Date de début de publication du BOI : 01/11/1995
Identifiant juridique : 4J1334
Références du document :  4J1334
Annotations :  Lié au BOI 4J-1-05
Lié au BOI 4J-1-04
Lié au BOI 14B-3-03
Lié au BOI 4J-3-97

SOUS-SECTION 4 CONDITIONS D'EXIGIBILITÉ DE LA RETENUE À LA SOURCE

SOUS-SECTION 4  

Conditions d'exigibilité de la retenue à la source

1La retenue à la source ne frappe que les revenus encaissés par des personnes ayant leur domicile fiscal ou leur siège hors de France, et son exigibilité est subordonnée à l'encaissement effectif des revenus par les bénéficiaires ainsi définis.

Lorsque le bénéficiaire des revenus est résident 1 d'un État ou Territoire lié à la France par une convention fiscale, les dispositions de la convention affectent fréquemment le champ d'application et le taux de la retenue à la source.

Le Conseil d'État s'est prononcé à plusieurs reprises sur les stipulations des conventions internationales conclues par la France pour déterminer le régime fiscal applicable aux revenus réputés distribués au sens de la législation interne française.

  A. EXIGIBILITÉ DE LA RETENUE À LA SOURCE EN DROIT INTERNE

  I. Domicile ou siège des bénéficiaires

2Les revenus visés aux articles 119 bis -2 et 108 à 117 bis du CGI sont soumis à la retenue à la source si le bénéficiaire :

- n'est pas domicilié en France, s'il s'agit d'une personne physique. Le terme doit être entendu au sens de départements métropolitains et d'outre-mer de la République française (cf. 5 B 111) ;

- n'a pas son siège en France, s'il s'agit d'une personne morale (sur la définition du siège, cf. 4 H 1413 ). Le Conseil d'État a jugé que l'établissement stable situé en France d'une société ayant son siège hors de France devait être assimilé à un siège en France pour l'application de l'article 119 bis -2.

La retenue ne peut donc pas faire l'objet d'une liquidation globale sur l'ensemble des produits distribués ; elle est liquidée et prélevée distinctement sur ceux de ces produits qui sont attribués à des bénéficiaires entrant dans les prévisions de la loi, en ce qui concerne le lieu de leur domicile ou de leur siège.

3Si le bénéficiaire est une personne physique ayant son domicile fiscal hors de France, ou une personne morale dont le siège est situé hors de France, les produits sont soumis à la retenue de 25 % ; ils y échappent dans tous les autres cas, c'est-à-dire :

- d'une part, lorsqu'ils sont encaissés par des personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France ou par des personnes morales dont le siège est situé en France ;

- d'autre part, lorsque, faute d'avoir été encaissés en temps utile par les ayants droit ils se trouvent atteints par la prescription, soit au profit de l'État s'il s'agit de revenus ou valeurs mobilières négociables (Code du domaine de l'État, art. L. 27), soit au profit de la personne morale débitrice dans le cas contraire.

1. Domicile des personnes physiques.

4Le domicile fiscal des personnes physiques est celui qui est retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu.

C'est ainsi que doivent être regardées comme ayant leur domicile fiscal en France en application de l'article 4 B du CGI :

- les personnes qui ont en France leur foyer ou leur lieu de séjour principal ;

- celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ;

- celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Sont également considérés comme ayant leur domicile fiscal en France, les agents de l'État qui exercent leurs fonctions ou sont chargés de mission dans un pays étranger et qui ne sont pas soumis dans ce pays à un impôt personnel sur l'ensemble de leurs revenus.

2. Siège des personnes morales.

5Les dispositions de l'article 119 bis -2 du CGI selon lesquelles les produits des actions et parts sociales et les revenus assimilés sont soumis à la retenue à la source lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile réel ou leur siège en France ont pour objet d'exclure du champ d'application de la retenue les produits des actions qui bénéficient à des personnes soumises à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à raison d'un revenu comprenant, notamment, lesdits produits.

Par suite, dans un arrêt du 19 décembre 1975 (req. n°s 84774 et 91895), le Conseil d'État a considéré que ne sont pas passibles de la retenue à la source les dividendes perçus par l'établissement situé en France d'une société étrangère et qui sont normalement compris dans les résultats dudit établissement pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du code précité ; un tel établissement doit, en effet, être assimilé à un siège en France pour l'application de l'article 119 bis -2 rappelé ci-dessus.

6Cet arrêt, rendu par les 7e, 8e et 9e sous-sections réunies, infirme la doctrine administrative relative à l'exigibilité de la retenue à la source sur les produits des actions et parts sociales de sociétés françaises et revenus assimilés lorsque les produits ou revenus sont perçus par des établissements sis en France de personnes morales étrangères.

L'Administration, en effet, avait estimé que s'agissant des personnes morales, le siège social s'entendait en principe de celui fixé, suivant le cas, par les statuts s'il s'agissait d'une société, par les textes législatifs ou réglementaires qui avaient institué la personne morale s'il s'agissait d'un organisme de droit public.

