SECTION 4 RÉGIME DES DÉDUCTIONS
SECTION 4
Régime des déductions
1Aux termes de l'article 271-I du CGI, la TVA qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la TVA applicable à cette opération.
Ce principe est de portée générale et s'applique par conséquent aux exploitants agricoles imposables à la TVA, obligatoirement ou sur option, sous réserve de quelques adaptations spécifiques exposées ci-après.
2La présente section est consacrée :
- aux biens ou services ouvrant droit à déduction (sous-section 1) ;
- au pourcentage de déduction (sous-section 2) ;
- à la date à laquelle la déduction peut être opérée (sous-section 3) ;
- aux remboursements de crédits non imputables (sous-section 4).
SOUS-SECTION 1
Biens et services ouvrant droit à déduction
1D'une manière générale les exclusions du droit à déduction dans le régime de la TVA en agriculture sont identiques à celles existant dans le régime de droit commun de la taxe (cf. division D). Toutefois, la distinction, dans le domaine agricole, des biens qui constituent ou non des immobilisations pouvant susciter quelques hésitations, les précisions suivantes sont fournies à titre indicatif.
A. BIENS CONSTITUANT DES IMMOBILISATIONS
2Les biens qui constituent des immobilisations dans une exploitation agricole et qui ouvrent droit à déduction dans les conditions prévues aux articles 208 à 215 de l'annexe II au CGI sont les immeubles, les matériels et les véhicules. D'une manière générale pour déterminer le caractère d'immobilisation d'un bien, il convient, en l'espèce, de se reporter à la doctrine et à la jurisprudence établies en matière d'impôts directs.
I. Immeubles
3Constituent des immeubles tous les bâtiments à usage agricole : étables, hangars, silos, serres, etc., et les installations fixes telles que clôtures, barrières, etc.
Mais n'ouvrent pas droit à déduction les bâtiments d'habitation de l'exploitant et de ses ouvriers agricoles, les garages de véhicules privés. Toutefois, la TVA afférente aux dépenses exposées pour le logement du personnel de surveillance peut être déduite si ce personnel est affecté de manière permanente (mais non exclusive) à la surveillance ou à la sécurité de l'exploitation agricole (CE du 30 mai 1979, n° 11196, 7e et 8e s.-s.).
De même, ouvre droit à déduction la taxe ayant grevé l'acquisition des locaux ou matériels destinés à un usage collectif de la part du personnel (cantines, réfectoires, dortoirs, notamment destinés aux vendangeurs saisonniers).
II. Matériel
4Ouvrent droit à déduction au titre des immobilisations les matériels et machines agricoles tels que : tracteurs, motoculteurs, matériels de culture du sol (charrues, herses, pulvérisateurs, etc.) ; les distributeurs d'engrais, épandeurs de fumiers, semoirs, appareils pour la lutte contre les parasites et les mauvaises herbes ; appareils d'aspersion ou d'irrigation ; matériels de récolte des céréales, du fourrage, des pommes de terre, des betteraves, etc. ; appareils de traite ; séchoirs ; pressoirs, appareils de manutention (élévateurs, vis, etc.) : machines à calibrer et à trier les fruits et légumes, etc.
III. Véhicules
5Les véhicules agricoles ouvrent droit à déduction dans les conditions générales, il en est ainsi des remorques, chariots, tombereaux, etc.
IV. Modalités de la déduction
6Pour les immobilisations, les modalités de déduction sont déterminées par la règle du prorata, sauf application des règles de la sectorisation lorsque les investissements sont affectés physiquement à la réalisation d'activités économiques distinctes soumises à des dispositions non identiques au regard de la TVA.
B. BIENS NE CONSTITUANT PAS DES IMMOBILISATIONS
Ces biens comprennent notamment :
1. Les biens qui sont consommés au cours des cycles de production agricole.
7Dans le domaine de la production végétale, ce sont, par exemple, les semences, les engrais, les produits antiparasitaires, la ficelle lieuse, l'eau, l'électricité, etc. Dans le domaine de la production animale, il convient de citer les fourrages, la paille, les aliments du bétail, etc.
a. Plantations.
