Date de début de publication du BOI : 10/09/1996
Identifiant juridique : 7A233
Références du document :  7A233
Annotations :  Lié au BOI 7A-1-07

SECTION 3 CONVENTIONS AFFECTÉES D'UNE MODALITÉ


SECTION 3

Conventions affectées d'une modalité


1Le droit prévu pour une opération juridique déterminée ne peut être perçu que si celle-ci a un effet actuel et certain.

Certaines modalités pouvant affecter les conventions (condition, terme, clauses alternative et facultative) sont donc susceptibles d'exercer une influence sur l'exigibilité des droits.


  A. CONDITION


2Aux termes de l'article 1168 du code civil « l'obligation est conditionnelle lorsqu'on la fait dépendre d'un événement futur et incertain soit en la suspendant jusqu'à ce que l'événement arrive, soit en la résiliant selon que l'événement arrivera ou n'arrivera pas ».

La condition est donc suspensive ou résolutoire : elle peut parfois être simplement potestative (Code civ., art 1170).


  I. Condition suspensive


1. Définition et caractères.

3« L'obligation contractée sous une condition suspensive est celle qui dépend ou d'un événement futur et incertain ou d'un événement actuellement arrivé mais encore inconnu des parties » (Code civ., art. 1181).

La condition suspensive ne se présume pas. Un contrat ne peut être considéré comme affecté d'une condition de cette nature que si les parties ont formellement exprimé leur volonté en ce sens. C'est ainsi que ne doivent pas être considérés comme condition suspensive :

- la simple mention dans un acte de vente que le prix sera payé comptant ;

- la clause, insérée dans un acte sous seing privé, de recourir plus tard à la forme authentique ;

- le dédit lorsqu'il est prévu, à titre d'indemnité dans une convention ayant un caractère parfait et actuel.

2. Différence avec le terme et la condition résolutoire.

4Le terme diffère de la condition en ce qu'il ne suspend pas l'engagement dont il retarde seulement l'exécution (Code civ., art. 1185). Il y a terme et non condition lorsque l'événement auquel est subordonnée l'obligation doit nécessairement se produire : c'est un événement futur et certain.

La condition résolutoire subordonne à un événement futur et incertain, non l'exécution de l'obligation, mais sa révocation.

La distinction entre la condition suspensive, le terme et la condition résolutoire, très nette en théorie, est souvent délicate en pratique. C'est d'après l'intention des parties, telle qu'elle résulte des autres clauses de l'acte, qu'il y a lieu de se prononcer en cas de difficultés.

3. Exigibilité du droit fixe des actes innomés.

5La condition suspensive, qui rend incertaine la formation du lien de droit, produit le même effet sur l'exigibilité de l'impôt normalement dû : la convention qui en est assortie donne seulement ouverture au droit fixe des actes innomés ; l'acte ou la mutation verbale sous condition suspensive n'est d'ailleurs pas soumis obligatoirement, de par son objet, à l'enregistrement ; par contre, la formalité est obligatoire pour les actes constitutifs ou translatifs de droits réels immobiliers même s'ils sont assortis d'une condition suspensive.

6Exceptionnellement, il est dérogé à ces principes à l'égard des droits exigibles sur les contrats de mariage, qui sont perçus immédiatement dès l'enregistrement de l'acte quoique les stipulations du contrat soient subordonnées à la célébration du mariage. La restitution des droits est admise en cas de non célébration.

7La loi a également prévu une exception en ce qui concerne les cessions d'offices ministériels qui, bien que soumises à la condition suspensive de l'agrément du cessionnaire par le Gouvernement donnent immédiatement ouverture à l'impôt (CGI, art. 724). Celui-ci est d'ailleurs restituable si la nomination du cessionnaire n'intervient pas.

4. Réalisation de la condition suspensive.

8Si la condition suspensive ne se réalise pas, la convention ne se forme pas et l'exigibilité du droit est définitivement écartée.