7Toutefois, elle considérait que dans l'hypothèse où il avait été reconnu, à l'amiable ou à l'issue d'une instance devant la juridiction compétente, que le siège statutaire d'une société était fictif, c'était le siège social réel qu'il convenait de prendre en considération pour l'application de l'article 119 bis -2 du CGI.

8Le Conseil d'État a jugé, pour sa part, de façon implicite, mais certaine, que l'épithète « social » ajoutait au texte législatif et en restreignait la portée. Il a donc interprété le terme « siège » en dégageant l'esprit de la loi.

Les dividendes distribués par des sociétés françaises à des sociétés étrangères ayant un établissement en France ne sauraient bénéficier de l'avoir fiscal, même si, par ailleurs, ces dividendes sont repris dans les résultats imposables en France, dudit établissement ; en effet, l'article 158 ter réserve le bénéfice de l'avoir fiscal aux seules personnes ayant leur domicile réel ou leur siège social en France.

9Il appartient, d'autre part, aux sociétés étrangères qui entendent se prévaloir de la jurisprudence du Conseil d'État, d'apporter la preuve que les revenus mobiliers dont il s'agit sont compris dans les résultats d'établissements imposés en France.

Il a été décidé, par suite, de subordonner la non-perception de la retenue à la source à l'accomplissement des formalités indiquées ci-après :

10 a. L'établissement bénéficiaire desdits produits devra, préalablement à l'encaissement, établir en double exemplaire et faire viser par le service local des Impôts (fiscalité des entreprises), dont il dépend et qui en conserve un exemplaire, une attestation mentionnant les renseignements suivants :

- désignation et adresse à l'étranger de la société bénéficiaire du revenu ;

- adresse et numéro d'identification de l'établissement exploité en France ;

- lieu d'imposition en France des bénéfices de cet établissement ;

- raison sociale et adresse de la société distributrice ;

- numéro du coupon ou date d'échéance des produits distribués ;

- nature des sommes encaissées (dividende ou fraction restituable du précompte) ;

- montant mis en paiement par titre, nombre de titres et montant global encaissé ;

- désignation de l'établissement payeur et date probable d'encaissement ;

11 b. L'attestation visée par le service local sera remise à l'établissement payeur.

  II. Encaissement effectif des revenus

12Dès lors que la retenue à la source n'est applicable que dans la mesure où les revenus sont encaissés par des personnes ayant leur domicile ou leur siège hors de France, la question de savoir si cette retenue est exigible, ou non, du chef d'un coupon déterminé ne peut être résolue qu'au moment de l'encaissement de ce coupon, révélant l'identité et le domicile ou siège du bénéficiaire.

Il s'ensuit que le fait générateur de la retenue consiste, non pas dans la mise en paiement des produits, mais dans leur paiement effectif.

  B. INCIDENCE DES CONVENTIONS INTERNATIONALES

13Les conditions d'application de la retenue à la source telles qu'elles sont énumérées ci-dessus peuvent être modifiées par l'effet de certaines conventions internationales qui limitent ou suppriment le droit d'imposer de l'État de la source des revenus.

D'autre part le Conseil d'État apprécie au cas par cas si les produits distribués ont le caractère de dividendes au sens donné à ce terme par la convention fiscale (en ce sens notamment arrêts des 26 novembre 1982 n° 28177, 27 juillet 1984 n° 16649 et 30 mars 1987 n° 52754 Plén.)

Dès lors, en présence d'un revenu passible de la retenue à la source en droit interne et dont le bénéficiaire est résident (au sens de la convention applicable) d'un État ou Territoire lié à la France par une convention fiscale, il convient :

- de déterminer en premier lieu la qualification de ce revenu conformément à la convention applicable ;

- d'examiner ensuite si la convention permet d'appliquer une retenue à la source et, dans l'affirmative, si le taux est de 25 % ou inférieur.

  I. Qualification conventionnelle des revenus classés, en droit interne, dans les revenus distribués

14Les conventions fiscales classent les revenus en diverses catégories. L'une de ces catégories comprend généralement « les revenus de valeurs mobilières et les revenus assimilés » ou « les dividendes ». Il existe aussi quelques conventions atypiques.

1. Conventions qui visent « les revenus de valeurs mobilières et les revenus assimilés ».

15Il s'agit des conventions conclues avec le Bénin, le Burkina-Faso, le Cameroun, la République Centrafricaine, les Comores, la Côte d'Ivoire, le Danemark, le Gabon, le Mali, la Mauritanie, Mayotte (convention Comores), le Niger, la Polynésie française, le Sénégal et le Togo.

