Date de début de publication du BOI : 20/10/1999
Identifiant juridique : 3A124
Références du document :  3A124

SECTION 4 IMPOSITION DES CESSIONS DE BIENS MOBILIERS D'INVESTISSEMENT

SECTION 4

Imposition des cessions de biens mobiliers d'investissement

1Avant le 1er janvier 1990, sous réserve des dispositions des articles 257-13° et 15° du CGI et 24 de l'annexe IV à ce code, les ventes de biens mobiliers usagés faites par les personnes qui les avaient utilisés pour les besoins de leur exploitation n'étaient pas imposables à la TVA.

En contrepartie de cette exonération, lorsque la cession intervenait dans le délai de régularisation fixé à l'article 210-II de l'annexe II au CGI, la TVA effectivement déduite pour ce bien devait faire l'objet d'une régularisation.

L'application combinée des articles 13-B-c de la 6ème directive TVA et 1er-2-a de la 18ème directive TVA ne permet plus de maintenir à compter du 1er janvier 1990 ce dispositif d'exonération avec régularisation.

En effet, l'article 13-B-c de la 6ème directive ne prévoit d'exonération que pour les livraisons de biens qui étaient affectés exclusivement à une activité exonérée si ces biens n'ont pas fait l'objet d'un droit à déduction et pour les livraisons de biens dont l'acquisition ou l'affectation était exclue du droit à déduction.

Par ailleurs, la 18ème directive TVA, adoptée le 18 juillet 1989, fait obligation aux États membres d'imposer, à compter du 1er janvier 1990, toutes les cessions de biens mobiliers d'investissement au-delà du délai de régularisation des droits à déduction.

2L'imposition à la TVA devient donc la règle communautaire pour toutes les livraisons de biens mobiliers d'investissement.

L'article 31-I de la loi de finances pour 1990 (JO du 30 décembre 1989) adapte en ce sens le droit interne au droit communautaire. Il modifie à cet effet l'article 261-3-1°-a du CGI.

3Parallèlement, la prise en compte de l'ensemble des dispositions de la 6ème directive relatives au prélèvement, à la transmission gratuite et à l'affectation de biens à des fins étrangères à l'entreprise conduit, en application de l'article 257-8° du CGI, à étendre aux biens mobiliers d'investissement l'application de la taxation des livraisons à soi-même.

4Les développements ci-dessous (n°s 5 et suivants ) précisent la portée de ce dispositif de taxation des cessions de biens mobiliers d'investissement, les modalités d'imposition, les modifications apportées au champ d'application de la taxation des livraisons à soi-même d'immobilisations, ainsi que les conséquences de ces taxations sur les régularisations des déductions antérieures. Le tableau joint en annexe résume les principales situations concernées.

  A. LE DOMAINE D'APPLICATION DE LA TAXATION DES BIENS MOBILIERS D'INVESTISSEMENT

  I. Principe

5Dans sa rédaction, issue de l'article 31-I de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989, l'article 261-3-1°-a du CGI exonère de TVA les ventes de biens usagés faites par les personnes qui les ont utilisés pour les besoins de leur exploitation. Mais cette exonération ne s'applique qu'aux cessions de biens mobiliers d'investissement qui ne pouvaient pas ouvrir droit à déduction, en raison soit de leur affectation à une activité exonérée ou hors du champ d'application de la TVA, soit d'une mesure d'exclusion particulière.

6Les cessions des autres biens mobiliers d'investissement sont donc toujours soumises à la TVA.

  II. Biens et opérations concernés par la taxation

1. Les biens d'investissement concernés.

7Il s'agit des ventes de biens usagés faites par les personnes qui les ont utilisés pour les besoins de leur exploitation, c'est-à-dire, conformément à l'article 13-B-c de la 6ème directive TVA, des biens meubles corporels qu'un assujetti utilise pour les besoins de l'exercice de son activité imposable (ex : matériel et outillage industriels, matériel de transport, matériel de bureau et informatique, cheptel et chevaux de course).

8La notion de biens usagés correspond en règle générale à celle des biens mobiliers constituant des immobilisations, mais peut être plus large dès lors que le critère communautaire est uniquement lié à l'utilisation préalable du bien par l'entreprise, sans condition de durée minimale d'affectation à ses besoins.