8 À moins que l'exploitant agricole redevable de la TVA ne tienne une comptabilité très précise de ses plantations, et veuille se prévaloir du caractère d'immobilisations de celles-ci, il est admis, par dérogation aux règles suivies en l'espèce en matière d'impôts directs, que les plantations d'arbres et d'arbustes (ou plantes assimilées : vignes...) ne soient pas considérées comme des immobilisations pour l'appréciation des droits à déduction en matière de TVA.
b. Animaux.
9Sous les mêmes réserves, on considère que tout le cheptel d'un exploitant agricole quelle que soit son utilisation (animaux de trait ou de reproduction) ne constitue pas une immobilisation, notamment en cas de renouvellement.
2. Les biens qui ne sont pas consommés au cours du cycle de production agricole.
10Il s'agit du petit matériel ou du petit outillage utilisé dans les exploitations agricoles et qui ne constituent pas des immobilisations au sens du paragraphe A ci-dessus : outillage de manutention (pelles, fourches, râteaux...) outillage d'élevage (chaînes...), outillage de réparation (marteaux, tournevis, clefs), outillage forestier (haches, scies...).
C. CAS PARTICULIERS
I. Consommation d'eau et d'électricité
11Lorsqu'un exploitant agricole redevable de la TVA ne dispose que'd'un seul compteur pour la distribution de l'eau et de l'électricité dans l'ensemble de son exploitation, y compris ses locaux d'habitation, il lui appartient d'évaluer les quantités d'eau et d'électricité consommées dans le secteur agricole taxé afin de déterminer la fraction de taxe dont la déduction peut être opérée.
II. Réparations de biens
12Les exploitants agricoles redevables de la TVA peuvent opérer, dans les conditions de droit commun, la déduction de la TVA ayant grevé la réparation de biens déductibles qu'ils ont en location, dès lors que le coût de la réparation reste définitivement à leur charge. Tel est le cas des exploitants agricoles preneurs de baux à ferme qui procèdent, à leurs propres frais, à la réparation des immeubles ruraux qu'ils ont à bail. Les preneurs de baux à ferme peuvent également déduire la TVA afférente aux travaux de grosses réparations ou d'amélioration d'immeubles à leur charge qui incombent normalement aux propriétaires.
En contrepartie, les exploitants agricoles concernés doivent se conformer à l'ensemble des dispositions des articles 216 bis et suivants de l'annexe II au CGI relatives aux droits et obligations des preneurs d'immeubles en la matière.
Ces dispositions s'appliquent également aux améliorations portant sur des immeubles non bâtis, telles les opérations de défrichage effectuées par un fermier sur des terres prises à bail.
13Les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) qui utilisent exclusivement des biens mis à leur disposition par certains de leurs membres peuvent opérer la déduction de la TVA qui a grevé les frais de réparation de ces biens lorsqu'ils en prennent le montant à leur charge.
III. Constructions sur sol d'autrui appartenant au fermier
14Le fermier peut opérer la déduction de la TVA afférente au prix de construction d'un immeuble qu'il a fait édifier sur le terrain pris à bail dans la mesure où une stipulation expresse du contrat de bail ne prévoit pas que le propriétaire du terrain devient propriétaire des constructions avant l'expiration du bail.
Le fermier est soumis aux mêmes obligations que tout assujetti propriétaire des biens constituant des immobilisations et notamment au regard de l'imposition des livraisons à soi-même et des régularisations éventuelles des déductions initiales.
IV. Matériels acquis en commun
15 Lorsque plusieurs exploitants agricoles redevables de la TVA s'associent pour acquérir une immobilisation (matériel notamment), ils peuvent déduire la fraction de cette taxe correspondant à leur participation à l'achat.
Cette possibilité n'est admise que si tous les exploitants agricoles associés sont imposés à la TVA et peuvent justifier de leur droit à déduction par la production d'une facture établie par le fournisseur pour la partie du prix d'achat à leur charge.
16 Lorsque l'achat a été réalisé par des exploitants non redevables qui optent par la suite pour leur imposition à la TVA, cet achat leur ouvre des droits à déduction à compter du début de l'imposition dans les conditions fixées pour les entreprises qui deviennent imposables à la taxe.
La même doctrine est applicable lorsque l'achat en commun a été réalisé par des exploitants agricoles redevables de la TVA et par des exploitants agricoles non redevables, si ces derniers optent pour leur imposition à la TVA. Les droits à déduction ouverts à l'ensemble des exploitants (redevables anciens et nouveaux) sont calculés à compter.de la date du début de l'imposition des derniers exploitants ayant opté.
