Date de début de publication du BOI : 24/01/2006
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 12 du 24 JANVIER 2006


CHAPITRE 2 :

LE CONTROLE DES COMPTABILITES INFORMATISEES


128.La conservation des données informatiques a, notamment pour objet leur réutilisation pour le contrôle des comptabilités tenues au moyen de systèmes informatisés.

129.En effet, conformément à l'article L 47 A du livre des procédures fiscales, lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, les agents de l'administration fiscale peuvent effectuer leur contrôle en procédant à des traitements informatiques des données conservées.

Ces traitements informatiques peuvent être réalisés, selon l'option exercée par le contribuable :

- soit par le vérificateur sur le matériel présent dans l'entreprise ( L 47 A alinéa 1) ;

- soit par le contribuable lui-même qui effectue tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification ( L 47 A alinéa 2) ;

- soit par le vérificateur, hors de l'entreprise, après remise de copie des fichiers informatiques nécessaires par le contribuable ( L 47 A alinéa 3).

130.Il est précisé que l'édition ou l'impression sur papier de tout ou partie des états produits par le système, et de tout ou partie de la documentation informatique, demandées par l'administration fiscale pour procéder au contrôle de comptabilité prévu à l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, ne constituent pas des traitements, au sens de l'article L. 47 A du même livre.


Section 1 :

Modalités pratiques du contrôle des comptabilités informatisées


  1. Dispositions communes

131.Si le vérificateur chargé du contrôle a recours à l'intervention d'un vérificateur spécialisé dans le contrôle informatique, le nom et l'adresse administrative de ce dernier sont communiqués au contribuable.

132.La proposition de rectification visée à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales précise la nature et le résultat des traitements effectués par ou à la demande de l'administration fiscale, lorsque ces traitements donnent lieu à rectification. Un exposé clair de la démarche suivie doit permettre au contribuable d'être en mesure de formuler ses observations.

  2. Accès à la comptabilité informatisée

133.Certaines entreprises confient la tenue de leur comptabilité à un ou plusieurs prestataires extérieurs qui réalisent tout ou partie des opérations comptables et de gestion (saisie, élaboration ou conservation des informations et documents).

134.Dans le cas où les informations, les données et les traitements prévus à l'article L. 13 du livre des procédures fiscales seraient saisis, élaborés ou conservés par un tiers, l'entreprise vérifiée est tenue de les mettre ou faire mettre à disposition des agents de l'administration, afin qu'ils puissent exercer le contrôle dans les conditions prévues à l'article L. 47 A du même livre.

Les contribuables doivent s'assurer que pourront être accessibles et consultables sur le territoire national, en cas de contrôle, les documents, données et traitements soumis au droit de contrôle de l'administration et détenus par des tiers, quel que soit le lieu habituel de détention (à l'étranger notamment).

135.Lorsque la documentation informatique est créée ou détenue par un tiers, celui-ci est tenu de la mettre à disposition de l'administration fiscale en cas de contrôle.

136.Dans l'hypothèse où des pièces justificatives sont constituées par des factures transmises par voie électronique au sens des articles 289 bis et 289 V du code général des impôts, les contribuables doivent s'assurer que les factures dématérialisées, émises par eux ou en leur nom et pour leur compte, par leur client ou par un tiers, ainsi que toutes les factures dématérialisées qu'ils ont reçues, sont accessibles dans le respect des dispositions de l'article L. 102 C du livre des procédures fiscales.

137.Conformément à l'article R* 102 C-1 III du même livre, le contribuable s'assure que les factures et données détenues par lui-même ou en son nom et pour son compte, par un client ou par un tiers sont accessibles, en cas de contrôle, dans le meilleur délai, depuis son siège ou son principal établissement, quel que soit le lieu de détention de ces documents.

138.Une attention particulière doit être apportée lorsque ces documents sont conservés en dehors du territoire national.

