Date de début de publication du BOI : 01/09/1999
Identifiant juridique : 7H1112
Références du document :  7H1112

SOUS-SECTION 2 CLASSIFICATION DES SOCIÉTÉS

  II. La société créée de fait

21À la différence de la société en participation qui résulte d'un contrat passé entre les associés, la société créée de fait pour laquelle la loi ne donne aucune définition, résulte du seul comportement des parties lorsqu'elles agissent, entre elles ou à l'égard des tiers, comme de véritables associés. L'article 1873 du code civil reconnaît l'existence de telles sociétés en leur appliquant les règles relatives aux sociétés en participation.

22Les critères d'existence de la société de fait 1 sont les suivants :

1. Critères jurisprudentiels.

23Selon une jurisprudence constante du Conseil d'État l'existence d'une société de fait suppose la réunion simultanée de trois conditions :

a. Chaque membre doit participer effectivement aux apports en capital ou en industrie.

À cet égard, le critère de la participation aux apports est satisfait alors même qu'il ne serait fait que des apports en industrie (mise à la disposition par les associés de leurs connaissances techniques, de leur travail, de leur notoriété ...) ;

b. Chaque membre doit participer effectivement à la gestion de l'entreprise ; c'est-à-dire aux fonctions de direction ou de contrôle et doit pouvoir engager l'entreprise vis-à-vis des tiers.

Cette participation doit être effective. Elle implique que l'associé dispose de pouvoirs de gestion qui ne soient pas limités ;

c. Chaque membre doit participer effectivement aux résultats bénéficiaires ou déficitaires de l'entreprise.

En principe, le critère de participation aux résultats est établi au vu d'une convention écrite prévoyant une répartition de ces résultats entre les associés de fait.

Cependant, en l'absence d'une telle convention, cette participation peut résulter par exemple de la perception d'une rémunération variable et demeurant sensiblement égale à une proportion de bénéfice, de l'absence de toute rémunération en période déficitaire, de la signature de traites obligeant l'associé à supporter éventuellement une partie du passif, etc.

Mais la simple répartition de charges entre coexploitants ne constitue pas, à elle seule, une participation effective aux résultats.

24Une société de fait n'existe qu'entre les associés qui remplissent simultanément les trois conditions.

À cet égard la société de fait se distingue :

• de la simple entraide entre exploitants agricoles : celle-ci suppose une reddition des comptes mais les exploitants ne participent ni à la gestion ni aux résultats de l'ensemble des exploitations ;

• du contrat d'exercice professionnel à frais communs : ce type de contrat que l'on rencontre fréquemment dans le secteur des professions libérales n'organise qu'une simple répartition des charges entre cocontractants ;

• du contrat de prêt avec participation aux bénéfices lorsque le prêteur demeure écarté de la gestion des affaires.

En revanche, une société de fait est constituée dans le cadre :

• d'une convention d'exercice conjoint conclue entre membres de professions libérales, dans la mesure où en principe les trois critères jurisprudentiels caractérisant la société de fait sont simultanément satisfaits ;

• d'une association professionnelle d'avocats constituée dans les conditions prévues par l'article 8 de la loi du 31 décembre 1971 et les articles 70 et suivants du décret d'application du 9 juin 1972.

2. Critère administratif.

25Sans qu'il y ait lieu de démontrer préalablement que les trois conditions énoncées ci-dessus sont remplies, le service est fondé à se prévaloir de l'existence d'une société de fait lorsque les déclarations souscrites en matière d'impôts directs ou indirects font état de cette société.

3. Précisions diverses.

a. Exploitation en indivision.

26L'exploitation d'une activité en indivision constitue une exploitation en société de fait si les trois conditions énoncées ci-dessus n°s 23 et 24 sont remplies, que l'indivision soit légale ou conventionnelle. L'existence d'une indivision ne constitue pas à elle seule la preuve de celle d'une société de fait.

b. Société de fait entre époux.

27La loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 a levé l'interdiction faite à deux époux d'être ensemble, indéfiniment et solidairement, responsables du passif d'une même société.

