Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E2225
Références du document :  13E2225

SOUS-SECTION 5 CONFISCATION

SOUS-SECTION 5

Confiscation

1Les sanctions fiscales prévues par l'article 1791 du CGI pour la généralité des infractions aux lois sur les contributions indirectes comprennent, outre l'amende de 100 F à 5 000 F et la pénalité proportionnelle, la confiscation des objets, produits ou marchandises saisis en contravention, cette dernière consistant en l'appréhension des objets de fraude par les verbalisants et leur attribution à l'administration.

En outre, indépendamment des sanctions fiscales précitées, les sanctions pénales énoncées par l'article 1810 du CGI pour certaines contraventions graves, comportent la saisie et la confiscation des moyens de transport, des récipients, emballages, ustensiles, mécaniques, machines ou appareils.

2La confiscation affecte ainsi la généralité des infractions en matière de contributions indirectes. Elle peut, dans certains cas, consister dans une peine pécuniaire égale à la valeur des objets saisis.

3La confiscation est également pévue par le droit pénal à l'article 131-21 du nouveau Code pénal, qui prévoit expressément la confiscation en valeur.

  A. CARACTERES DE LA CONFISCATION

  I. La confiscation a un caractère hybride

4Bien que sa nature ne soit pas nettement définie, la confiscation présente, suivant les matières auxquelles elle s'applique, un caractère prédominant qui est, tantôt celui d'une peine, tantôt celui d'une mesure de police et de sûreté, tantôt enfin, celui d'une réparation civile.

En matière de contributions indirectes, la confiscation peut certes constituer, lorsqu'il s'agit d'objets prohibés, une mesure de police ayant pour but d'empêcher que la fraude puisse de nouveau être commise par ou sur le même objet. Mais la Cour de cassation considère que la confiscation est une peine pécuniaire s'attachant au corps du délit comme réparation du préjudice causé au Trésor. Ce caractère de réparation avait permis aux juridictions répressives de prononcer cette sanction autant de fois qu'il y avait d'infractions en cause. Depuis un arrêt du 19 mars 1990 (Bull. crim. n° 120, p. 389), la Chambre criminelle estime que la confiscation ne peut être prononcée qu'une seule fois même si plusieurs infractions ont été relevées. Ceci conduit à dire que cette sanction présente à la fois un caractère de réparation et celui de peine.

  II. La confiscation à un caractère réel et impersonnel

5C'est une peine inhérente au corps du délit, c'est-à-dire à l'objet de fraude saisi, et qui affecte moins le prévenu que la fraude elle-même. La jurisprudence considère qu'elle s'attache au corps du délit comme réparation du préjudice occasionné au Trésor (Crim. rejet., 18 juin 1914, Bull. crim., 286, p. 530, 31 mai 1918, Bull. crim., 122, p. 218 ; Cass., 24 juin 1942 BCI, 65, p 113 ; Ch. réun. cass. 26 avril 1961 Bull. crim., 223, p. 426. RJCI, 17 p. 53).

6Des deux principaux caractères de la confiscation, caractère de réparation civile et caractère réel, découlent un certain nombre de conséquences qui apparaissent dans les nombreuses solutions jurisprudentielles intervenues en la matière. De ces décisions, se dégagent les principes suivants.

7 a. La confiscation est la sanction obligée de toute contravention dûment établie.

Toute contravention légalement établie en matière de contributions indirectes a pour sanction obligée la confiscation des objets de fraude (Cass. crim. 27 février 1925 BCI, 20, Bull. crim., 78 : 2 août 1928, BCI, 22, Bull. crim., 232 ; 16 mai 1931 BCI, 13 ; 9 mars 1935, BCI, 10, Bull, crim., 31 ; 10 juin 1958, RJCI, 69 ; Bull. crim., 448, p. 794 ; 22 avril 1959, RJCI, 45 ; CA corr. Rennes 18 décembre 1974, RJCI, 151).