9Le régime applicable aux cessions d'immeubles n'est pas modifié ; les ventes d'immeubles demeurent donc exonérées sauf s'il s'agit de leur première mutation dans les cinq ans de l'achèvement (CGI, art. 257-7° et 210-I de son annexe II).

10De même le dispositif d'imposition à la TVA des ventes d'aéronefs à des personnes autres que les compagnies internationales (article 257-13° du CGI), de certains bateaux à des personnes autres que les professionnels (article 257-15° du CGI) demeure sans changement (cf. DB 3 A 1274 et 3332  ; DB 3 A 1275 et 3331 ).

11Enfin il est rappelé que les cessions de biens meubles incorporels sont déjà imposables en application de l'article 256-IV du CGI.

a. Les biens ont ouvert droit à déduction de la TVA.

1 ° L'exonération est résiduelle.

12L'exonération de la cession des biens mobiliers d'investissement demeure applicable aux biens qui n'ont pas ouvert droit à déduction, soit en raison de leur affectation à une activité exonérée, ou de l'application d'une mesure d'exclusion particulière.

Sont donc susceptibles d'être exonérées de la TVA les cessions de biens mobiliers d'investissement suivants :

- biens utilisés par une personne pour les besoins d'une activité non soumise à la TVA, c'est-à-dire d'une activité hors du champ d'application ou exonérée ;

- biens utilisés par un assujetti pour les besoins de l'activité d'un secteur ne réalisant pas d'opérations ouvrant droit à déduction ; ex : biens affectés à l'activité d'un service optionnel d'une collectivité locale pour lequel l'option n'a pas été exercée ;

- biens dont la cession est visée par une exonération expresse ou qui ne pouvaient pas être soumis à la TVA lors de leur acquisition (ex : cession de titres immobilisés) ;

- biens exclus du droit à déduction. Toutefois, lorsque de tels biens sont cédés à des négociants en biens d'occasion, il demeure admis que la cession puisse volontairement être soumise à la taxe pour permettre ainsi au cédant de bénéficier d'un droit à déduction complémentaire (cf. les opérations à l'exportation n° 43). Le droit à déduction complémentaire est également accordé lorsque les biens mobiliers d'investissement sont exportés.

13Lorsque l'exonération est applicable, le cédant peut délivrer au bénéficiaire l'attestation de transfert du droit à déduction dans les conditions et limites prévues à l'article 210-IV de l'annexe II au CGI.

2° La taxation devient la règle.

14Elle doit être appliquée dans tous les cas, c'est-à-dire à tous les biens mobiliers d'investissement qui ont ouvert droit à déduction, totalement ou partiellement, préalablement à leur cession.

15Le critère de la taxation de la cession d'un bien réside ainsi dans le seul fait que ce bien a ouvert droit à déduction de tout ou partie du montant de la TVA, avant sa cession, que ce droit à déduction ait été effectivement exercé ou non.

Cette condition selon laquelle les biens taxables sont ceux qui ont ouvert droit à déduction s'apprécie chez le cédant et non pas chez les propriétaires antérieurs 1 .

Ainsi dès lors que le bien a ouvert droit à déduction de la TVA chez le cédant, la cession est imposable, quelle que soit la situation des biens au regard des droits à déduction chez les précédents vendeurs.

16En revanche, tout assujetti qui cède un bien mobilier d'investissement qu'il a acquis sans avoir pu exercer de droit à déduction total ou partiel, préalablement à la cession, n'a pas à soumettre cette dernière à la TVA.

17Pour les biens mobiliers immobilisés acquis avant le 1er janvier 1990 dans le délai de régularisation prévu à l'article 210 de l'annexe II au CGI, le droit à déduction peut résulter d'une attestation délivrée par le cédant à l'acheteur.

Dans ce cas la cession ultérieure de ces biens qui intervient après le 1er janvier 1990 est taxable dans les conditions de droit commun.