Ces conventions ne définissent pas l'expression « revenus de valeurs mobilières et revenus assimilés ». Elles précisent généralement que les termes ou expressions non définis dans la convention ont le sens qui leur est attribué en droit interne, à moins que le contexte n'exige une définition différente. Même en l'absence d'une telle précision, il y a lieu de retenir les définitions de droit interne si les autorités compétentes pour l'interprétation de la convention n'en ont pas disposé autrement de façon expresse.

Sous cette dernière réserve, il y a donc lieu de considérer que l'expression « revenus de valeurs mobilières et revenus assimilés » couvre notamment les revenus distribués au sens du droit interne.

On note que par deux arrêts du 5 décembre 1983 (n° 35697) et du 25 novembre 1985 (n° 40288), le Conseil d'État a conclu au bien-fondé de la retenue à la source appliquée, conformément aux conventions franco-camerounaise et franco-sénégalaise, sur des revenus distribués au sens de l'article 111 c du CGI (1er arrêt) ou des dispositions combinées des articles 109-1-1° et 110 du CGI et de l'article 47 de l'annexe II au CGI (2ème arrêt).

2. Conventions qui visent « les dividendes ».

16Ce sont les conventions les plus nombreuses. Elles se répartissent en deux groupes. Le premier comprend les conventions qui donnent une définition large de la notion de dividendes, le second les conventions qui définissent cette notion de façon plus étroite.

a. Définition large qui inclut tous les revenus distribués au sens du droit inteme.

17Ces conventions indiquent en substance que le terme « dividendes » désigne notamment « les revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale de l'État (ou du Territoire) dont la société distributrice est un résident ».

Il s'agit des conventions conclues avec l'Australie, la Bulgarie, le Canada et la province du Québec, la Chine, le Congo 2 , les États-Unis 3 , la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, Saint-Pierre et Miquelon, Trinité et Tobago, la Turquie, l'URSS.

L'ancienne convention franco-britannique du 14-12-1950 qui ne concerne maintenant que les résidents du Malawi et de la Zambie est assimilable à ces conventions. Elle vise en effet les revenus distribués sans les définir. Il y a donc lieu de retenir la définition qui résulte du droit interne, conformément à l'article 2-3 de cette convention.

b. Définition du type « modèle OCDE ».

18La convention modèle de l'OCDE indique que le terme « dividendes » désigne « les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mines, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus d'autres parts sociales soumis au même régime fiscal que les revenus d'actions par la législation de l'État dont la société distributrice est un résident ».

Les commentaires de cette définition par le comité des affaires fiscales de l'OCDE, qui a rédigé la convention modèle, sont reproduits ci-après à l'annexe II. Ils ne préconisent pas une interprétation littérale de la définition, qui pourrait avoir pour effet de favoriser les distributions déguisées par rapport aux distributions officielles.

Ces commentaires tendent à traiter notamment comme des dividendes, au sens de la convention modèle, les distributions occultes de bénéfices faites au profit des associés ou des personnes ayant des liens étroits avec les associés.

Il en résulte que les avantages qui profitent à ces personnes et qui sont considérés comme des revenus distribués en droit interne conservent ce caractère en droit conventionnel lorsque la convention applicable vise les dividendes et en donne une définition semblable à celle du modèle OCDE. En revanche, lorsqu'ils profitent à des personnes autres que les associés, ces avantages relèvent des dispositions conventionnelles relatives aux revenus « non dénommés », c'est-à-dire aux revenus qui n'entrent dans aucune des catégories expressément définies par la convention applicable. Le Conseil d'État a rendu plusieurs arrêts en ce sens au cours des dernières années (en particulier 27-7-1984 n° 16649 et 30-3-1987 n° 52754).

1   Les conventions les plus nombreuses font référence à la notion de résidence fiscale, tant pour les personnes physiques que pour les personnes morales ; les autres visent le domicile fiscal. Chaque convention précise comment doit être entendu l'expression « domicile fiscal » ou « résidence fiscale » pour l'application de cette convention.

2   Convention du 27.11.1987 entrée en vigueur le 1.09.1989.

3   La convention actuellement en vigueur résulte d'un avenant du 16-06-1988 applicable aux revenus distribués depuis le 1-02-1989. Cet avenant introduit désormais une définition du terme dividende qui inclut tous les revenus distribués. La retenue à la source doit donc être appliquée à tous les revenus distribués à compter de cette date.

Pour les revenus distribués avant le 1-02-1989, il convient de distinguer deux périodes :

- revenus distribués avant le 1-10-1985 : la retenue à la source doit être appliquée car les revenus non dénommés étaient alors imposables dans le pays de la source ;

- revenus distribués entre le 1-10-1985 et le 31-01-1989 : un avenant du 17 janvier 1984 ayant réservé le droit d'imposer les revenus non dénommés à l'État de résidence du bénéficiaire, la retenue à la source doit être appliquée aux revenus distribués à un associé (application de la solution visée au paragraphe A 2 b par référence à la convention « modèle OCDE »). En revanche, la retenue à la source ne doit pas être appliquée aux revenus distribués à un tiers.