Date de début de publication du BOI : 07/06/1999
Identifiant juridique : 4B123
Références du document :  4B123

SECTION 3 CESSION D'ÉLÉMENTS DE L'ACTIF IMMOBILISÉ

  VI. Donation d'éléments de l'actif

43Bien qu'effectuée sans contrepartie, la donation (ou cession à titre gratuit) d'un élément de l'actif immobilisé ou de la totalité d'un fond de commerce constitue une cession entrant dans les prévisions de l'article 38-1 du CGI, dès lors que cet article ne fait aucune distinction entre les différentes sortes d'aliénations, qu'elles aient lieu à titre onéreux ou à titre gratuit.

Par suite, les plus-values que font apparaître les évaluations mentionnées dans l'acte de donation par rapport à la valeur comptable des éléments cédés sont à comprendre dans les bases du bénéfice imposable du donateur (CE. arrêt du 1er juillet 1946, req. n° 79603, RO, p. 56)

44Toutefois, l'article 41-I du CGI dispose que la plus-value du fonds de commerce (éléments corporels et incorporels), constatée à l'occasion du décès de l'exploitant ou de la cession ou de la cessation par ce dernier de son exploitation, n'est pas comprise, sous certaines conditions, dans le bénéfice imposable lorsque l'exploitation est continuée, soit par un ou plusieurs héritiers ou successibles en ligne directe ou par le conjoint survivant, soit par une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée constituée exclusivement, soit entre lesdits héritiers ou successibles en ligne directe, soit entre eux et le conjoint survivant ou le précédent exploitant.

Il est rappelé que les dispositions de l'article 41-I du CGI ne s'appliquent pas aux plus-values constatées à l'occasion de transmissions d'entreprises à titre onéreux ou d'apports en sociétés visés aux I et II de l'article 151 octies, mais sont applicables à toute transmission à titre gratuit d'entreprise individuelle (CGI, art. 41-II ; cf. DB 4 B 3522 ).

45Par ailleurs, il a été jugé que, pour pouvoir taxer la plus-value qu'elle estime résulter de la rétrocession d'un fonds de commerce, l'Administration doit être en mesure d'apporter la preuve de la réalité de la mutation du fonds de commerce (CE, arrêt du 14 mars 1984, n° 36 237).

Nota. - Par suite de l'incapacité prolongée de son père, victime d'un très grave accident, le contribuable avait pendant plusieurs années assuré la gestion de son fonds de commerce, sans que l'Administration puisse établir d'abord la cession, ensuite la rétrocession dudit fonds.

Donation en nue-propriété.

46La donation d'éléments de l'actif immobilisé peut être consentie sous réserve d'usufruit au profit du donateur.

Dans une telle situation, les plus-values (ou moins-values) acquises par les éléments faisant l'objet de la donation doivent, dans la mesure où elles correspondent à la nue-propriété, être comprises dans les bénéfices imposables de l'exercice en cours à la date de la donation. Il en est de même lorsque la donation en nue-propriété porte sur la totalité d'un fonds de commerce dont le donateur conserve l'exploitation en usufruit.

47Les plus-values dégagées à cette occasion sont, en principe égales à la différence entre, d'une part, la valeur attribuée, pour le calcul des droits de mutation prévu à l'article 762 du CGI, à la nue-propriété des éléments donnés et, d'autre part, la valeur comptable de la nue-propriété de ces mêmes éléments au jour de la donation. En fait, elles peuvent être déterminées en appliquant au montant des plus-values qui eussent été imposables en cas de cession en pleine propriété des biens transmis, le rapport existant entre la valeur de la nue-propriété et la valeur de la pleine propriété des biens dont il s'agit, tel qu'il est fixé pour la liquidation des droits de mutation.

48Il convient de préciser qu'une donation sous réserve d'usufruit ne saurait être considérée comme s'analysant en une cession d'entreprise suivie d'une location gratuite consentie au donateur par le donataire. Par suite, le donateur ne peut se prévaloir, lors d'une donation de l'espèce à un successible en ligne directe, de l'exonération édictée à l'article 41-II du CGI, dont l'application est subordonnée à la cession ou à la cessation de son entreprise par le précédent exploitant.

49Lors de l'extinction de l'usufruit, aucune imposition ne sera établie du chef des éléments ainsi donnés en nue-propriété et il ne saurait, en conséquence, être envisagé, à cette époque, de faire application, à raison de ces mêmes éléments, des dispositions de l'article 41-II précité. Sur cette question, cf. ci-après DB 4 B 3522 .