Exemple : Un assujetti redevable A a cédé en 1989 une immobilisation (ex : ordinateur) acquise en 1988 à un autre assujetti utilisateur redevable B. Celui-ci a pu déduire la taxe figurant sur l'attestation délivrée par A. Si B revend cet ordinateur en 1991 à C, la cession sera taxable.

18En principe, un bien ouvre droit à déduction dès son acquisition, importation, acquisition intracommunautaire ou livraison à soi-même. Cependant, à titre exceptionnel, l'ouverture du droit à déduction peut être postérieure à l'acquisition, l'importation, l'acquisition intracommunautaire ou la livraison à soi-même (exemples : assujettis devenant redevables de plein droit ou sur option, autorisant le calcul d'un crédit de départ ; changement d'affectation d'un bien d'un secteur exonéré à un secteur imposable).

19Par ailleurs, dans le cadre de la transmission d'une universalité totale ou partielle de biens, lorsqu'il est admis que la cession ne soit pas soumise à la TVA (voir ci-dessous n°s 21 et suiv. ), l'ouverture éventuelle du droit à déduction qui motive la taxation de la cession ultérieure doit être recherchée chez le cédant ou l'apporteur dès lors que le bénéficiaire continue la personne du cédant.

En effet, la taxation des cessions ultérieures de biens mobiliers d'investissement acquis ou apportés dans le cadre d'une universalité totale ou partielle de biens est exigible dès lors que le bien n'était ni exclu du droit à déduction ni affecté à une activité exonérée (article 13-B-c de la sixième directive).

Bien entendu, sous ces conditions, la taxation ne sera exigible que si la cession n'est pas exonérée par une disposition particulière.

2. Les opérations concernées.

20Les nouvelles dispositions concernent en principe toutes les cessions à titre onéreux de biens mobiliers d'investissement, quels que soient l'acquéreur et le délai écoulé entre la date d'acquisition et la date de la cession : ventes, biens cédés dans le cadre d'une mutation de fonds de commerce, cessions par voie d'apport en société.

Notamment, il est précisé qu'elles s'appliquent aux apports de ces biens, qu'ils soient effectués à titre onéreux (ex : apport vente rémunéré par une remise d'obligations ou par la prise en charge d'une dette) ou à titre pur et simple (contre remise de droits sociaux) et ce indépendamment du régime appliqué au regard des droits d'enregistrement.

3. Cas particuliers.

a. Transmission d'une universalité totale ou partielle de biens.

21La 6ème directive permet de ne pas exiger l'imposition à la TVA des cessions de biens lorsqu'elles sont effectuées dans le cadre de la transmission à titre onéreux ou sous forme d'apport à une société d'une universalité totale ou partielle de biens dès lors que le bénéficiaire continue la personne du cédant. Cependant, dans cette situation, elle autorise les États membres à prendre les dispositions nécessaires pour éviter des distorsions de concurrence dans le cas où le bénéficiaire n'est pas un assujetti total.

1 ° Définition de la transmission d'une universalité totale ou partielle de biens.

22Elle se définit comme la transmission de l'ensemble d'une entreprise, d'exploitation ou d'une branche complète d'activité.

La notion de branche complète d'activité recouvre l'ensemble des éléments investis dans une division de société qui constitue au point de vue technique une exploitation autonome, c'est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens dans des conditions pouvant être qualifiées de normales dans le secteur considéré (cf. DB 4 I 2211 ).

Il s'agit notamment :

- des apports globaux, effectués dans le cadre d'une opération de fusion ou d'absorption, ou d'apports partiels à l'occasion par exemple de la restructuration d'un groupe (apport d'une branche complète d'activité) ;

- des mutations à titre onéreux de fonds de commerce (cf. DB 7 D 2111) ou d'exploitations agricoles, commerciales ou professionnelles ;

- de la transmission d'une entreprise à la suite d'une procédure d'apurement collectif du passif.

2° Modalités d'application de la dispense de taxation.

• Principe.

