SOUS-SECTION 2 SOLIDARITÉ
SOUS-SECTION 2
Solidarité
A FONDEMENT DE LA SOLIDARITE
1L'article 1799 A du CGI dispose : « Les condamnations pécuniaires contre plusieurs personnes pour un même fait de fraude sont solidaires ».
2Aux termes de l'article 480-1 du Code de procédure pénale « les personnes condamnées pour un même délit sont tenus solidairement des restitutions et des dommages-intérêts ».
3La solidarité énoncée par les articles précités trouve sa justification en matière de contributions indirectes dans le fait que les amendes fiscales sont plus réelles que personnelles et tendent principalement à !a réparation du préjudice subi par l'Etat ; elles frappent le fait matériel de la contravention, quel que soit le nombre de personnes qui ont pu y participer. Il s'ensuit qu'en cas de pluralité de délinquants pour un même fait de fraude, il n'est prononcé qu'une seule amende dont le recouvrement est garanti par la solidarité.
4Il a ainsi été jugé :
- en matière d'impôt sur les spectacles, que c'est à bon droit qu'en application des dispositions de l'article 480-1 du Code de procédure pénale, un arrêt déclare deux prévenus solidairement responsables de la totalité des pénalités prononcées pour infractions à l'impôt sur les spectacles, dès lors qu'il résulte de diverses circonstances de fait énumérées par l'arrêt que les intéressés ont tous deux participé à ces infractions (Crim. rejet 3 juin 1957, RJCI n° 32, p. 92, Bull. crim, 470 p. 852) ;
- que l'enlèvement, le transport et la récepticn d'une même boisson dans des conditions irrégulières ne constituent qu'une seule contravention, punie, quel que soit le nombre de contrevenants, d'une seule pénalité, et que dès lors encourt la cassation l'arrêt qui, au lieu de se bomer à déclarer les destinataires d'une dilution alcoolique livrée sous le couvert de titres de mouvement inapplicables solidairement tenus des condamnations déjà infligées à l'expéditeur par les premiers juges, limite la condamnation de chacun de ces destinataires au montant des pénalités fiscales afférentes à la quantité effectivement recue (Cass. crim., 15 mai 1961, RJCI n° 22).
B. ÉTENDUE DE LA SOLIDARITÉ
5La solidarité s'applique non seulement à l'amende mais à toutes les condamnations pécuniaires et aux dépens. La confiscation - réelle ou fictive - constituant une peine pécuniaire, doit être prononcée solidairement à l'encontre de tous les prévenus (Cass. crim., 31 mai 1954, BCI n° 27, p. 66).
6La solidarité s'applique sans qu'il puisse être fait de distinction entre les auteurs principaux et les complices de ces demiers.
7La solidarité ne se présume pas, lorsqu'il s'agit de deux infractions distinctes et qu'il n'est indiqué entre ces infractions aucun lien de connexité (Cass. crim., 4 février 1921, BCI 12, Bull. crim. 61).
8Cependant, des prévenus qui ont été condamnés solidairement à une seule amende, bien qu'ayant encouru chacun une amende séparée, ne sauraient critiquer la décision ainsi rendue qui, loin de leur causer un préjudice, leur crée une situation plus favorable (Cass. crim., 4 février 1921 précité).
9En ce qui concerne plus particulièrement les dépens, il n'est pas nécessaire d'établir l'existence d'un délit commun aux prévenus pour justifier leur condamnation solidaire aux frais, s'il est constaté qu'ils ont encouru la même infraction (Cass. crim., 23 mai 1919, BCI n° 18). Mais si les prévenus ont été l'objet de condamnations distinctes pour des infractions également distinctes, le tribunal ne peut, même en réunissant les poursuites dirigées contre eux, les condamner au paiement solidaire des frais.
C. CONSÉQUENCES DE LA SOLIDARITE
10La solidarité n'est pas une peine, mais un moyen d'exécution.
Il en résulte les conséquences suivantes :
- une cour d'appel peut limiter la charge de la solidarité à l'égard de certains prévenus (Cass. crim., 26 novembre 1943, Bull. crim. 135) ;
11 - au regard de l'appel : lorsque plusieurs prévenus ont été condamnés solidairement pour transport frauduleux d'alcool, la Cour, saisie de l'appel interjeté par trois contrevenants seulement, ne peut réduire les pénalités fiscales prononcées en première instance contre un quatrième contrevenant non appelant (Cass. crim., 23 septembre 1941, BCI 1942, n° 7, p. 11). L'appel fait par un des co-prévenus condamnés solidairement pour un même fait de fraude ne saurait donc profiter aux autres malgré cette solidarité ;
12 - vis-à-vis du sursis : une cour d'appel, en condamnant solidairement deux prévenus à l'amende et en accordant ensuite le sursis à l'un d'eux, n'a pas à tenir compte des résultats éventuels de la solidarité, ni à se préoccuper de savoir si, par l'effet de la solidarité, l'autre condamné pourra être astreint à verser la totalité de l'amende sans recours possible contre le premier (Cass. crim., 4 juin 1910, BCI 14, Bull. crim. 290) ;
13 - vis-à-vis des circonstances atténuantes : une cour d'appel, qui a condamné solidairement deux prévenus à une amende, peut accorder à l'un d'eux les circonstances atténuantes et limiter ainsi pour lui la charge de la solidarité (Cass. crim., 8 novembre 1912, BCI 1912, Bull. crim. 542) ;
14 - vis-à-vis de la transaction : si, en raison du caractère de réparation civile des amendes prononcées en matière de contributions indirectes, il ne peut être prononcé, en cas de pluralité de contrevenants, qu'une seule série de pénalités pécuniaires pour la même infraction, la transaction intervenue à l'égard de certains d'entre eux ne peut mettre obstacle à l'action pénale subséquente à engager contre les autres, tant que !e préjudice n'a pas été complètement réparé. Il s'ensuit qu'une transaction passée avec certains contrevenants ne prive pas l'Administration du droit de faire prononcer contre un co-auteur la totalité des peines prévues par la loi et les garanties attachées à leur recouvrement ; il lui appartient seulement, dans l'exécution de la condamnation, de tenir compte au condamné des sommes déjà reçues au titre de la transaction (Crim., rejet 22 janvier 1958, RJCI n° 9, p. 27) ;
15 - au reqard de l'amnistie : l'amnistie ayant un caractère personnel, profite uniquement à celui qui la motive et non au co-délinquant, ce dernier restant tenu des conséquences de l'infraction (Rouen, 10 décembre 1920, BCI n° 13).