CHAPITRE 2 RÉGIME SPÉCIAL DES FUSIONS
CHAPITRE 2
RÉGIME SPÉCIAL DES FUSIONS
SECTION 1
Généralités
A. PRINCIPES
1Les dispositions de l'article 210 A du CGI posent en principe que la fusion ne doit entraîner par elle-même aucune imposition supplémentaire pour la société absorbée. Notamment les plus-values de fusion sont exonérées ainsi que les provisions de la société apporteuse qui conservent leur objet. En contrepartie, la société absorbante est soumise à diverses obligations qui ont pour objet de rendre possible l'imposition ultérieure, à son nom, des plus-values et provisions exonérées lors de la fusion.
En droit strict, l'Administration aurait été fondée à lier l'application de l'ensemble de ces dispositions avec celles de l'attribution des titres émis par la société absorbante en rémunération de l'apport. L'article 115-1 du C.G.I. subordonne, en effet, l'exonération de l'attribution des titres à la condition que les plus-values dégagées par l'opération soient elles-mêmes exonérées.
2Toutefois, afin de permettre aux sociétés apporteuses qui le désirent d'apurer leur situation au regard de l'impôt sur les sociétés lors de la fusion, il est admis que l'application du régime spécial présente un caractère facultatif en ce qui concerne l'exonération des plus-values de fusion et des provisions de la société absorbée. Il est donc loisible à la société apporteuse de comprendre les sommes en cause dans ses résultats imposables. Une telle option ne fait pas obstacle à l'application des dispositions du régime spécial relatives aux droits d'enregistrement et à l'exonération de l'attribution gratuite des titres représentatifs de l'apport.
3 Remarque. - Les dispositions de l'article 221-5 du CGI qui prévoit que le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés emporte cessation d'entreprise, ne modifient pas les conditions d'application du régime de faveur des fusions et opérations assimilées prévu aux articles 210 A et 210 B du CGI.
B. CONSÉQUENCES
4Le régime spécial comporte, en principe, l'exonération chez la société absorbée de toutes les plus-values dégagées par l'apport des éléments de l'actif immobilisé, ainsi que sous certaines conditions, des profits réalisés sur les éléments de l'actif circulant. Mais le sort fiscal des plus-values se trouve réglé en fonction d'une distinction fondamentale entre la plus-value ou moins-value nette afférente aux éléments amortissables et la plus-value ou moins-value nette afférente aux éléments non amortissables.
5L'imposition de la plus-value nette dégagée par l'apport des éléments non amortissables se trouve simplement reportée au moment de la cession éventuelle ultérieure de ces éléments par la société absorbante (cf. 4 I 1242, n° 62 ).
La plus-value nette afférente aux éléments amortissables doit être réintégrée dans les résultats imposables de la société absorbante.
6Toutefois, la société apporteuse peut opter pour l'imposition immédiate, au taux réduit de la plus-value à long terme afférente aux éléments amortissables ; bien entendu, la société absorbante échappe, à due concurrence, à l'obligation de réintégration. L'option doit être globale : elle doit porter sur la totalité de la plus-value nette à long terme afférente aux éléments amortissables.
Par ailleurs, afin de simplifier les suites de l'opération de la fusion, il est admis que la société absorbante peut librement compenser la plus-value nette sur les éléments amortissables avec les déficits de la société absorbée qu'un agrément l'a autorisée à reporter sur ses propres résultats. Bien entendu, les déficits utilisés pour cette compensation cessent de pouvoir être reportés ; mais la somme à réintégrer dans les résultats de la société absorbante se trouve réduite d'un montant égal à celui des déficits ainsi utilisés.
7Il peut se faire enfin que l'apport dégage une moins-value nette partielle, soit sur les éléments amortissables, soit sur les éléments non amortissables.
La moins-value nette partielle dégagée par l'apport des éléments non amortissables ne peut être déduite par la société absorbée, mais la déduction se trouve automatiquement reportée au profit de la société absorbante, puisque cette dernière, lors de la cession ultérieure de ces éléments, calculera la plus-value ou moins-value nouvelle par rapport à la valeur que le bien cédé avait, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée.
8En revanche, à s'en tenir strictement à la lettre de l'article 210 A du CGI, la moins-value nette partielle dégagée par l'apport des éléments amortissables ne pourrait être déduite, ni par la société absorbée, ni par la société absorbante. Toutefois, par analogie avec la réintégration de la plus-value nette afférente aux éléments amortissables, il est apparu possible d'autoriser le report de la moins-value nette afférente aux éléments de cette nature sur les résultats de la société absorbante. Ce report qui n'est pas subordonné à un agrément préalable est opéré dans les conditions et limites du report déficitaire.
9Au surplus, dans un souci de simplification et d'allégement, il est admis que la société absorbée peut compenser la moins-value partielle dont il s'agit avec ses résultats imposables ; bien entendu, la société absorbante perd, à due concurrence, le droit de reporter cette moins-value.
Après l'étude des conditions d'application du régime spécial, on examinera la date d'effet du contrat de fusion puis le régime fiscal applicable à l'égard des sociétés parties à l'acte.
C. REMISE EN CAUSE DU RÉGIME SPÉCIAL
10La rupture des engagements prévus aux articles 210 A et 210 B entraîne la déchéance rétroactive du régime spécial appliqué à l'opération initiale et l'exigibilité pour la société apporteuse de toutes les impositions dont elle a été dispensée du fait de l'application du régime spécial.
Dans cette hypothèse, la société apporteuse est replacée rétroactivement dans la situation qui aurait été la sienne si l'apport n'avait pas été soumis au régime spécial et les impositions dont la société apporteuse a été indûment dispensée (imposition des plus-values, des provisions...) sont émises au titre de l'exercice au cours duquel l'apport initial est intervenu. Le taux d'impôt sur les sociétés applicable est celui applicable à l'exercice en cause.
Bien entendu, l'intérêt de retard et, s'il y a lieu, les majorations sont exigibles sur les droits rappelés. L'intérêt de retard a pour point de départ la date à laquelle les impôts correspondants auraient dû être acquittés et pour point d'arrivée la date à laquelle la situation de la société a été régularisée.
Il est précisé que le délai de prescription ne court qu'à compter de la date de la rupture de l'engagement.
Toutefois, les erreurs commises de bonne foi par la société absorbante ou bénéficiaire de l'apport, n'entraîneront pas la déchéance rétroactive du régime spécial mais donneront lieu à un réhaussement de ses résultats (ex. : omission accidentelle de la réintégration des plus-values sur biens amortissables).