  VII. Retrait pur et simple d'un élément de l'actif

1. Entreprises individuelles.

50Les dispositions de l'article 38-1 du CGI selon lesquelles le bénéfice net de l'entreprise est déterminé en tenant compte, notamment, des cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation, est applicable non seulement au cas où il est procédé à la cession à un tiers d'un bien compris jusqu'alors dans les éléments composant l'actif de l'entreprise et dont la valeur figurait dans la comptabilité commerciale, mais aussi dans le cas du retrait dudit élément de l'actif de l'entreprise en vue de son incorporation au patrimoine privé de l'exploitant.

Ainsi, il a été jugé que le contribuable qui a cessé l'exploitation de son entreprise commerciale personnelle doit être regardé comme ayant recueilli dans son patrimoine privé les parts d'une société qui figuraient à l'actif de son bilan. La plus-value constatée à l'occasion de ce transfert et dont l'intéressé doit être réputé avoir eu la disposition est égale à la différence entre la valeur réelle des parts à cette date et la valeur pour laquelle elles étaient inscrites au bilan (CE, arrêt du 5 décembre 1973, req. n° 86298, RJ, n° II, p. 154).

Dans le cas d'un contribuable qui a cédé à son épouse l'entreprise, qu'il exploitait personnellement jusqu'au 31 décembre d'une année donnée, et dont l'actif comportait, à cette dernière date, plusieurs immeubles, il convient de considérer que l'intéressé a fait passer ces derniers dans son patrimoine personnel, dès lors que les écritures du bilan d'ouverture de l'entreprise de sa femme, au 1er janvier suivant, ne faisaient plus mention desdits immeubles.

La plus-value dégagée à cette occasion constitue donc pour l'intéressé un profit imposable en vertu de l'article 38 du CGI, nonobstant la circonstance que les immeubles en cause ont continué, en fait, à être utilisés pour l'exploitation de l'entreprise. Par ailleurs, le transfert n'ayant été réalisé que lors de l'établissement du bilan d'ouverture de l'entreprise de la femme, c'est au titre de cette année-là qu'il y a lieu d'imposer la plus-value qui a ainsi été réalisée par le mari postérieurement à la clôture de son dernier exercice au 31 décembre précédent (CE, arrêt du 2 février 1972, req. n° 75616, RJ, n° II, p. 16).

Toutefois, s'agissant de la date de rattachement de la plus-value de retrait, cette dernière jurisprudence est infirmée par l'arrêt du Conseil d'État du 25 octobre 1991 (n°74938, n° 74940, n° 114759 et n°114760) : dans le cas d'une indivision successorale cessant son activité commerciale le 31 décembre d'une année, la plus-value réalisée par l'indivision à raison du transfert dans le patrimoine privé des indivisaires est rattachée, pour son imposition, à l'exercice au titre duquel intervient la cessation et non à l'exercice ultérieur.

2. Sociétés.

51Les règles relatives au retrait ont une portée générale. Elles s'appliquent de la même façon lorsque, dans une société de fait, un bien qui appartenait à l'un des associés mais qui était jusqu'alors compris dans les éléments figurant à l'actif du bilan de l'entreprise exploitée par la société, se trouve repris par cet associé en vue de le gérer à titre purement civil (CE, arrêt du 10 juillet 1974, req. n° 84702, RJ, n° II, p. 111).

52D'une manière plus générale lorsqu'un immeuble qui figurait à l'actif d'une société est repris par les associés, la plus-value résultant de la différence entre la valeur réelle dudit immeuble et sa valeur nette comptable doit être comprise dans les bénéfices imposables de la société ; cette situation est la conséquence de dispositions législatives propres à l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux et elle ne saurait être tenue en échec par les interprétations données, par les juridictions compétentes, des textes relatifs aux droits de mutation et, notamment, pour la théorie dite de la « mutation conditionnelle » (CE, arrêt du 13 juillet 1963, req. n° 58267, RO, p. 402).

Nota. - Il convient de préciser, à cet égard. que la théorie dite de la « mutation conditionnelle » invoquée, au cas particulier, par la société requérante est destinée à éviter une double perception éventuelle en matière de droits d'enregistrement. Elle prévoit, en effet, que l'apport en société d'un corps certain et sa reprise lors du retrait de l'actif social, par des associés apporteurs, n'entraînent la perception d'aucun droit de mutation. Cette théorie -qui, bien que consacrée par les tribunaux judiciaires, est d'origine administrative- a été confirmée par le législateur (CGI, art. 727). Mais elle n'altère nullement le caractère translatif de propriété que possèdent à la fois l'apport en société et le retrait de l'actif social et ne permet pas de conclure que la société n'a jamais été propriétaire du bien dont il s'agit.

