Date de début de publication du BOI : 02/06/1972
Identifiant juridique : 6M211
Références du document :  6M
6M2
6M21
6M211

DIVISION M ÉVALUATIONS FONCIÈRES DES PROPRIÉTÉS BÂTIES


DIVISION M

ÉVALUATIONS FONCIÈRES DES PROPRIÉTÉS BÂTIES



PRÉAMBULE


L'ordonnance n° 59-108 du 7 janvier 1959 portant réforme des impôts directs locaux a subordonné l'entrée en vigueur de cette réforme à l'exécution préalable d'une revision générale des évaluations foncières.

Cette opération est terminée en ce qui concerne les propriétés non bâties et les résultats en ont été incorporés dans les rôles de l'année 1963. Une seconde revision est actuellement en préparation.

En matière de propriétés bâties, la dernière revision a été effectuée en 1939 et encore n'a-t-elle été que forfaitaire pour les établissements Industriels. Trop d'événements se sont passés depuis lors pour que, nonobstant le surcroît de charges qui en résulte pour le Service, la présente revision soit limitée à un ajustement plus ou moins général des valeurs locatives cadastrales actuellement utilisées : elle consiste donc en une nouvelle évaluation de tous les biens soumis à la contribution foncière des propriétés bâties, y compris les établissements industriels.

Suivant les principes généraux, l'évaluation doit être basée sur la valeur locative actuelle et normale, déterminée en tenant compte de la règle de la proportionnalité.

La recherche de cette valeur locative normale présente, dans la conjoncture actuelle, de sérieuses difficultés tant en ce qui concerne les locaux d'habitation et à usage professionnel que les établissements industriels.

Le marché locatif des locaux d'habitation et à usage professionnel comprend, en effet, un secteur réglementé et un secteur libre.

Le premier comporte au surplus des modalités de fixation des prix différentes selon qu'il s'agit de locaux d'habitation ordinaires, d'H.L.M., de locaux d'habitation dépendant d'une exploitation agricole et soumis au statut du fermage ou de locaux à usage professionnel. Les difficultés se trouvent accrues par l'existence de nombreuses causes de distorsions dans la fixation du montant des loyers. En bref, pour des motifs qui n'ont rien à voir avec la valeur locative réelle (qualité, situation de fortune ou situation de famille de l'occupant, date d'entrée dans les lieux, date de la construction, population de la commune, ville d'implantation, durée du bail, mode de calcul du loyer, etc.), il n'existe pas un cours cohérent des loyers réglementés, mals plutôt un ensemble de cas particuliers.

Quant au secteur libre, le prix des locations y est souvent faussé en raison de la crise du logement qui sévit encore dans certaines agglomérations.

Dans cette situation, il n'a pas paru possible au législateur de se référer systématiquement au montant des loyers perçus par chaque propriétaire.

La présente revision doit au reste tenir compte de l'évolution de la fiscalité et de l'importance que la valeur locative cadastrale est désormais appelée à prendre dans les futures taxes directes locales.

Le décret du 9 décembre 1948 portant refonte des Impôts sur le revenu a supprimé la contribution foncière en tant qu'impôt d'État. Il importe par suite beaucoup moins de rechercher le produit net effectivement acquis par le propriétaire que de dégager le revenu normal et moyen que chaque propriété procure ou est susceptible de procurer. Tous les immeubles doivent être traités de la même manière et supporter des charges fiscales proportionnelles.

La règle de la proportionnalité, caractéristique essentielle de la contribution foncière, s'impose d'autant plus que, sous l'empire de la réforme prévue par l'ordonnance du 7 janvier 1959 précitée, la valeur locative cadastrale voit son champ d'application considérablement étendu. Dans le nouveau régime, elle ne servira pas seulement à la péréquation équitable des charges de la propriété bâtie ; elle constituera en outre l'indice le plus Important de la répartition des autres Impositions directes locales : taxe d'habitation et droit proportionnel de la taxe professionnelle. C'est ainsi que la valeur locative cadastrale d'un logement sera obligatoirement substituée au loyer matriciel pour l'établissement de la taxe d'habitation appelée à remplacer la contribution mobilière.

Il devient dès lors nécessaire de déterminer sans ambiguïté la part de la valeur locative cadastrale de la propriété qui sert de base aux impôts dus par chacun des occupants. C'est pourquoi, encore que la propriété reste l'unité d'imposition à la taxe foncière, l'évaluation des immeubles collectifs est effectuée obligatoirement par LOCAL, c'est-à-dire par fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte. De la sorte, les bases de la taxe d'habitation et du droit proportionnel de la taxe professionnelle seront calculées et arrêtées par avance.

