SOUS-SECTION 2 SURSIS
SOUS-SECTION 2
Sursis
1Le sursis, rendu applicable en matière de contributions indirectes par l'article 1801 du CGI entraîne, dans l'immédiat, la suspension de l'exécution de la peine. et, s'il n'y a pas eu récidive dans un délai déterminé (5 ans), l'annulation de la condamnation.
A. CHAMP D'APPLICATION
I. Principe : généralité des infractions
(CGI, art. 1801)
2Cet article prévoit qu'« en cas de condamnation pour infractions aux lois et règlements régissant les contributions indirectes, si l'inculpé n'a jamais été l'objet d'un procès-verbal suivi de condamnation ou de transaction, les tribunaux peuvent, dans les conditions établies par les articles 734 à 737 du code de procédure pénale, décider qu'il sera sursis à l'exécution de la peine pour la partie excédant la somme servant de base au calcul de la pénalité de une à trois fois les droits ».
Depuis l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal au 1er mars 1994, les articles 734 à 737 précités ont été modifiés ou abrogés. Dans sa rédaction résultant de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992, l'article 734 du Code de procédure pénale constitue un texte de renvoi aux articles 132-29 et 132-39 du nouveau Code pénal, relatifs au sursis simple et à ses effets.
II. Exception. - Infractions visées à l'article 1802 du CGI
3Il s'agit des infractions d'une gravité particulière telles que :
- les infractions commises en matière d'impôts sur les cercles et les maisons de jeux (CGI, art. 1797) ;
- les infractions visées à l'article 1810 du CGI et notamment les infractions en matière d'alambics, d'alcools dénaturés, de capsules représentatives des droits, de garantie des ouvrages en métaux précieux, de tabacs, allumettes... ;
- les infractions au régime économique de l'alcool, au monopole des tabacs, à la réglementation prohibant l'absinthe et les liqueurs similaires.
B. CONDITIONS D'APPLICATION
4Une seule condition est exigée pour l'octroi du sursis : le défaut d'antécédents portant sur des infractions qui ont donné lieu à condamnation ou à transaction.
Le bénéfice du sursis peut donc être accordé par les tribunaux à tous les contrevenants non pourvus d'antécédents en matière de contributions indirectes. Il n'est pas nécessaire que la condamnation ait été subie. Il faut cependant qu'elle soit devenue définitive, de même que la transaction, avant la perpétration de la nouvelle infraction.
Par ailleurs, la circonstance qu'un contribuable ait fait l'objet d'une condamnation assortie de sursis et devenue inexistante (délai de cinq ans expiré, cf. ci-après n° 10 ), ne s'oppose pas à l'octroi d'une nouvelle mesure de sursis.
5Il appartient à l'Administration de produire à l'appui des conclusions soumises aux tribunaux, les justifications établissant que le prévenu n'est pas en situation de bénéficier du sursis.
Si le procès-verbal rapporté antérieurement a été suivi d'un jugement de condamnation, il suffit de produire, soit un extrait du jugement, soit un extrait du casier judiciaire (bulletin n° 2).
Si le contrevenant a transigé, il y a lieu de fournir au tribunal une attestation relatant que le prévenu a transigé à telle date, sur un procès-verbal dont copie est jointe. Si les juges ne se contentent pas de cette attestation, l'original de la transaction, qui est conservé au dossier de l'affaire, est produit au tribunal.
En tout état de cause, lorsqu'il accorde le sursis pour l'exécution des peines prononcées, le tribunal doit constater le défaut d'antécédents dans le jugement qu'il rend.
Remarque. - Existence ou non de la bonne foi.
L'article 1801 ne subordonne pas l'octroi du sursis à la constatation de la bonne foi.
Cependant, d'une manière générale, il est de règle que les juges n'accordent pas le sursis aux prévenus de mauvaise foi.
C. POUVOIRS DU JUGE
7Le droit donné au juge de prononcer le sursis s'exerce de manière purement discrétionnaire (Crim. rejet, 26 mars 1974, RJCI, p. 54, cf. également : Crim. rejet 16 décembre 1915, BCI, 1916, 2, p. 10 ; rejet, 22 décembre 1926, BCI, 1927, 4, p. 44 ; rejet 15 décembre 1955, RJCI, 43, p. 237 ; Cass., 4 janvier1957, RJCI, 2, p. 7 ; rejet, 21 novembre 1962, RJCI, 34, p. 111, Bull. crim., 334, p. 688). Lorsqu'ils refusent d'user de ce droit en faveur du prévenu, les juges du fond n'ont pas à s'en expliquer (Crim., rejet 28 janvier1975, RJCI, p. 23).