  VIII. Destruction ou mise hors service d'éléments de l'actif immobilisé

53Le retrait définitif d'un élément usagé de l'actif immobilisé en vue de sa mise hors service ou sa destruction doit être assimilé à une cession de cet élément. La perte qui en résulte constitue, par suite, non une simple perte d'exploitation, mais une moins-value déductible dans les conditions prévues aux articles 39 duodecies et suivants du CGI. En fait, s'agissant par hypothèse, d'une immobilisation amortissable, la moins-value est rangée dans les moins-values à court terme et soumise à un régime fiscal identique à celui d'une perte d'exploitation (cf. ci-après DB 4 B 242 ).

Les charges ou pertes affectant les immobilisations qui ne donnent pas lieu à un amortissement tels les éléments incorporels du fonds de commerce, ne peuvent être prises en compte dans les résultats imposables d'une entreprise que sous la forme d'une provision ou d'une moins-value. Si la dépréciation de ces éléments est soit partielle, soit totale, mais non définitive, elle ne peut, conformément aux dispositions de l'article 38 sexies de l'annexe III au CGI, qu'être constatée au moyen d'une provision déductible des résultats imposables au taux de droit commun. Si la dépréciation est totale et définitive, elle doit se traduire par la sortie de l'actif de l'élément correspondant, et donc, par la constatation d'une moins-value.

  IX. Cession d'éléments de l'actif résultant d'événements indépendants de la volonté de l'entreprise (expropriation, expulsion, réquisition, etc.)

[cf. aussi DB 4 A 242, n°s 18 à 39]

54Conformément aux dispositions de l'article 38 du CGI, le bénéfice imposable est déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises et qui se traduisent par une modification des valeurs de l'actif net, sans qu'il y ait lieu de rechercher si lesdites opérations ont eu pour cause un événement dépendant ou indépendant de la volonté de l'exploitant.

Il s'ensuit que le caractère de profits imposables (ou de pertes déductibles) doit être attribué à toutes les plus-values (ou moins-values) résultant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé, que celle-ci soit réalisée librement par l'entreprise dans le cadre de sa gestion ou qu'elle lui soit imposée par des événements indépendants de sa volonté.

Ainsi, la plus-value réalisée par un contribuable à l'occasion de la cession forcée d'un fonds de commerce a le caractère d'un profit imposable, car, en admettant que cette cession ait une cause indépendante de la volonté de l'exploitant, elle affecte directement un élément de l'actif de son entreprise et ne peut, dès lors, être regardée comme étrangère à sa gestion commerciale (CE, arrêt du 5 janvier 1948, req. n° 80717, RO, p. 6).

1. Indemnités d'expropriation.

55Les indemnités qui ont pour objet de compenser le transfert de propriété ou la perte d'éléments de l'actif immobilisé sont assimilées à un prix de cession.

En conséquence, le profit ou la perte résultant de la différence entre le montant de ces indemnités et la valeur nette comptable du bien exproprié est soumis au régime fiscal des plus-values ou moins-values à court ou à long terme, prévu par les articles 39 duodecies et suivants du CGI 1 .

On précise à ce sujet que, par dérogation aux dispositions générales, les plus-values d'expropriation se rapportant à des immeubles bénéficient d'un traitement privilégie prévu par les articles 39 quaterdecies-1 ter et 39 quindecies-1, dernier alinéa, du code précité.

En revanche, les indemnités qui ne sont pas allouées en contrepartie de la valeur d'éléments de l'actif immobilisé doivent être rattachées aux bénéfices de l'entreprise imposables au taux normal.

Il est précisé par ailleurs qu'une entreprise expropriée d'un bien figurant à son actif devient titulaire d'une créance certaine dans son principe et dans son montant à la date du jugement qui a fixé l'indemnité d'expropriation. Elle est dès lors tenu de faire figurer cette créance comme valeur d'actif au bilan de clôture de l'exercice en cours, même si le jugement ne lui a été notifié qu'au cours de l'exercice suivant.

Enfin, un contribuable qui a été exproprié de son fonds de commerce moins de cinq ans après l'acquisition de celui-ci ne pouvait prétendre, pour l'imposition de la plus-value réalisée à cette occasion, au régime spécial de taxation prévu par l'article 200 du CGI 2 bien qu'il s'agisse d'un événement indépendant de sa volonté (CE, arrêt du 25 avril 1960, req. n° 48451, RO, p. 59).

1   Ou, le cas échéant, au régime résultant des articles 150 A à 150 T du CGI (cf. art. 151 septies du même code).

2   Disposition codifiée sous l'article 39 terdecies-3 et abrogée à compter du 1er janvier 1977.