Par ailleurs, la périodicité quinquennale des évaluations foncières, dont le principe a été édicté par l'article 12 de la loi n° 53-79 du 7 février 1953, a conduit l'Administration, d'une part à envisager la constitution d'une documentation réelle sur la propriété immobilière, résumant les principales caractéristiques matérielles de chaque immeuble, d'autre part à rechercher un système d'évaluation qui facilite les revisions successives en faisant largement appel à des données de base constamment mises à jour.

Les problèmes que soulève l'évaluation des établissements industriels sont différents, mais tout aussi graves en raison de l'ancienneté des évaluations actuelles, de l'évolution technologique intervenue depuis la dernière revision, de l'importance et de la complexité de certains établissements et de l'interdépendance étroite des bâtiments, des installations et de l'outillage.

*

*       *

En présence d'une telle situation et nonobstant les vicissitudes de la conjoncture, les procédés de détermination de la valeur locative cadastrale doivent cependant permettre d'aboutir dans tous les cas à des résultats homogènes et propres à assurer la mise en oeuvre de la réforme prévue par l'ordonnance du 7 janvier 1959.

Au cours des précédentes revisions, les mêmes règles d'évaluation étaient appliquées uniformément à tous les immeubles :

- évaluation d'après les baux authentiques ou les locations en vigueur à la date de la revision, pour les immeubles loués dans des conditions normales ;

- évaluation des autres immeubles par comparaison (surface développée, nombre de pièces) avec des immeubles-types de même nature, loués ou non, mais dont la valeur locative cadastrale exprimait le cours normal des loyers dans la commune ou la région ;

- à défaut, évaluation par voie d'appréciation directe en appliquant un taux d'intérêt approprié à la valeur vénale des biens à évaluer, ce dernier procédé étant plus spécialement utilisé pour l'estimation des maisons exceptionnelles et des établissements industriels.

Ces modes d'évaluation ne sont pas rigoureusement abrogés, mais leur champ d'application est sensiblement modifié en raison :

- d'une part, pour les locaux affectés à l'habitation ou à un usage professionnel, de la difficulté à dégager la valeur locative cadastrale d'un immeuble en fonction seulement de ses conditions de location particulières ;

- d'autre part, pour les établissements industriels, de l'insuffisance des actes de location normaux et de la nécessité matérielle de procéder à leur évaluation globale suivant des règles uniformes, simples et forfaitaires.

Par ailleurs, l'Administration a dû tenir compte d'une manière toute particulière de l'affectation des immeubles.

A vrai dire, l'influence de l'affectation sur les conditions de location d'un immeuble n'a jamais été négligeable. Mais elle revêt aujourd'hui une importance primordiale par suite de l'intervention, sans cesse accrue, du législateur dans le domaine de la fixation des loyers (loi n° 48-1360 du 1 er septembre 1948 pour les locaux à usage d'habitation ou professionnel ; décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 relatif au statut des baux commerciaux et loi n° 57-6 du 5 janvier 1957 étendant aux artisans le champ d'application de ce statut).

Pour les besoins de la revision foncière, les Immeubles sont, en conséquence, répartis suivant leur caractère en deux groupes : les maisons et les établissements industriels.

Parmi les maisons, on distingue, selon leur affectation :

1. Les locaux affectés à l'habitation ou à un usage professionnel autre qu'agricole, commercial, artisanal ou industriel ;

2. Les locaux commerciaux et les biens divers - autres que les établissements industriels - passibles de la taxe foncière.

L'évaluation foncière des locaux d'habitation et à usage professionnel est effectuée par comparaison avec la valeur locative de locaux de référence choisis, dans la commune pour chaque nature et catégorie de locaux. Ces types sont eux-mêmes évalués par application à une base technique normalisée d'un tarif établi par commune ou secteur de commune, pour chaque nature et catégorie de locaux, en fonction du niveau moyen des loyers des locaux loués librement à des conditions de prix normales.

La valeur locative des locaux de référence, comme celle des locaux évalués par comparaison, est indépendante de leurs conditions de location particulières.

Au contraire, dans le second groupe des maisons, les immeubles continuent à être évalués suivant la méthode antérieure et, notamment, par utilisation directe du bail les concernant. Il en est ainsi des locaux à usage commercial, artisanal ou administratif.

Dans le secteur des établissements industriels, les Innovations apportées touchent à la fois à l'assiette de l'impôt et aux règles d'évaluation.

Sur le plan de l'assiette, les difficultés d'identification de l'outillage fixe et des installations assimilables à des constructions ont conduit le législateur à décider l'exonération dudit outillage fixe de la taxe foncière sur les propriétés bâties et à préciser celles des installations susvisées qui demeureront assujetties à cette taxe.

