CHAPITRE PREMIER JURIDICTION CONTENTIEUSE
CHAPITRE PREMIER
JURIDICTION CONTENTIEUSE
1Le principe de fixité des évaluations ayant été supprimé par l'article 8 de la loi du 18 juillet 1974 (cf. ci-avant B 432 ) les réclamations contre les bases d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés non bâties peuvent être présentées chaque année dans le délai général de réclamation prévu à l'article R* 196-2 du LPF.
2Les réclamations dirigées contre la nature de culture ou le classement assignés aux parcelles et les réclamations pour dépréciation notable et durable sont de ce fait instruites comme des réclamations ordinaires.
3Par contre, deux types de réclamations obéissent à des règles particulières :
- les demandes en mutations de cote ;
- les réclamations pour disparition de parcelle en cours d'année et pour perte de récoltes.
SECTION 1
Mutations de cote
1La mutation de cote consiste à mettre à la charge d'un contribuable une cotisation qui lui incombe d'après les faits existant au 1 er janvier de l'année d'imposition alors qu'elle est établie au nom d'un autre contribuable.
2Aux termes de l'article 1404 du CGI, lorsqu'un immeuble est imposé au nom d'un contribuable autre que le propriétaire actuel, la mutation de cote peut être prononcée :
- soit d'office ;
- soit sur réclamation du propriétaire ;
- soit sur réclamation de celui au nom duquel la propriété a été cotisée à tort. Toutefois, dans les communes à cadastre rénové, les mutations de cote sont subordonnées à la publication au fichier immobilier de l'acte ou de la décision constatant le transfert de propriété 1 .
3Étant donné cependant que la taxe foncière est établie pour l'année entière d'après les faits existant au 1 er janvier, aucun changement de propriété (vente, donation, partage, etc.) ne peut donner lieu à mutation de cote pour l'année au cours de laquelle le changement est intervenu (cf. ci-avant B 41, n° 5 ).
Il en est ainsi, même si, par l'effet d'une stipulation spéciale de l'acte de vente, la taxe foncière est mise à la charge de l'acquéreur à compter du jour de la mutation.
4En application des dispositions de l'article 1404 du CGI, une femme mariée peut régulièrement demander que la cotisation de taxe foncière sur les propriétés non bâties afférente à ses biens propres établie au nom de son mari soit mise à sa charge par voie de mutation de cote (CE, arrêt du 22 février 1909, dame X... , Nord, Lebon, p. 196). Par contre, un tiers (électeur de la commune) n'est pas recevable à attaquer en nullité, devant le Tribunal administratif, une mutation de cote opérée par les soins de l'Administration en vertu d'un acte sous seing privé enregistré auquel il n'a pas été partie (CE, arrêt du 9 février 1912, X... , Maine-et-Loire, Lebon, p. 183).
5Par ailleurs, il est de règle qu'une mutation de cote ne peut être valablement prononcée sans mise en cause préalable, soit du contribuable au nom de qui il est proposé de mettre tout ou partie de l'imposition contestée, soit du contribuable inscrit au rôle. Lorsque, à la suite de cette mise en cause, il s'élève une contestation sur le droit à la propriété, les parties sont renvoyées devant les tribunaux civils et la décision sur la demande en mutation de cote est ajournée jusqu'après jugement définitif sur leur droit la propriété (CGI, art. 1404-II ).
6Sous le bénéfice des observations qui précédent les demandes en mutation de cote doivent d'une manière générale, et conformément au II de l'article 1404 du code précité, être présentées, instruites et jugées comme les demandes en décharge ou réduction de la taxe foncière.
7L'Administration a, de son côté, le pouvoir de prononcer d'office des mutations de cote.
1. Demande faite par un contribuable inscrit au rôle.
a. Le contribuable inscrit au rôle était, antérieurement au 1 er janvier de l'année de l'imposition, propriétaire de l'immeuble.
8Lorsque la demande concerne la cotisation afférente à un immeuble dont le contribuable a eu réellement la propriété et qu'il a aliéné, sans que les diligences prescrites par l'article 1402 du CGI aient été effectuées, le réclamant est tenu de désigner le ou les tiers au nom desquels la mutation de cote doit être opérée 2 .
Une jurisprudence constante du Conseil d'État fixe, à cet égard, les obligations des contribuables qui n'ont pas effectué de démarches pour faire opérer, par la voie administrative, la mutation des immeubles qu'ils ne possèdent plus (CE, arrêts des 14 février 1919, X... , Rhône, Lebon , p. 146 : 21 mars 1919, X... , Seine-et-Oise, Lebon, p. 328 : 17 février 1922, X... , Seine-et-Oise, Lebon, p. 152 ; 30 mars 1936, dame X... , Aude, RO, n° 6413).
9La désignation du véritable propriétaire peut d'ailleurs être valablement faite en cours d'instance devant le Tribunal administratif (CE, arrêts des 25 février 1921, X... , Cher, Lebon, p. 228 ; 17 mars 1922, ministre des Finances contre dame veuve X... , Marne, Lebon, p. 241) voire devant le Conseil d'État (CE, arrêts des 11 mars 1908, X... , Loire, Lebon, p. 248 : 3 mars 1922, X... , Allier, Lebon, p. 197).