Lorsque, au contraire, la condition se réalise, elle emporte en droit civil un effet rétroactif : la convention doit être considérée comme pure et simple dès l'origine (Code civ., art. 1179).

9Au point de vue fiscal, il y a lieu de considérer que l'instrument complet de la convention résulte seulement de la réunion de l'acte conditionnel et de l'acte constatant la réalisation de la condition. Par suite, le droit ne peut être perçu que si la réalisation de la condition est elle-même constatée par un acte.

Toutefois, lorsque la convention conditionnelle est une mutation qui serait soumise obligatoirement à déclaration à défaut d'acte, si elle était pure et simple, cette mutation doit être déclarée, en cas de réalisation de la condition, comme si elle était verbale. Les parties peuvent se dispenser de cette déclaration en présentant à la formalité, dans le délai prévu pour cette dernière, soit l'acte conditionnel complété d'une mention indiquant la date de la réalisation de la condition, soit l'acte établi, le cas échéant, pour constater cette réalisation.

10D'autre part, l'article 676 du CGI prévoit que « le régime fiscal applicable et les valeurs imposables sont déterminés en se plaçant à la date de la réalisation de la condition ». Ce texte, de portée générale, conduit à faire complètement abstraction, pour la liquidation de l'impôt, de l'effet rétroactif de la condition. Il en résulte notamment que la nature et la quotité des droits exigibles doivent être déterminées compte tenu de la législation en vigueur au jour de la réalisation de la condition et, accessoirement, que le droit fixe éventuellement perçu sur l'acte originaire n'est pas susceptible d'être imputé sur le droit définitivement exigible.

11  La chambre commerciale de la Cour de cassation a ainsi jugé que :

- si le régime fiscal applicable et les valeurs imposables, sont déterminés en se plaçant à la date de la réalisation de la condition suspensive (art. 676 du CGI), l'acte conditionnel et l'acte constatant cette réalisation forment ensemble l'instrument complet de la convention. En conséquence, en l'absence de toute valeur figurant dans le second acte, l'administration est fondée à percevoir les droits proportionnels sur le prix déclaré dans l'acte conditionnel, sans préjudice de son droit de remettre en cause, ultérieurement, l'estimation si elle la juge insuffisante, par voie de notification de redressement (Cass. com., arrêt du 20 juillet 1981, n°771, aff. M. Jean-Bernard X...  : RJ III, p. 116) ;

- lorsqu'une acquisition placée sous le bénéfice des dispositions de l'article 1115 du CGI (acquisition par un marchand de biens) est affectée d'une condition suspensive, le point de départ du délai dont disposent les marchands de biens pour revendre n'est pas la date du transfert de propriété mais celle de la réalisation de la condition suspensive. En vertu de l'article 676, alinéa 1, du CGI, cette dernière date détermine, en effet, le régime fiscal applicable à l'opération (Cass. com., arrêt du 6 juin 1984, aff. X...  ; RJ, p. 26) ;

- lorsque le paiement de partie du prix d'une mutation est affecté d'une condition suspensive, les droits à percevoir immédiatement ne portent que sur la partie du prix qui est, dès lors, exigible et le supplément de droits, se rapportant à l'autre partie, ne peut être réclamé qu'en cas de réalisation de la condition (Cass. com., arrêt du 22 mai 1978, aff, X... RJ III, p. 96).

5. Preuve de la réalisation de la condition.

12Pour pouvoir exiger le droit proportionnel ou progressif, il suffit à l'administration d'établir la réalisation de la condition. Elle peut, à cet effet user de tous les modes de preuve compatibles avec la procédure écrite et utiliser au besoin son droit de communication.

6. Exécution avant réalisation de la condition suspensive.

13Si le contrat est exécuté avant la réalisation de la condition, le droit devient exigible de la même manière qu'en cas de réalisation. Si la convention nouvelle ne se borne pas à constater une réalisation anticipée et modifie l'acte originaire, le droit est dû sur ce nouveau contrat, sans égard à la convention primitive devenue sans objet.