Quant aux règles d'évaluation de la généralité des établissements industriels, elles s'écartent sensiblement de celles actuellement en vigueur. Du fait de l'absence quasi totale de locations utilisables comme termes de comparaison et de la subjectivité - souvent incriminée par les redevables - de la méthode d'évaluation par voie d'appréciation directe sur la base de la valeur vénale, il est apparu indispensable de rechercher une formule qui soit à la fois mieux adaptée aux nouvelles structures industrielles et de nature à fournir des bases d'imposition plus homogènes.

Aussi bien le texte légal substitute-t-il à l'évaluation élément par élément une évaluation semi-globale par groupe d'éléments de même nature (terrains, constructions, outillage et autres moyens matériels d'exploitation), à partir des données comptables des établissements Industriels. Pour chacun de ces groupes d'éléments, la valeur locative sera déterminée en appliquant à leur prix de revient, d'abord actualisé, puis diminué pour certains d'entre eux d'abattements légaux ou réglementaires, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'État.

Ces règles d'évaluation ne sont toutefois, pas intégralement applicables aux petits établissements Industriels, notamment à ceux dont les propriétaires ne sont pas astreints de produire à l'Administration fiscale une comptabilité détaillée (forfaitaires par exemple). Dans ce cas, l'évaluation des terrains et bâtiments sera effectuée selon les règles traditionnelles conservées pour l'évaluation des locaux commerciaux.


2

PRINCIPES GÉNÉRAUX ET RÈGLES D'ÉVALUATION


Dans le cadre de la réforme des impositions perçues au profit des collectivités locales et de divers organismes, la loi n° 68-108 du 2 février 1968 (cf. B.O.C.D. 1968-I-575) fixe les règles d'évaluation des propriétés bâties qui trouveront leur première application à l'occasion de la première revision quinquennale des évaluations foncières des propriétés bâties.

Un décret du 28 novembre 1969 portant le n° 69-1076 (cf. B.O.C.D. 1969-I-647) en précise les conditions d'application.

En bref, le dispositif de la loi distingue :

- les principes généraux ;

- les règles d'évaluation particulières aux différentes sortes de propriétés bâties :

- locaux d'habitation et locaux à usage professionnel,

- locaux commerciaux et biens divers passibles de la taxe foncière,

- établissements industriels ;

- les règles de procédure ;

- la mise en application ;

- des dispositions diverses.

La présente instruction, dont les prescriptions ne sont pas applicables dans les départements d'Outre-Mer, a pour objet l'étude des principes généraux et des règles d'évaluation particulières aux différentes sortes de propriétés bâties (locaux d'habitation et à usage professionnel, locaux commerciaux et biens divers passibles de la taxe foncière) à l'exclusion des établissements industriels.


CHAPITRE PREMIER

GÉNÉRALITÉS


La première revision quinquennale des évaluations foncières des propriétés bâties est effectuée suivant des principes différents, au moins pour partie, de ceux appliqués lors des précédentes revisions exceptionnelles de 1924/25 et de 1939/43.

Avant d'exposer ces principes dans le détail, il convient de délimiter le champ d'application de la loi du 2 février 1968, d'indiquer la date de référence retenue et de préciser les conditions de répartition en deux groupes des propriétés bâties.


I.

CHAMP D'APPLICATION DE LA LOI


1La revision prescrite par la loi du 2 février1968 a pour objet la détermination de la valeur locative cadastrale des propriétés bâties (art. 1 er ).

L'emploi de cette expression limite en conséquence le champ d'application des chapitres I à III de la loi (art. 1 à 18) aux seuls biens passibles de la taxe foncière des propriétés bâties, c'est-à-dire, selon les articles 1381 et 1382 modifié du code général des impôts :

- les maisons,

- les établissements industriels munis de leurs moyens matériels d'exploitation,

- les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel,

- les installations commerciales ou industrielles assimilables à des constructions,

- les bateaux utilisés en un point fixe et aménagés pour l'habitation, le commerce ou l'industrie, même s'ils sont seulement retenus par des amarres,

- enfin, les terrains, cultivés ou non, utilisés pour la publicité commerciale ou industrielle par panneaux-réclames, affiches-écrans ou affiches sur portatifs spéciaux.

2Toutefois, pour assurer l'homogénéité des bases d'imposition, l'article 19-I de la même loi stipule que la valeur locative des biens qui ne sont pas passibles de la taxe foncière mais sont soumis à la taxe d'habitation, au droit proportionnel de la taxe professionnelle ou à certaines taxes annexes (taxe d'enlèvement des ordures ménagères, taxe pour frais de chambres des métiers) est déterminée, eu égard à leur nature, selon les règles fixées en matière de taxe foncière.

En définitive, si l'on excepte les propriétés non bâties, tous les biens de même affectation passibles d'une imposition directe locale sont évalués en se conformant à des règles identiques.