En effet, l'article R* 102 C-1 I précise que les assujettis à la TVA ne peuvent stocker les factures transmises par voie électronique dans un pays non lié à la France par une convention prévoyant d'une part une assistance mutuelle ayant une portée similaire à celle prévue par la directive n° 76/308/CEE du 15 mars 1976 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement de créances relatives à certaines cotisations, droits et taxes et autres mesures et par la directive n° 77/99/CEE du Conseil du 19 décembre 1977 concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des Etats membres dans le domaine des impôts directs et indirects et le règlement CEE n° 218/92 du Conseil du 27 janvier 1992 concernant la coopération administrative dans le domaine des impôts indirects ( TVA ) et d'autre part, un droit d'accès en ligne, de téléchargement et d'utilisation des données conservées.

  3. Mise en oeuvre de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales

139.Quand l'administration entend procéder à des traitements informatiques et intervient sur le fondement de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, les sujétions personnelles, matérielles et logicielles imposées par ce texte aux entreprises ont pour contrepartie leur liberté de choix quant aux modalités de réalisation de ces traitements.

140.Les traitements demandés à l'entreprise et leurs modalités de réalisation lui sont exposés dans le cadre du débat oral et contradictoire, conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat « Sarl Le Veneto » du 16 juin 2003, n° 236503 : traitements effectués par le vérificateur sur le matériel de l'entreprise, traitements effectués par l'entreprise, traitements effectués hors de l'entreprise.

141.Si le choix de l'entreprise est de réaliser elle-même les traitements, l'administration précise par écrit sa demande de traitements.

142.Le choix pour l'une des trois modalités de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, laissé à l'initiative de l'entreprise, est susceptible d'être différent pour chaque traitement demandé. Ce choix doit être fait par écrit, dans les délais fixés par l'administration.

143.La possibilité offerte à l'administration par la loi de travailler sur le matériel de l'entreprise doit concilier le fonctionnement quotidien de l'entreprise avec la mission de service public du contrôle fiscal.

144.Par ailleurs, le choix de l'entreprise pour la troisième modalité, qui permet au contribuable de mettre les copies des documents, données et traitements soumis au contrôle à la disposition de l'administration, peut apporter une solution au problème de la modification de l'environnement informatique, matériel et logiciel, en « préconstituant » des copies de fichiers sur support informatique, étant entendu que :

- les normes définies à l'article A 47 A-1 du livre des procédures fiscales concernent des modalités de remise de fichiers à l'administration et non de conservation, cette dernière restant libre ;

- à titre de simplification technique, l'entreprise est fondée à utiliser tout caractère qu'elle jugera adapté comme séparateur d'articles et de champs, à condition de l'identifier clairement dans la description organique de chaque fichier ;

- en se limitant à un choix prédéterminé, l'entreprise s'impose des contraintes particulières tenant à la nécessité de s'assurer de la qualité des archivages effectués et à leur maintenance en état d'exploitation pendant la période soumise au contrôle, a fortiori en cas de recours à un prestataire extérieur.

- Traitements effectués par les vérificateurs sur le matériel de l'entreprise

145.Lorsque, en application de l'article L. 47 A, alinéa 1 du livre des procédures fiscales, les agents effectuent la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable, ce dernier doit prendre toute mesure utile permettant la préservation de l'intégrité des données et la sécurité du matériel et des logiciels.

146.En outre, le contribuable doit mettre à la disposition des agents de l'administration un environnement informatique intellectuel et matériel comportant notamment les informations, données, traitements et la documentation, permettant de réaliser, dans des conditions normales, les investigations nécessaires à la vérification. Celles-ci pourront comprendre des jeux d'essais.

- Traitements effectués par l'entreprise

147.En application de l'article L. 47 A, alinéa 2 du livre des procédures fiscales, le contribuable peut demander à effectuer lui-même tout ou partie des traitements nécessaires à la vérification.

148.Les agents chargés de la vérification doivent indiquer par écrit la nature des travaux à effectuer et le délai demandé pour leur réalisation, compatible avec les contraintes inhérentes au fonctionnement de l'entreprise.

149.Si la demande ainsi formulée n'est pas acceptée par le contribuable, ce dernier doit par écrit et dans la limite du délai de réalisation accordé, proposer soit le recours aux autres modalités prévues à l'article L. 47 A, alinéa 1 ou 3, soit de nouvelles modalités dans le cadre de l'article L. 47 A, alinéa 2 sans pour autant porter atteinte au déroulement normal de la vérification.

