SOUS-SECTION 1 CONDITIONS D'EXISTENCE DES QUESTIONS PRÉJUDICIELLES
2. S'il n'est invoqué aucun moyen suffisamment précis et sérieux de nature à justifier le renvoi pour question préjudicielle.
20Ainsi jugé à l'occasion de contestations sur :
- la régularité de la procédure d'imposition :
. Lorsque l'inspecteur a reçu, à la suite d'une enquête de police judiciaire, des indications faisant apparaître des omissions de recettes dans la déclaration souscrite par un commerçant relevant du régime du forfait, il peut notifier au contribuable un nouveau forfait sans avoir à procéder au préalable à une vérification de ses livres. La procédure d'imposition doit être tenue pour régulière dès lors que le contribuable n'invoque, contre l'enquête de police, aucun moyen suffisamment précis de nature à justifier le renvoi pour question préjudicielle devant l'autorité judiciaire, seule compétente pour apprécier la régularité d'une telle enquête (CE, arrêt du 30 octobre 1968, n° 72101, RJ, 2° partie, p. 220).
. De même le redevable critiquant la régularité de la procédure par laquelle l'Administration fiscale a eu connaissance de sa comptabilité occulte saisie par le service de la police judiciaire, le juge administratif peut statuer dès lors qu'il n'est soulevé à l'encontre des opérations de contrôle effectuées par ledit service, aucun moyen assez sérieux pour justifier le renvoi pour question préjudicielle devant l'autorité judiciaire (CE, arrêt du 13 novembre 1968, n° 60843, RJ, 2e partie, p. 226).
- le droit de propriété :
. Jugé qu'il appartient à la personne qui conteste une mutation cadastrale comme erronée et qui demande une mutation de cote 1 à son nom, de fournir des précisions suffisantes pour permettre au juge de l'impôt de statuer ou d'apprécier s'il y a lieu au renvoi d'une question préjudicielle sur le droit de propriété (CE, arrêt du 23 juillet 1974, Dame X... , n° 86772).
. Jugé également que lorsqu'il est saisi d'un recours en excès de pouvoir dirigé contre le refus opposé par le chef du service du Cadastre de modifier une inscription cadastrale, le juge administratif ne peut que rejeter la demande sans surseoir à statuer dès lors que la décision attaquée est régulière à défaut de publication préalable au fichier immobilier d'un acte ou d'une décision judiciaire (CE, arrêt du 11 juin 1975, Sieur X... , n° 92149, Leb., p. 346).
C. NÉCESSITÉ DE RÉSOUDRE LA QUESTION POUR LA SOLUTION DU LITIGE
21Pour qu'il y ait question préjudicielle il faut que la réponse à cette question soit nécessaire à la solution même du litige (CE, arrêt du 13 juillet 1966, req. n° 61085, arrêt déjà cité n° 18).
Dans le cas contraire il n'y a pas lieu à renvoi d'une telle question sur une autre juridiction et le Conseil d'État aussi bien que la Cour de Cassation annulent les jugements de sursis à statuer rendus à tort par les tribunaux administratifs ou de grande instance.
Ainsi :
- le Tribunal administratif saisi d'une demande de mutation de cote 1 en matière de contribution foncière a renvoyé à tort une question préjudicielle aux tribunaux judiciaires alors qu'en l'absence d'imposition à raison de la parcelle envisagée, la demande n'était pas recevable (CE, arrêt du 8 octobre 1969, n° 76408) ;
- de la même manière, le Tribunal administratif ne devait pas surseoir à statuer, alors que l'existence d'un moyen tiré du droit interne français soulevé par le contribuable permettait de régler l'affaire sans l'intervention du ministre des Affaires étrangères pour interpréter une convention internationale (CE, arrêt du 19 décembre 1975, n°s 84774 et 91895) ;
- le Tribunal de grande instance saisi en application de l'ancien article 1371 du CGI (691 nouveau) d'une demande d'exonération définitive de droits de mutation à titre onéreux sur une acquisition de terrain à bâtir n'avait pas à renvoyer les parties devant la juridiction administrative pour statuer sur une question afférente à un permis de construire que la société requérante n'avait pas portée au débat (Cass. com., 10 juin 1976, SCI « Les Hautes-Nonettes de Chelles », RJ III, p. 121) ;
- le Tribunal de grande instance seul compétent en matière de droits de timbre n'avait pas à surseoir à statuer afin que la juridiction administrative interprète un acte administratif individuel concernant le classement d'une voie publique (Cass. com., 7 novembre 1983, arrêt déjà cité cf. n° 12 ).
1 La procédure de mutation de cote est supprimée depuis le 1er août 1994 (loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993, art. 85) [cf. 13 Q 312].