23Lorsque la cession (ou l'apport) des biens mobiliers d'investissement est réalisée par un assujetti redevable au bénéfice d'un autre assujetti redevable, la taxation de la cession des biens mobiliers d'investissement n'est pas exigée si la société bénéficiaire de l'apport ou l'acquéreur s'engage dans l'acte de fusion, d'apport ou de vente à soumettre à la TVA les cessions ultérieures des biens et à procéder le cas échéant aux régularisations prévues aux articles 210 et 215 de l'annexe II au CGI qui auraient été exigibles si l'apporteur ou le cédant avait continué à utiliser le bien.

24En cas de cession ultérieure du bien, la taxation doit être exigée.

25L'engagement dans l'acte auquel est subordonnée la dispense de taxation doit en outre faire l'objet d'une déclaration en double exemplaire auprès du service des impôts dont relève la société absorbante ou bénéficiaire des apports ou le nouvel exploitant ; le service des impôts adresse un de ces exemplaires au service dont dépend la société absorbée ou apporteuse ou le précédent exploitant.

26 Remarque  : la taxation demeure exigible lorsque la transmission d'une universalité totale ou partielle est réalisée par un assujetti redevable de la taxe au bénéfice d'un assujetti non redevable (exemple : mutation d'une exploitation agricole d'un agriculteur imposable sur option au profit d'un agriculteur non imposable).

• Cas de liquidation judiciaire : dispense de taxation.

27La dispense de taxation trouve à s'appliquer lorsque les cessions de biens mobiliers d'investissement sont réalisées dans le cadre d'un plan de cession totale ou partielle de l'entreprise (art. 81 de la loi du 25 janvier 1985) ou d'une cession globale d'unités de production faite en cas de liquidation judiciaire (art. 155 de la même loi).

• Cas des biens meubles incorporels : dispense de taxation.

28En application de l'article 256-IV du CGI, les cessions de biens meubles incorporels sont imposables à la TVA.

Toutefois, lorsqu'ils font l'objet d'une vente dans le cadre d'une cession de fonds de commerce, ou de clientèle, ou dans le cadre d'une convention assimilée, il est admis que les biens meubles incorporels ne sont pas soumis à la TVA, dès lors que cette cession est soumise aux droits proportionnels d'enregistrement dans les conditions prévues aux articles 719 et 720 du CGI (cf. DB 3 A 1151, n°s 1 à 3 et DB 3 A 1156, n° 9 ).

Cette dispense d'imposition n'est pas subordonnée à la souscription d'un engagement, à la différence de ce qui est prévu pour la dispense de taxation des biens meubles corporels d'investissement transmis dans le cadre d'une universalité totale ou partielle de biens.

• Base d'imposition des biens mobiliers d'investissement.

29En cas de non respect des conditions posées pour la dispense de taxation dans le cadre d'une transmission d'une universalité totale ou partielle de biens (ex : cession d'un fonds de commerce), la base d'imposition à la TVA est constituée par le prix des biens mobiliers d'investissement exprimé dans l'acte, ou de façon générale, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le cédant en paiement de ces biens (CGI, art. 266-1-a).

Ce prix est présumé toutes taxes comprises dès lors qu'aucune considération de fait ou de droit ne permet d'établir que les parties ont entendu traiter sur la base d'un prix hors taxe. Le cédant doit établir une facture comportant les mentions légales prévues à l'article 289 du CGI (cf. n° 36 et réponse ministérielle à la question écrite n° 33270 posée le 3 septembre 1990 par M. Édouard FREDERIC-DUPONT, député, publiée au JO du 25 février 1991, p. 713).

• Cas des agencements commerciaux.

30Les agencements commerciaux, (revêtement de sol, enseignes lumineuses, rayonnages, aménagements de vitrines, etc.) qui sont compris dans une cession de biens mobiliers d'investissement sont taxables dans les conditions prévues pour les autres biens meubles corporels d'investissement.

Mais si cette cession intervient dans le cadre de la transmission d'une universalité totale ou partielle de biens (vente du fonds), la dispense de taxation prévue aux n°s 21 et suivants s'applique dans les mêmes conditions à ces agencements commerciaux.

1   En revanche, cette condition s'apprécie chez le précédent propriétaire lorsque, dans le cadre du transfert d'une universalité totale ou partielle de biens (cf. n°s 21 et suiv. ), le bénéficiaire continue la personne du cédant.