Par exemple, la Cour de cassation a ainsi motivé un arrêt de la chambre criminelle en date du 11 décembre 1969 (RJCI, II, p, 90) : « dès l'instant où les juges du fond retenaient la charge des prévenus l'infraction de fausses déclarations prévue par l'article 492 du CGI et qu'ils les déclaraient convaincus de manoeuvres tendant à frauder ou à compromettre les droits, taxes, redevances sur l'alcool, ils se trouvaient dans l'obligation de leur faire application des peines portées à l'article 1791 et notamment de prononcer la confiscation de l'alcool ayant fait l'objet de ces fausses déclarations et de ces manoeuvres ».

De même, il a été jugé qu'encourt la cassation l'arrêt qui retient la culpabilité du prévenu et le condamne aux peines d'amendes encourues, sans prononcer en même temps la confiscation des boissons détenues en fraude, alors que cette dernière pénalité constituait la sanction obligée de l'infraction constatée (Cass. crim., 23 avril 1955, BCI, 15, p, 162 ; 13 avril 1956, BCI, 27, Bull. crim., 291 ; 30 mai 1956, RJCI, 40).

Les tribunaux ont encore décidé :

- que l'arrêt qui constate la détention en vue de la vente de 563,67 hectolitres de vin impropre à la consommation, ne saurait prononcer la confiscation de 420,67 hectolitres seulement, sans indiquer pour quels motifs il n'étend pas cette confiscation à l'ensemble de la saisie (Cass. crim., 9 janvier 1974, RJCI, 19) ;

- que la confiscation, sanction obligée de toute contravention dûment établie doit porter sur toutes les boissons détenues irrégulièrement par suite du défaut de déclaration d'ouverture d'un débit de boissons (C. App. Rennes, 18 décembre 1974, précité, Cass. crim., 23 décembre 1952, RJCI, 21, p. 56 ; 28 mars 1955, RJCI, 13, p. 156 ; 24 juillet1969, RJCI, p. 77).

8 b. La confiscation doit être prononcée dès l'instant où l'infraction est établie ; elle s'attache au corps du délit comme réparation du préjudice causé au Trésor, indépendamment de toute répression de l'auteur de l'infraction (Cass. crim., 27 mai 1876, Bull. crim., 147, p. 256).

9C'est ainsi que la confiscation est encourue :

- lorsque le contrevenant ne peut être poursuvi, parce qu'il est inconnu ou a disparu. Par un arrêt du 8 juillet 1841 (Bull. crim., 204, p. 326 ; Mém. des Cl, vol. 16, p. 140 ), la Chambre criminelle a admis l'Administration à saisir la juridiction répressive par voie de simple requête, les tribunaux correctionnels, seuls compétents pour ordonner la confiscation des objets saisis par les agents, ne pouvant être dépouillés de cette attribution, lorsque le contrevenant en disparaissant ou en demeurant inconnu, « s'est soustrait à toute poursuite, à toute condamnation personnelle » (Dans le même sens : Cass. crim., 16 décembre 1898, BCI, 1899, 19, Bull. crim., 370 ; 27 février 1925, BCI, 1925, 20, Bull. crim., 78, 9 mars 1935, BCI, 10, Bull, crim., 31 ; 22 avril 1959, RJCI, 45) ;