150.Pour des raisons de simplicité et de bonnes pratiques, les entreprises sont vivement encouragées à remettre les résultats des traitements demandés sous une forme dématérialisée.

- Traitements effectués hors de l'entreprise

151.En application de l'article L. 47 A, alinéa 3 du livre des procédures fiscales, le contribuable peut demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il est alors tenu de remettre au vérificateur la copie des documents, données et traitements demandés par celui-ci pour mener à bien la vérification. Il en effectue la duplication par ses propres moyens ou ceux d'un prestataire.

Ces copies doivent répondre aux normes fixées par l'article A 47 A-1 du livre des procédures fiscales précité.

152.La remise des fichiers est obligatoirement accompagnée d'une description des enregistrements relative aux informations :

- de gestion : nom de zones, libellé, etc... ;

- techniques : type, structure, position, longueur des zones, code ou caractères utilisés à titre de séparateur de zones et d'enregistrements, le jeu de caractères utilisé pour représenter l'information.

153.Les moyens mis en oeuvre par le vérificateur pour exploiter ces copies et procéder au contrôle des éléments de la déclaration sont portés à la connaissance du contribuable dans le cadre du débat oral et contradictoire : programmes, conditions d'exécution du ou des traitements et documentation informatique éventuellement créée à cet effet.

154.Au plus tard avant la mise en recouvrement, les copies sont restituées au contribuable. En application de l'article L. 47 A, alinéa 6 du livre des procédures fiscales, l'administration ne conserve pas de copie des fichiers qui ont été transmis.

155.Si, après restitution des copies de fichiers, le contribuable conteste la validité des traitements effectués, il doit être en mesure de produire et transmettre à nouveau à l'administration des copies identiques aux premières. L'administration pourra ainsi ré-appliquer les traitements initiaux, voire y intégrer de nouveaux traitements tenant compte des observations du contribuable.


Section 2 :

Conséquences au regard de la procédure de rehaussement


  1. Comptabilité informatisée non régulière et/ou non probante

156.Comme dans le cadre du contrôle des comptabilités « papier », les constatations effectuées sur place lors du contrôle d'une comptabilité informatisée effectué selon la procédure de rectification contradictoire des articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales ou selon une procédure d'imposition d'office ( cas du contribuable défaillant ) peuvent conduire à considérer que la comptabilité informatisée est irrégulière et/ou non probante.

157.En présence de comptabilités informatisées, l'attention est attirée sur le fait qu'une apparence de régularité peut être aisément obtenue par certaines fonctions du logiciel justifiant les écritures comptables en permettant :

- l'utilisation de brouillards permanents avec des éditions conformes aux journaux clôturés ;

- la suppression ou la modification d'enregistrements génériques sans laisser de trace ;

- la clôture apparente d'un exercice pour établir les comptes annuels.

158.Les exemples ci-après illustrent, sans être exhaustifs, les situations qui peuvent conduire à considérer que la comptabilité informatisée est irrégulière et/ou non probante :

- la présentation sous des formats non recevables (illisibles, propriétaires) des documents comptables et pièces justificatives dématérialisés, visés à l'article 54 du code général des impôts ;

- le défaut de validation des écritures comptables ou des pièces justificatives ;

- le défaut de clôture des exercices comptables ;

- le défaut de traçabilité ;

- l'absence de chronologie dans les enregistrements ;

- l'absence de permanence du chemin de révision ;

- l'insuffisance des données archivées : échantillons de données ou uniquement données agrégées (centralisation mensuelle par exemple).

159.Les constatations matérielles sont formalisées par écrit, soit dans un procès-verbal, soit dans la proposition de rectifications.

Bien entendu, le rejet de la valeur probante et sincère d'une comptabilité informatisée présentée est apprécié avec discernement au vu de l'étendue et de la gravité des manquements constatés.

160.Dans ce cas, à l'instar de ce qui est effectué dans une vérification de comptabilité « papier », la reconstitution du chiffre d'affaires peut être réalisée au moyen des méthodes connues ( calcul de coefficient, comptabilité matière, méthode statistique, par exemple).

161.Lorsque des données pertinentes pour cette reconstitution sont disponibles, en tout ou partie, sous forme informatisée, elles seront exploitées sous cette forme afin de motiver d'autant mieux la reconstitution réalisée.