).

248.Quant à l'avis de la commission consultative, la convention européenne d'arbitrage n'envisage pas sa publication.

249.Cela étant, les autorités compétentes des Etats contractants peuvent aussi convenir que l'avis sera publié, sous réserve de l'accord des entreprises en cause.

250.Le Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne demande, le cas échéant, la publication au journal officiel de l'Union européenne.