10- en cas de relaxe du prévenu. Lorsque le prévenu est renvoyé des fins de la poursuite par le tribunal, cette décision ne fait en rien obstacle à la confiscation des objets de fraude. Le principe est général ; il n'y a pas à distinguer entre les circonstances qui font que le contrevenant échappe à toute condamnation. La Chambre criminelle, du reste, l'a toujours entendu ainsi, puisque, déjà, un arrêt du 3 juin 1813 déclare que : « quelle que fût l'opinion des juges... sur la culpabilité ou sur l'innocence du prévenu, ils ne pouvaient, au moins, se dispenser de prononcer la confiscation du tabac saisi, comme objet prohibé » (Mém. des Cl, vol. 10 p. 63). La même doctrine se retrouve dans de nombreuses décisions postérieures et notamment dans les arrêts suivants : Cass. crim., 6 novembre 1885, Mém. des Cl, vol. 21, p. 471 ; Bull. crim., 295, p. 472 ; Cass. 8 novembre 1889, Journal des Cl, 1891, p. 520 ; Bull. crim., 330, p. 521, Cass., 26 octobre 1906, BCI, 24, p.124 ; Bull. crim., 386, p. 706 ; Cass., 24 octobre 1913, Bull. crim., 458, p, 878, Cass., 8 juin 1917, Bull. crim., 140, p. 238 ; Cass., 25 mars 1936, BCI, 10, p. 145 ; Cass., 19 mai 1943, RJCI, 35, p. 35 ; Cass., 22 avril 1959, RJCI, 45, p. 139. Toute cette jurisprudence est d'une parfaite netteté. Il en résulte que, quand la contravention est constatée, les tribunaux ont le devoir d'ordonner la confiscation des objets « alors même que, soit par un jugement d'acquittement, soit par une ordonnance de non lieu, il n'aurait pas été démontré que le prévenu fut l'auteur de la contravention » (Cass., 8 juin 1917, précité) et « qu'en omettant, malgré la relaxe des inculpés, de prononcer la contravention des marchandises saisies » une Cour d'appel viole la loi (Cass., 27 décembre 1945, précité), ou encore qu'encourt la cassation l'arrêt qui, après avoir constaté qu'un chauffeur d'automobile a transporté dans sa voiture une certaine quantité de tabac colporté en fraude par un autre individu, refuse de prononcer la confiscation du véhicule par le motif que le conducteur était relaxé des fins de la poursuite (Cass. crim., 21 octobre 1948, BCI, 30, Bull. crim., 241) ;

11- en cas de décès du contrevenant. En effet, le décès du prévenu, avant jugement définitif, s'il éteint l'action correctionnelle en ce qui concerne les amendes encourues, est sans influence sur les demandes de l'Administration relatives, d'une part à la pénalité proportionnelle et au paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues qui ont pour objet la réparation du préjudice causé au Trésor public, d'autre part, à la confiscation, qui est une mesure de caractère réel affectant les marchandises de fraude. Dès l'instant où la contravention est reconnue constante, la confiscation, qui n'a rien de personnel, doit être prononcée, abstraction faite des propriétaires de l'objet de fraude, même après le décès du contrevenant, en la personne de ses héritiers. La jurisprudence est nombreuse et nettement établie en ce sens (Cass. crim., 9 décembre 1813, Mém. vol., 11, p. 51, Bull. crim., 258, p, 624, 16 décembre 1898, BCI, 1899, p. 322, 4 juin 1910, BCI, p. 56 ; 28 mars 1914, BCI, 15, Bull. crim., 176 ; 7 janvier 1921, BCI, 9, Bull. crim., 6, 29 novembre 1929, BCI, 1930, 2, Bull. crim., 266 ; 9 octobre 1940, BCI, 1941, 3 ; 3 mars 1949, RJCI, 6, p. 13 ; 16 mars 1950, RJCI, 13, p. 35 ; 23 juillet 1953, RJCI, 30, p. 78 ; 1er mars 1956, RJCI, 19, p. 299, Bull. crim., 215 ; 14 janvier1959, RJCI, 39, p. 67 ; 18 mai 1960, RJCI, 51, p. 145, Bull. crim., 271, p. 556, 2 novembre 1960, RJCI, 74, p.217 ; Ch. réun., 26 avril 1961, RJCI, 17, p. 53, Bull. crim., 223, p. 426 ; Cass. crim., 12 décembre 1973, RJCI, p. 132 ; Crim. rejet, 9 mars 1992, Bull. crim. n° 104, p. 270).

12 c. La confiscation doit être prononcée, abstraction faite de la personne du propriétaire de l'objet saisi, dès l'instant où la contravention est établie.

La confiscation, en raison de son caractère réel, affecte la marchandise saisie en contravention, en quelque lieu qu'elle se trouve ou en quelques mains que ce soit, même quand le propriétaire est hors de cause (Cass. crim., 14 novembre 1946, Bull. Douanes, 1947, 43 ; 16 mars 1950, BIC, 13). Il en est de même de la confiscation des voitures et autres objets ayant servi au transport des alcools circulant en contravention, abstraction faite de l'état de noncontrevenant du propriétaire des véhicules (Cass. crim., 30 octobre 1963, RJCI, 20, p. 72). L'article 1875 du CGI prévoit d'ailleurs que « la confiscation des objets saisis peut être poursuivie et prononcée contre les conducteurs, sans que l'Administration soit tenue de mettre en cause les propriétaires, quand même ils lui seraient indiqués, sauf si les propriétaires intervenaient ou étaient appelés par ceux sur lesquels les saisies ont été faites, à être statué, ainsi que le droit, sur leurs interventions ou réclamations ».