V. Biens mis gratuitement à la disposition d'un GAEC assujetti
17Les biens qu'un agriculteur met à la disposition gratuite d'un GAEC, en dehors de toute opération d'apport, n'ouvrent pas au GAEC un droit à déduction même dans le cas où ce groupement est redevable de la TVA.
VI. Fioul domestique utilisé par les agriculteurs, les CUMA et les entrepreneurs de travaux agricoles
18Depuis le 1er janvier 1992, et selon les dispositions de l'article 7 de la loi de finances pour 1991, reprises par l'article 298-4 du CGI, le droit à déduction sur le fioul domestique est de 100 %.
19En conséquence, la TVA relative aux achats, importations, acquisitions intracommunautaires, livraisons et services portant sur le fioul domestique qu'il soit utilisé pour des usages agricoles ou non, est déductible en totalité.
VII. Avances aux cultures
20Les agriculteurs qui deviennent redevables de la TVA peuvent, en application de l'article 226 de l'annexe II au CGI, opérer la déduction de la taxe qui a porté sur des biens détenus en stock.
Ce dispositif s'applique notamment aux avances aux cultures 1 dans la mesure où elles correspondent à des biens (semences, engrais, amendements et produits de traitement des végétaux) ou à des services (façons culturales, amendements des terres, semis) qui ont été acquis auprès de tiers (négociants, entreprises de travaux agricoles, CUMA).
En revanche, les frais financiers ne sont pas un élément du prix de revient des avances aux cultures.
Le poste d'avances aux cultures correspond donc uniquement à une quote-part du prix de revient de la production en cours.
Dès lors que les avances aux cultures sont inscrites dans les stocks, la TVA afférente aux éléments constitutifs de ces avances peut faire l'objet d'un crédit de départ de taxe déductible.
Le montant des déductions effectuées à ce titre doit pouvoir normalement être justifié par la production de factures délivrées par les fournisseurs de biens ou de services (art. 271-II du CGI).
Les agriculteurs qui ne seraient pas en possession de ces documents pourront procéder à une évaluation forfaitaire des sommes admises en déduction (achats de semences et travaux effectués par des tiers). en se référant aux éléments retenus pour déterminer des coûts standards à l'hectare. Ils doivent alors être en mesure de fournir au service - qui conserve la possibilité d'exercer son droit de contrôle - toutes informations susceptibles de justifier l'évaluation à laquelle ils ont procédé.
VIII. Animaux détenus en stock par les agriculteurs qui deviennent redevables de la TVA
21Les agriculteurs qui deviennent redevables de la TVA de plein droit ou sur option peuvent en application de l'article 226 de l'annexe II au CGI, opérer la déduction de la taxe qui a porté sur les biens détenus en stock. Ces dispositions sont applicables aux animaux destinés à la revente qui sont détenus en stock à la date de l'assujettissement. La taxe déductible correspond à celle qui a grevé l' achat des animaux et les dépenses exposées pour leur engraissement. Le montant des déductions effectuées à ce titre doit pouvoir être justifié par la production des factures délivrées par les fournisseurs (CGI, art. 271-II). Les éleveurs qui ne seraient pas en possession de ces documents peuvent procéder à une évaluation forfaitaire des sommes admises en déduction en se référant aux coûts standard en usage dans la profession. Ils doivent alors être en mesure de présenter aux services des impôts les éléments qui permettent de justifier l'évaluation à laquelle ils ont procédé (R.M. n° 4767 à M. Jean-Pierre Bauemler, député, JO, AN n° 7 du 13 février 1989, p. 754).
1 Les avances aux cultures représentent l'ensemble des frais et charges engagés au cours d'un exercice en vue d'obtenir la récolte qui sera levée après la clôture de cet exercice. Il s'agit :
1° des frais correspondant aux semences, engrais, amendements et produits de traitement des végétaux ;
2° des frais de main-d'oeuvre relatifs aux façons culturales de l'amendement des terres et des semis ;
3° des frais de matériels relatifs aux même travaux : carburants et lubrifiants, entretien, réparation et amortissement du matériel, travaux réalisés par des tiers.