D. ETENDUE DU SURSIS
I. Nature des peines
8Le sursis ne peut s'appliquer que pour la peine d'emprisonnement et les pénalités pécuniaires ayant le caractère d'amende : amende proprement dite, pénalité proportionnelle de une à trois fois les droits ou la valeur.
Il en est ainsi quels que soient l'importance de l'affaire et le chiffre des pénalités encourues.
La confiscation et les peines spéciales diverses (suspension du privilège du bouilleur de cru, fermeture d'établissement par exemple), sont en dehors du champ d'application du sursis. Cette interprétation est confirmée par la jurisprudence. Ainsi, la Cour de cassation a précisé que « le bénéfice du sursis est expressément limité par la loi aux peines d'emprisonnement et d'amende, à l'exclusion des peines accessoires, et ne peut s'étendre à la confiscation ni aux amendes d'octroi » (Cass. crim., 17 juillet 1908, BCI, 17, Bull. crim., 316).
Dans le même sens en ce qui concerne la confiscation : Cass. crim., 13 juin 1914, BCI, 1915-3, Bull. crim :, 283 ; 31 mai 1919, BCI, 19, Bull. crim., 130 ; 4 décembre 1931, BCI, 1932-2.
Enfin, le sursis n'est pas applicable à l'amende pécuniaire représentant la confiscation (Cass. crim., 29 juin 1938, BCI, 21, Bull. crim., 165).
II. Limites du sursis
9Le sursis ne peut porter que sur la partie de la peine qui excède la somme servant de base au calcul de la pénalité proportionnelle de une à trois fois les droits.
Ainsi, a encouru la cassation un arrêt décidant qu'il sera sursis à l'exécution de la totalité des pénalités fiscales autres que la confiscation, alors que les droits fraudés, dont les conclusions de l'Administration permettaient de déterminer le montant, devaient être exclus du bénéfice de cette mesure (Cass. crim., 2 décembre 1969, RJCI, p. 84, Bull. crim., 321, p. 762).
E. EFFETS DU SURSIS ET RECIDIVE
I. Sursis et récidive ordinaire
10Le sursis a pour effet de suspendre l'exécution de la peine pendant 5 ans.
Le délai d'épreuve de cinq ans court à dater du jugement ou de l'arrêt qui accorde le sursis.
Si, durant cette période, le condamné fait l'objet d'une nouvelle condamnation constituée par une peine d'emprisonnement ou une peine plus grave, la peine suspendue par le sursis devient de plein droit, immédiatement exécutoire. Pendant cette période, la prescription de la peine est suspendue, de sorte que le délai commence à courir, si le sursis a été révoqué, à partir du jour où la peine peut être exécutée (récidive ordinaire, cf. E 224 n°s 8 et suiv. ).
Si, au contraire, à l'expiration du délai de cinq ans, aucune condamnation n'a été prononcée, aussi bien en matière fiscale qu'en toute autre matière, la peine assortie du sursis est réputée inexistante et non-avenue. La condamnation est rayée du casier judiciaire : elle ne fait pas obstacle à l'application du sursis pour une condamnation ultérieure et elle ne peut pas servir à constituer l'état de récidive.
11En raison de ces effets conditionnels, il est nécessaire de suivre les affaires pour lesquelles le sursis a été accordé.
A cet effet, il existe dans chaque direction des services fiscaux, un registre où sont mentionnés les nom, prénoms, adresse, date et lieu de naissance du bénéficiaire du sursis, les condamnations qui ont été prononcées avec sursis à son encontre et la date du jugement.
Périodiquement, afin de s'enquérir de la situation du bénéficiaire du sursis et de savoir s'il.n'y a pas eu « rechute », des demandes de renseignements doivent être adressées au procureur de la République près du tribunal dans le ressort duquel se trouve le lieu de naissance du sursitaire.
II. Sursis et récidive spéciale de l'article 1804 A du CGI
12Le sursis prévu à l'article 1801 du CGI peut être accordé par les tribunaux dès lors que le contrevenant n'a jamais été l'objet d'un procès-verbal suivi d'une condamnation ou d'une transaction pour une infraction punie par les lois et règlements régissant les contributions indirectes.
Il s'ensuit que l'existence d'un procès-verbal antérieur sans condition de délai ou d'identité de contravention, fait obstacle à l'octroi du sursis.
La récidive prévue à l'article 1804 A du CGI, est donc un élément permettant aux juges de refuser l'octroi du sursis.
Bien entendu, l'Administration ne doit pas manquer de faire état des antécédents contentieux des contrevenants pour que les tribunaux soient à même d'apprécier s'il y a lieu d'accorder le sursis aux intéressés.