10En tout état de cause, et dès lors que l'ancien propriétaire continue, en application de l'article 1403 du CGI, à être imposé au rôle tant que la mutation cadastrale n'a pas été faite (cf. ci-avant B 41, n° 4 ), le Tribunal administratif doit, sur la demande, soit du propriétaire, soit de celui au nom duquel la propriété a été cotisée à tort, rayer du rôle le contribuable indûment imposé et, par le même jugement, y inscrire celui qui doit supporter la taxe (CE, arrêts des 27 octobre 1967, sieur X... , Loire-Atlantique, Dupont 1968, p. 40 ; 3 mai 1968, BOCD 1968-11-4204 et 30 janvier 1970, sieur X... , Creuse).
11Enfin, dans les communes à cadastre rénové, la mutation de cote est subordonnée à la publication au fichier immobilier de l'acte ou de la décision constatant le transfert de propriété (CGI, art. 1404 ).
b. Le contribuable inscrit au rôle n'a jamais été propriétaire de l'immeuble.
12Lorsque le contribuable inscrit au rôle n'a jamais été propriétaire de l'immeuble pour lequel la mutation de cote est demandée, il ne peut être mis dans l'obligation de désigner le tiers au compte duquel la mutation doit être assurée. Le réclamant a droit, en pareil cas. à la décharge des cotisations indûment établies (CE, arrêt du 11 janvier 1929, X... , Seine-et-Oise, RO, n° 5311).
13Dans cette hypothèse, assez exceptionnelle, la taxe foncière réclamée à tort au contribuable qui n'est pas propriétaire du bien imposé est valablement remise à la charge du contribuable précédemment cotisé pour ledit bien (CE, arrêts des 19 juin 1931, X... , Seine-et-Oise, RO, n° 5646 et 23 octobre 1953, X... , Meuse, RO, p. 342).
2. Demande faite par le propriétaire non inscrit au rôle.
14Toute personne qui se prétend propriétaire d'un immeuble inscrit au nom d'une autre a qualité pour demander que l'impôt afférent audit immeuble soit mis à son nom par voie de mutation de cote.
Pour que sa demande puisse être satisfaite, il appartient à l'intéressé d'établir que son droit à la propriété remonte à une époque antérieure au 1 er janvier de l'année de l'imposition et qu'il y a eu, pour ce qui est des communes à cadastre rénové, publication à la conservation des Hypothèques (cf. n° 11 ).
15Les demandes en mutation de cote faites par le propriétaire non inscrit au rôle doivent, dans tous les cas, être présentées dans le délai normal, c'est-à-dire au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle le rôle a été mis en recouvrement.
16Si l'immeuble revendiqué par le réclamant qui s'en prétend propriétaire n'a donné lieu à aucune imposition, la demande de mutation de cote n'est pas recevable. Seuls, en effet, sont admis à demander une mutation de cote de la taxe foncière celui au nom duquel la propriété a été cotisée à tort et celui qui se prétend propriétaire de la parcelle cotisée sous le nom d'un autre (CE, arrêt du 8 octobre 1969, X... , Haute-Vienne).
3. Mutation de cote d'office.
17Les mutations de cote de taxe foncière 3 peuvent être prononcées d'office par l'administration des Impôts, sur proposition des agents des impôts et des comptables du Trésor chargés du recouvrement jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due (LPF, art. L. 173 ] 4 . Les agents appartenant au corps de géomètres du Cadastre sont également admis, dans les conditions fixées par le directeur général des Impôts, à proposer d'office, en matière de taxe foncière, des mutations de cote et le dégrèvement des droits formant surtaxe.
18Mais ce pouvoir n'autorise pas le service des Impôts à procéder lui-même à une mutation cadastrale. Aussi bien, lorsque, à la suite du décès d'un contribuable, les héritiers n'ont pas fait les diligences nécessaires pour obtenir la mutation cadastrale, l'Administration continue régulièrement, en vertu de l'article 1403 du CGI à établir la taxe foncière au nom du propriétaire défunt (CE, arrêt du 16 octobre 1970, veuve X... , Tarn-et-Garonne).
Enfin, lorsque l'erreur d'imposition ne peut plus être rectifiée par une mutation de cote, le dégrèvement d'office de la cotisation indûment établie peut être prononcé jusqu'au 31 décembre de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle le délai de réclamation a pris fin, conformément à l'article R* 211-1 du LPF.
4. Portée des mutations de cote.
19Dans tous les cas, les décisions de l'administration des Impôts et les jugements prononçant les mutations de cote prennent effet, tant pour l'année qu'elles concernent que pour les années suivantes, jusqu'à ce que les rectifications nécessaires aient été effectuées dans les rôles (CGI, art. 1405 ).
1 Cette régie ne s'applique pas aux mutations antérieures au 1 er janvier de l'année de rénovation pour les communes dont le cadastre a été rénové postérieurement au 31 décembre 1955. En pareille hypothèse, à défaut d'extrait d'acte modèle n° 2, le réclamant est tenu de justifier la mutation de cote par un acte authentique.
2 Cette obligation s'imposa éventuellement aux héritiers ou avants droit de l'ancien propriétaire demeuré inscrit au rôle (CE. arrêt du 28 juillet 1922. X... , Loire-et-Cher, Lebon, p. 675).
3 Dès lors que toute mutation de cote est subordonnées dans les communes à cadastre rénové, à la publication de l'acte translatif de propriété qui la motive, la mise en application des mutations de cote d'office est limitée aux communes à ancien cadastre.
4 L'Administration conserve cependant le pouvoir de prononcer d'office une mutation de cote, en dehors du délai de reprise susvisé, dans le cas où le contribuable imposé à tort a introduit une réclamation dans le délai légal.