SOUS-SECTION 2 PRÉJUDICE
SOUS-SECTION 2
Préjudice
1Pour que la responsabilité de l'administration soit engagée, le requérant doit établir, d'une part, qu'il a subi un préjudice.
D'autre part, il faut que le préjudice allégué présente un certain nombre de caractéristiques.
A. CARACTÈRE DIRECT DU PRÉJUDICE
2Pour donner lieu à réparation, le préjudice doit être imputable à l'administration, c'est-à-dire résulter de son fait (CE, arrêt du 26 juin 1992, n° 75558, SARL Slemia, RJF 8-9/92, n° 1238). Par ailleurs, le comportement de la victime ou l'intervention d'un élément tiers ne doit pas avoir modifié grandement les conséquences normales de l'action administrative.
Ainsi a-t-il été jugé que n'est pas en droit d'obtenir réparation un médecin conventionné qui, sur la foi d'une instruction administrative erronée, n'a pas tenu complètement son livre-journal, dès lors que le préjudice qu'il a subi trouve sa cause, non dans la faute commise par l'administration, mais dans le fait qu'il s'est abstenu de produire en temps utile les déclarations de revenus auxquelles il était tenu, se plaçant ainsi en situation de taxation d'office, ce qui l'obligeait, dans la procédure contentieuse, à supporter la preuve du caractère exagéré des bases retenues par l'administration, d'où il résulte qu'il n'y avait pas de lien direct entre le préjudice allegué et la faute de l'administration (CE, arrêt du 8 juillet 1988 n° 77118, X... , Lebon p. 279).
A également été rejetée l'action en responsabilité engagée par une société créancière d'une autre société fondée sur le comportement de l'administration à l'égard de cette dernière société (CE, arrêt du 8 août 1990, n° 54500, Homecare France, RJF 10/90, n° 1262).
Enfin, ne sont pas susceptibles d'ouvrir droit à indemnisation les préjudices qui résultent de l'existence de liens juridiques avec une entreprise, qu'il s'agisse de dirigeants (CAA Paris, arrêt du 21 novembre 1995, X... , n° 94-987, RJF 4/96, n° 492) ou de salariés (CAA Paris, arrêt du 14 octobre 1997, X... et X... , n° 95-3930, Droit Fiscal n° 14/98, n° 298).
B. CARACTÈRE CERTAIN DU PRÉJUDICE
3Est exclu le préjudice simplement possible et éventuel (CAA Bordeaux, arrêt du 28 juin 1994, n° 93-796, X... , Droit Fiscal n° 10/95, n° 466). Mais la jurisprudence assimile assez libéralement au préjudice certain, le préjudice futur, non seulement lorsqu'il est inévitable, mais aussi lorsqu'il présente des chances sérieuses de réalisation.
Ainsi, en s'abstenant de prendre un décret d'application, privant une société de chances sérieuses d'être exonérée de certaines charges fiscales, le Gouvernement lui a causé un préjudice ouvrant droit à réparation (CE, arrêt du 10 mars 1967, Société « Les Ardoisières d'Angers », Leb. p. 116).
En revanche, la délivrance, par la conservation des hypothèques, d'un certificat inexact sans influence sur l'existence d'un préjudice, n'entraîne pas une indemnisation (CE, arrêt du 23 février 1977, Société Timber et Chartering, Droit administratif n° 114).
De même, l'interprétation illégale de textes par l'administration -qui a dissuadé un contribuable de solliciter un agrément- n'est pas constitutif d'un préjudice certain envers ce dernier qui n'avait pas de chances sérieuses de l'obtenir (CE, arrêt du 20 février 1974, Sucrerie Coopérative de Vic-sur-Aisne, Leb. p. 121).