  II. Condition résolutoire


14La condition résolutoire est celle qui, lorsqu'elle s'accomplit, opère la révocation de l'obligation et qui remet les choses au même état que si l'obligation n'avait pas existé. Elle ne suspend pas l'exécution de l'obligation ; elle oblige seulement le créancier à restituer ce qu'il a reçu dans le cas où l'événement prévu par la condition arrive (Code civ., art. 1183).

La condition résolutoire ne suspendant pas la convention est considérée comme inopérante au point de vue de l'impôt ; l'acte qui en est affecté donne immédiatement ouverture au droit qui lui est applicable.

Si la condition ne se réalise pas, la perception est naturellement confirmée.

Si elle se réalise, la convention est, en droit civil, rétroactivement anéantie. Cependant, afin d'éviter des fraudes, l'article 1961 du CGI n'autorise la restitution du droit perçu sur l'acte résolu que dans le cas où la résolution dérive de la loi exclusivement (résolution d'une donation pour cause de survenance d'enfant).

15Il est précisé que la réalisation d'une condition résolutoire comporte des conséquences différentes en matière de droits d'enregistrement et de taxe de publicité foncière, d'une part, et de TVA, d'autre part.

En effet, il a été décidé qu'en cas de résolution, par l'événement d'une condition résolutoire, d'une vente d'immeuble qui a donné lieu au paiement de la TVA, la taxe acquittée sur l'acte initial serait imputable ou restituable (cf. DB 8 A 1121, n° 35). En revanche, par application des dispositions de l'article 1961 du CGI, si l'acte ultérieurement résolu porte sur un immeuble bâti, la taxe de publicité foncière perçue au titre de sa publication au fichier immobilier n'est pas restituable.


  III. Condition potestative


1. Condition simplement potestative.

16La condition simplement potestative est celle qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher (Code civ., art. 1170).

La condition simplement potestative produit, suivant le cas, les mêmes effets que la condition suspensive ou que la condition résolutoire.

2. Condition purement potestative.

17C'est elle qui fait dépendre le contrat de la seule volonté des parties.

Le code civil déclare nulle la convention soumise à une condition purement potestative de la part du débiteur de l'obligation (Code civ., art. 1174). Le droit proportionnel n'est donc pas exigible sur le contrat affecté de cette condition puisqu'il n'existe pas, alors, d'obligation ; quant à la condition purement potestative de la part du créancier, elle ne modifie en rien le contrat si celui-ci est unilatéral, mais peut l'empêcher s'il est synallagmatique ; il en est ainsi pour une promesse de vente subordonnée à l'acceptation du preneur.


  B. TERME


18Le terme est un événement futur mais certain, qui.n'emporte pas d'effet sur la formation immédiate du rapport de droit, mais en retarde l'exécution (terme suspensif) ou en détermine l'extinction sans rétroactivité (terme extinctif) [Code civ., art. 1185 et suiv.].

Il n'empêche donc pas la perception de l'impôt dans les conditions ordinaires.


  C. CLAUSE ALTERNATIVE


19L'obligation alternative donne à l'une des parties le droit d'opter entre deux prestations, l'une et l'autre in obligatione (Code civ., art. 1189 et suiv.).

Seule doit être soumise à l'impôt l'obligation qui sera exécutée. Lors de l'enregistrement, le service taxe l'obligation donnant lieu à la perception la moins élevée. Un supplément de droit est réclamé si c'est l'autre obligation qui est exécutée.


  D. CLAUSE FACULTATIVE


20L'obligation facultative donne simplement au débiteur la faculté de se libérer d'une prestation, seule in obligatione, en accomplissant une autre prestation.

C'est donc la première prestation qui doit être immédiatement taxée. Mais si c'est l'autre prestation qui est exécutée et si elle donne lieu à des droits supérieurs à ceux perçus, l'excédent doit être réclamé par l'administration.