En outre, il résulte des dispositions de l'article L 245 du LPF que les propriétaires n'ont aucun recours contre l'Administration saisissante (Trib. inst. Marseille, 14 juin 1960, RJCI, 60).

13 d. La confiscation est prononcée même en cas de nullité du procès-verbal.

La loi fiscale (art. L 243 du LPF) précise que la confiscation des objets prohibés peut être prononcée par les juges, même si le procès-verbal, entaché d'un vice de forme, ne peut servir de base à l'application de l'amende fiscale et des autres peines ; qu'elle peut même être prononcée pour tous les objets saisis, prohibés ou non nonobstant la nullité du procès-verbal, lorsque l'infraction est suffisamment démontrée par l'instruction.

14Toutefois, si la nullité du procès-verbal résulte de l'inobservation des formalités imposées pour les visites domiciliaires - par les articles 1855 et suivants du CGI, issus de la loi du 28 avril 1816 et de celle du 6 août 1905 - on ne peut réclamer la confiscation, car une action procédant d'une violation de domicile ne peut être utilement engagée (Cass. crim., 13 décembre 1895, BCI, 1896, n° 13). La portée de cette règle a été précisée par la Cour de cassation dans un arrêt du 7 janvier 1942 (BCI, 30, p. 52) pris en matière de tabacs selon lequel « la confiscation de tabacs de fraude doit être ordonnée par les juges, alors même que le procès-verbal serait nul pour violation des règles relatives aux visites domiciliaires dès l'instant qu'il s'agit d'objets prohibés et qu'au surplus, la contravention est démontrée par l'instruction ». S'il s'agit d'objets non-prohibés, la jurisprudence admet que la confiscation peut être prononcée dès lors que l'infraction résulte d'éléments d'information absolument indépendants de la visite irrégulière (Cass. crim., 9 juin 1943, BCI, 41, p. 49, Bull. crim., 50).

15 e. La confiscation doi être prononcée, même en cas de destruction de l'objet saisi.

Dès lors qu'un objet a été saisi à la suite d'une contravention, il se trouve grevé, au profit de l'Administration, d'un droit réel, par application de l'article L 245 du LPF. Par suite, lorsque cet objet est détruit par un incendie, la substitution, au profit des créanciers privilégiés et hypothécaires, de l'indemnité d'assurance au prix de la chose sinistrée, permet à l'Administration, dès lors que la confiscation a été prononcée, d'exercer son droit de préférence sur l'indemnité due par l'assureur comme elle l'aurait exercé sur le prix, si le bien avait été vendu, Et le fait que la décision correctionnelle qui a prononcé la confiscation soit postérieure au sinistre 1 est sans influence sur les droits de l'Administration qui remontent au jour où le procès-verbal a été dressé (Cass. civ., 13 novembre 1940, BCI, 1941, 2, Bull. civ., 167).

16 f. Le principe de non-cumul des peines est applicable à la confiscation.

Par un arrêt du 19 mars 1990 (Bull. crim. n° 120, p. 309) constituant un revirement de jurisprudence, la Cour suprême a mis fin à l'application cumulative de la peine de la confiscation au titre d'un même objet, produit ou d'une même marchandise (cf. également Crim. 6 mars 1991, Bull. crim. n° 107 ; Crim. 25 mars 1991, Bull. crim. n° 141 ; Crim. 30 mars 1992, Bull. crim. n° 395).

17 g. La confiscation est prononcée solidairement à l'encontre de tous les prévenus.

Qu'elle soit réelle ou fictive, la confiscation constitue toujours une peine pécuniaire. Dans ces conditions, elle doit être prononcée solidairement à l'encontre de tous les prévenus en vertu des dispositions de l'article 1799 A du CGI (Cass crim, 31 mai 1954, BCI, 27, p. 66).

1   Dans le cas d'espèce ayant donné lieu à l'arrêt cité, les verbalisants avaient donné mainlevée de la saisie pratiquée.