En principe, deux époux peuvent donc, seuls ou avec d'autres personnes et quel que soit leur régime matrimonial, être associés dans une société de fait. Bien entendu, l'existence d'une telle société de fait reste toujours subordonnée à la condition que les trois critères requis par la jurisprudence du Conseil d'État soient remplis (participation aux apports, à la gestion, aux résultats).

L'ensemble des conséquences fiscales au regard de tous impôts, taxes et droits sera tiré de l'existence de cette société.

  D. SOCIÉTÉS TYPES ET SOCIÉTÉS PARTICULIÈRES

28Toute société doit, pour être reconnue comme telle, répondre à la définition qu'en donne l'article 1832 du code civil.

Mais en raison de la nature de leur activité, de nombreuses sociétés sont soumises à des textes particuliers qui complètent et souvent modifient cette législation. C'est le cas notamment des sociétés commerciales dont l'organisation et le fonctionnement sont régis par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 qui est, pour ce type de sociétés, le texte fondamental. Aussi distingue-t-on les formes de société à vocation générale (société type) et celle réservées à des situations particulières (société particulière).

Mais on assiste même parfois à la création de sociétés hybrides qui entrent mal dans les classifications traditionnelles. On peut citer à cet égard les coopératives agricoles organisées par les lois n° 72-516 du 27 juin 1972 et n° 91-5 du 3 janvier 1991 qui forment une catégorie spéciale de sociétés distinctes à la fois des sociétés civiles et des sociétés commerciales.

Les sociétés types peuvent être soit civiles, soit commerciales. Parmi les sociétés commerciales, existent notamment les sociétés en nom collectif, à responsabilité limitée, anonymes, etc.

Les sociétés particulières répondent à des situations spécifiques qui ne peuvent pas être organisées dans le cadre des formes types. Aussi, la loi crée-t-elle un régime spécial en adaptant ou modifiant certaines règles applicables aux sociétés types.

29En définitive, les sociétés commerciales ou civiles de type particulier sont multiples, leur particularité intrinsèque tenant :

- soit au statut juridique :

• sociétés coopératives précitées ;

• sociétés à capital variable (SICAV ...) ;

• sociétés d'économie mixte ;

• ...

- soit, le plus souvent, au secteur d'activité auquel elles appartiennent. On citera notamment :

• parmi les sociétés anonymes :

° les sociétés d'assurances, de capitalisation et d'épargne ;

° les sociétés d'investissement en valeurs mobilières ;

° les sociétés immobilières d'investissement ;

° les sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie (SICOMI) ;

° ...

• parmi les sociétés civiles :

° les sociétés civiles de construction ;

° les sociétés professionnelles régies par la loi du 29 novembre 1966 (sociétés civiles professionnelles, sociétés civiles de moyens ...) ;

° les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) ;

° les groupements agricoles dont notamment les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC), les groupements fonciers agricoles (GFA), les groupements forestiers (GF), les groupements fonciers ruraux (GFR).

Certaines sociétés, malgré leur objet orienté vers l'agriculture ou des activités similaires ont la faculté de choisir la forme soit civile, soit commerciale et donc, indirectement, le régime fiscal de leurs opérations : tel est le cas des sociétés d'intérêt collectif agricole (SICA), des sociétés mixtes d'intérêt agricole et des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) régies par la loi n° 60-808 du 5 août 1960, complétée notamment par la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990.

- Les sociétés d'exercice libéral (SEL).

Ces sociétés, créées par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, ouvrent aux professions libérales la possibilité d'exercer dans le cadre de sociétés de capitaux, soit :

• les sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) ;

• les sociétés d'exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) ;

• les sociétés d'exercice libéral en commandite par actions (SELCA).

30Au regard des droits d'enregistrement, ces diverses sociétés ou organismes de type particulier sont actuellement soumis, dans la plupart des cas, au régime fiscal de droit commun.

1   La terminologie « société de fait » recouvre une signification identique à celle de « société créée de fait » employée par le législateur.